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Front de Gauche : nouveau regroupement politique et vieilles recettes.

Edito de Partisan n°266 - juin 2013

Au lendemain de la manifestation du FdG du 5 mai, Jean-Marc Ayrault recevait les « partenaires sociaux ». La protestation à peine terminée, l’amorce d’un nouveau tour de vis. La conférence sociale de juillet l’année dernière a abouti à la loi sur la flexibilité. Au menu de la conférence sociale des 20 et 21 juin prochains : les retraites. Comment taper les travailleurs de 20 milliards de plus, en diversifiant les attaques pour ne pas provoquer d’explosion, et avec suffisamment de concertation pour que les directions syndicales soient heureuses d’être valorisées ?!
Alors, face à cette nouvelle attaque, le « peuple de gauche » qui était dans la rue le 5 mai sera-t-il en mesure de peser véritablement contre un capitalisme en crise ?

 

Contre le capitalisme aujourd’hui, qui peut-on rassembler, et pour faire quoi ?
Qui ? « Beaucoup de vieux, les anciens du PC... », remarque une jeune militante de VP à cette manif du 5 mai. Très peu d’immigrés, pratiquement pas. Peu de dynamisme, sauf dans le cortège... du NPA. Des boites en lutte, mais pas PSA... Et à la fin, l’Internationale et la Marseillaise !
Le programme du FdG pour 2012 répondait indirectement à la question de qui rassembler. Il promettait un SMIC à 1700 €, et « que l’écart entre le plus bas et le plus haut salaire ne puisse dépasser 1 à 20 ». 1700 x 20 : 34 000 € par mois ! Vous appelez ça la classe ouvrière, vous ?

 

Et pour faire quoi ? Un nouveau premier ministre pour Hollande ? Une VIe constitution, moins présidentielle et plus parlementaire (un retour à la IVe) ? Une politique économiste protectionniste (le repli nationaliste) ? Le FdG, c’est tout de même en grande partie le PC continué, sauvé de la faillite par une fusion-acquisition, avec reprise de l’ensemble de sa politique intérieure, le réformisme, et de sa politique extérieure, le nationalisme. Souvenons-nous que le FdG a apporté son soutien à l’intervention en Libye et au Mali, à la vente des Rafales en Inde. Mais aviez-vous remarqué, dans le même programme 2012, l’absence du droit de vote aux immigrés, remplacé par un « droit à la naturalisation ». Si tu veux voter, tu n’as qu’à prendre la nationalité ! Digne de l’UMP !

 

Voilà le rôle du réformisme : s’appuyer sur nos galères et nos révoltes, sur notre dégoût vis-à-vis de ces socialistes-capitalistes au pouvoir, pour mieux nous ramener dans le jeu politique bourgeois. Organiser des mobilisations purement protestataires contre le PS, se positionner dans les municipales de 2014 pour mieux préparer les présidentielles de 2017. Nous resservir pour la 4e fois « la gauche », après celles de Mitterrand, de Jospin et de Hollande.
Nous ne pouvons pas être dupes, après 30 ans de gauche au pouvoir : à chaque fois, avec ou sans le PCF, le PS a mené les « réformes » dont avaient besoin les capitalistes pour augmenter leurs profits, aussi bien et parfois mieux que la droite.
Le « Prenez le pouvoir » de Mélenchon candidat signifiait concrètement « Votez pour moi ». La démarche politique aujourd’hui consiste à peser sur le PS pour qu’il soit « plus de gauche », et constituer à terme, avec lui, un grand « Front populaire ».

 

Certains, à la gauche du FdG, tels que le PCOF ou la GA (Gauche Anti-capitaliste, transfuge du NPA), s’efforcent de nous faire croire que la dynamique du FdG pourrait déboucher sur une véritable « transformation sociale » si on arrive à peser suffisamment pour qu’elle ne s’arrête pas à mi-chemin. On pourrait y croire si eux-mêmes, avec des expressions comme « transformation sociale » justement, ou « anti-capitalisme », n’avaient pas commencé par mettre leur drapeau communiste révolutionnaire dans leur poche pour mieux rentrer dans le jeu politique bourgeois des élections, de la constitution et des phrases ronflantes.

 

« Alors, qu’est-ce que vous proposez, vous, VP ? Si le programme du FdG était appliqué ce serait déjà pas mal, non ? »
Le problème est qu’un programme de réforme tel que proposé par le FdG est inapplicable en cette période de crise du capitalisme. La « politique néolibérale » que déplore le FdG n’est que la politique permettant au capitalisme en crise de se refaire sur le dos des travailleurs.

 

Face à cette nouvelle attaque contre les retraites, nous serons dans la lutte aux côtés de beaucoup d’adhérents du FdG. Mais si un grand nombre de travailleurs ont bien compris que cette « réforme » annoncée est un nouvel épisode de la lutte des classes, une nouvelle attaque dirigée contre nous, seule une minorité voit plus loin, plus large, et fait la différence entre un changement de personnel politique bourgeois et un changement de classe sociale au pouvoir. Que cette minorité se rassemble et s’organise : c’est une lutte, moins visible qu’une lutte massive, mais c’est la lutte-clé de l’heure. Maintenant, à l’automne, et encore pour quelques années.

 

A VP, nous proposons : de voir la réalité (du capitalisme) en face ! Ce n’est pas deux décennies, ni une politique ! La crise du système, avec des hauts et des bas, dure depuis 40 ans. Et à moins d’une nouvelle guerre mondiale, on ne reviendra pas aux « Trente glorieuses » (1945-75) qui furent une période de reconstruction. Et ceux qui opposent au FdG la grève générale, juin 36 et mai 68, ne répondent pas non plus au fond du problème, celui du pouvoir d’une classe et celui d’une économie de profit, de concurrence et d’exploitation.

 

Oui, nous affirmons qu’aujourd’hui il est moins utopique de lutter pour en finir avec le capitalisme que de prétendre le réformer. Il est moins utopique d’exiger de « travailler tous, moins et autrement » en en finissant avec le capitalisme par le pouvoir des travailleurs, que de penser retrouver le plein emploi et de sortir du chômage avec le capitalisme. Soyons réalistes : la révolution n’est pas « citoyenne ».

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