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Déclaration VP : Troupes françaises hors du Rwanda !

Partisan N°92 - Septembre 1994

« Protéger les populations contre les massacres », était le credo humanitaire avancé par le gouvernement Balladur/Mitterrand pour intervenir militairement au Rwanda. Composée de troupes d’élite très bien équipées, l’armée française occupe aujourd’hui un cinquième du territoire rwandais et une partie du Zaïre.

Ces prétentions auraient pu paraître crédibles si l’Etat français n’avait pas cessé de soutenir économiquement et militairement durant plus de 20 ans la dictature raciste et sanglante du régime d’Habyarimana. Ce sont les mêmes paras français (et belges) qui avaient sauvé ce dernier d’une première déroute devant l’offensive du Front Patriotique Rwandais (FPR) en 1990. C’est l’Etat français qui a formé et entraîné l’armée et les milices de la dictature. C’est l’Etat français qui a organisé la protection et l’évacuation des proches du dictateur assassiné, qui a laissé évacuer la radio des « Mille Collines » qui poussait au crime. C’est encore l’Etat français qui protège aujourd’hui les dignitaires du régime déchu et les miliciens sanguinaires dans la zone dite de sécurité.

En avril dernier, cette dictature fasciste établissait des listes noires d’opposants, lançait des appels aux meurtres et armait ses milices. Au même moment les forces françaises et celles de l’ONU désertaient le Rwanda et évacuaient leurs ressortissants laissant libre cours au massacre des opposants et à l’un des plus grands génocides du 20ème siècle.

Le crime quasiment achevé, l’Etat français renvoyait ses soldats pour ne pas permettre une victoire totale et rapide du FPR. Cela a accru le drame du peuple rwandais en incitant les populations affolées par les radios de l’ancien régime, à rejoindre la zone dite de « sécurité ». Une concentration de millions de personnes dans un milieu inadapté ne pouvait que créer des épidémies dans une population déjà affaiblie par la guerre, la famine et le SIDA (entre 10 et 20% de séropositifs).

Ce n’est pas une « catastrophe humanitaire », c’est une catastrophe préméditée et organisée par l’impérialisme français et l’ancien régime.

Par ses causes et ses conséquences inouïes nous ne pouvons que condamner l’intervention française et lutter pour son retrait. Cette intervention a trois objectifs :
1/- diminuer la portée de la déroute politique et militaire d’un gouvernement « allié », ouvertement fasciste et pro-impérialiste. En effet, cette déroute ne peut qu’encourager les peuples africains, écrasés par le FMI, la dévaluation du franc CFA, le libéralisme, etc., à la révolte.
2/- rassurer ses autres alliés en Afrique et d’abord Mobutu au Zaïre ou Bongo au Gabon en montrant que l’Etat français est toujours prêt à intervenir en cas de trouble. Vu l’état de décomposition de plusieurs Etats africains, un tel message est d’importance pour l’avenir proche.
3/-renforcer la présence française dans une zone anciennement d’influence belge, face aux prétentions croissantes des Etats-Unis dans cette partie de l’Afrique. D’autant qu’il s’agit d’un pays stratégique aux confins de grands pays miniers (Zaïre, Ouganda) et de la zone d’influence anglophone (Tanzanie, Ouganda...).

Nous soutenons le combat de toutes les forces démocratiques dans la mesure où il fait ses preuves, et s’affiche ouvertement non tribal, anti-raciste et anti-impérialiste. C’est de cet œil critique que nous observons la politique bien timide du FPR.
Après la Bosnie et la Somalie, nous dénonçons une nouvelle fois la stratégie « humanitaire » de l’impérialisme international qui vise à réprimer les luttes des peuples dominés pour les maintenir dans le cadre du « nouvel ordre mondial ».

Paris, juillet 94

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