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PSA : Une lutte riche d’enseignements
Partisan N°267 - été 2013
Les camarades de PSA ont ‘suspendu la grève’ après 4 mois de blocage total de la production par plusieurs centaines de grévistes. Leur lutte pour l’emploi s’inscrit dans celles de tous les prolétaires du monde face aux restructurations, face à la spirale sans fin de la crise capitaliste.
Une opposition aux projets capitalistes
Les grévistes se sont affrontés à une direction de choc qui ne voulait rien lâcher. C’était un gros enjeu pour le patronat et la classe bourgeoise dans son ensemble : engager une « restructuration exemplaire », sans « troubler l’ordre social » capitaliste, car d’autres suivront…
Les ouvriers en lutte ont montré dans quel camp se trouvait le gouvernement Hollande/Montebourg. Il se prétend « de gauche et socialiste » mais applique en fait la loi du capital. Les grévistes se sont affrontés à la répression, aux CRS envoyés par Hollande/Valls et ils ont montré que la police et la justice sont du côté des bourgeois. Banques, entreprises et Etat : les yeux se sont ouverts sur ces vrais ennemis de la classe ouvrière. Les ouvriers ont résisté à tous les discours fatalistes « on n’y peut rien ». Ils ont résisté aux discours chauvins sur la défense de « l’industrie française » en défendant leurs seuls intérêts de classe.
Ils se sont organisés en assemblée générale quotidienne et en comité de grève, en refusant de déléguer leurs décisions à des avocats ou experts politiques et syndicaux, même les mieux intentionnés.
Ils ont été capables d’organiser une vaste solidarité financière et politique, avec plus que 800.000 euros de collecte en provenance de toute la France et d’ailleurs. Collecte qui leur a permis de tenir dans la durée.
L’opportunisme de Lutte Ouvrière
PSA fermera l’usine. En sanctionnant des grévistes, PSA détournait la lutte vers la défense des licenciés. La mise en avant d’une prime de départ supplémentaire (« vendre sa peau le plus cher possible », disent les opportunistes) a été saisie par la direction pour substituer les solutions individuelles à l’unité des travailleurs. Lutte Ouvrière, qui dirige la CGT à Aulnay, ne s’est pas opposée, par opportunisme, à cette mise en avant de la prime alors qu’elle ne pouvait que mener à la division. Et LO ne s’est pas engagée, dès qu’elle a su - en 2011 - que PSA voulait fermer Aulnay, à préparer et organiser la résistance ouvrière nécessaire en mobilisant l’opinion populaire par la coordination (1) et par la création de collectif de soutien dans les entreprises et dans les quartiers.
Des succès mais aussi des faiblesses
La forte détermination des ouvriers s’appuyait sur plusieurs années de luttes et de résistance quotidienne. La conscience assez nette d’une majorité d’ouvriers comme quoi il ne fallait rien attendre de la direction Peugeot et un noyau militant fortement organisé, dans la CGT principalement ont été des points forts (2). La « force des travailleurs c’est la grève », affirmait les ouvriers en lutte, mais c’est aussi l’organisation, comme l’a démontré le mouvement gréviste tout au long de la lutte. On l’a bien vu à travers les AG et les comités de grève quotidiens.
Une question clé se posait : l’attitude vis-à-vis des directions syndicales qui boycotteront de fait le mouvement de lutte. Elles ne feront RIEN pour élargir et coordonner les luttes contre les restructurations industrielles qui ne manquent pas. Ce boycott a été contredit par de nombreuses structures de base de la CGT, et d’autres syndicats, qui fourniront un fort soutien financier.
Malgré tout, il devient évident que depuis quelques années la résistance déterminée et organisée des travailleurs tend à se développer. On ne compte plus les occupations d’entreprises, les manifestations, les protestations massives contre les fermetures d’entreprises. L’ambiance de résistance, de protestation en Europe et dans le monde favorise ces avancées.
Voie Prolétarienne
Notre organisation pendant ces années de lutte n’a pas chômé. Nous avons, par nos propos, par nos journaux et autres bulletins propagé et développé une orientation de lutte collective soucieuse de construire une large unité de lutte sur une orientation claire : « Contre tous les licenciements, contre le plan de PSA de supprimer 11.000 postes ». Visant à élargir le regard sur l’ensemble du système capitaliste, ainsi que sur l’alternative nécessaire : le communisme. Nous appuyant sur les contacts internationaux tissés lors de la Coordination Internationale des Travailleurs de l’Automobile (CITA), nous avons mobilisé ses participants. Ainsi d’Allemagne, d’Espagne, du Brésil…, la solidarité s’est manifestée par des messages, par des délégations lors de rassemblement, par le soutien financier. Notre organisation a soutenu la grève par des collectes sur les marchés et dans les entreprises et en préparant tous les lundis matin un café de l’amitié à l’arrivée des grévistes. Alors renforçons notre organisation dans la perspective de reconstruire un Parti révolutionnaire.
(1) On rappellera que LO c’est toujours opposée à toute participation à la Coordination International des Travailleurs de l’Automobile (CITA).
-2) Le syndicat SUD a lui aussi contribué à cette lutte mais pas sans ambiguité.
La crise : prétexte pour les patrons ou vraie tare du système ?
Pour certain,s c’est un truc voulu pour justifier les restructurations et augmenter les profits ; pour les autres c’est une fatalité du système, mais qu’il faut de toute façon refuser de payer ?
Mais est-ce qu’on va lutter de la même façon si on croit qu’il suffirait d’obliger la famille Peugeot à utiliser ses 40 milliards de magot pour maintenir les emplois ; ou si on pense que dans la guerre économique entre les patrons il y a forcément de la casse, et qu’il ne suffit pas de se battre comme des lions pour les empêcher de fermer l’usine et de nous virer, mais qu’il faut aussi s’organiser pour en finir avec un système qui n’a pas d’autre raison d’être que de nous exploiter ?
Dans le premier cas, on va avoir tendance à limiter la lutte à "notre" entreprise, contre "notre" patron, dans un affrontement de plus en plus dur, mais en appelant seulement les autres travailleurs à la solidarité, sans qu’ils se sentent directement concernés. On demandera à l’État de faire une loi pour empêcher ces patrons voleurs de nous licencier, comme si cet État, de gauche ou de droite, pouvait changer les lois du capital et obliger les patrons à partager les profits...
Dans le deuxième cas, on essaiera d’étendre la lutte à tous les ouvriers, dans les autres boîtes, en sachant que même s’ils ne sont pas touchés immédiatement — mais aujourd’hui ils le sont de plus en plus —, ils ont intérêt à construire tous ensemble, avec nous, un rapport de force qui fera reculer les patrons, et derrière eux l’État…
Extraits de Plein Phare n°5 (Plein Phare est un bulletin d’entreprise ouvert à tous les travailleurs et dirigé par notre organisation).
