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Syrie : la révolution ne se fera pas avec les impérialistes, mais contre eux !

Déclaration - Syrie

Déclaration de l’Organisation Communiste Marxiste-Léniniste Voie Prolétarienne

100 000 victimes, plus d’un million de réfugiés depuis le soulèvement de mars 2011 dans la région de Deraa, soulèvement né de la paupérisation des travailleurs et des paysans de la région. Comme les peuples tunisien et égyptien, le peuple syrien, opprimé par un régime des plus policiers du monde arabe, aspire à plus de liberté et à plus de justice sociale.
Depuis, l’affrontement armé a pris le dessus sur les manifestations politiques sans réussir à renverser le régime et sans que ce dernier ne puisse le vaincre. L’opposition armée a l’appui des impérialistes occidentaux, du Qatar ainsi que le l’Arabie Saoudite, mais aussi le soutien d’une fraction du peuple syrien. Toutefois, le régime, dont les propagandistes occidentaux disaient qu’il allait être balayé par « la révolution », tient bon avec l’aide de la Russie et de l’Iran, ainsi que du Hebzbollah libanais. L’armée lui reste acquise, malgré des désertions. Il tient par la terreur et les massacres de masse, mais conserve un appui dans les villes. Il bénéficie de la passivité d’une partie grandissante du peuple qui craint un pouvoir islamiste.

Le peuple syrien avait raison de vouloir renverser le régime !

Le régime syrien a eu une image progressiste et anti-impérialiste. Dans les années 1970, il portait les intérêts d’une bourgeoise d’Etat nationaliste. Il avait engagé des réformes (enseignement, éducation, santé) élargissant sa base sociale en développant la petite bourgeoisie urbaine (fonctionnaires). Pour rallier diverses minorités, entre autres religieuses, il a défendu un Etat laïc. Il a accordé des droits aux réfugiés palestiniens plus qu’aucun autre pays arabe.
Toutefois, le régime baasiste n’était pas plus socialiste que l’URSS dont il était l’allié. Il n’est pas un Etat dirigé par les exploités, pour les exploités. Ses réformes sociales lui assuraient une base sociale, mais son ultime rempart restait une armée ne répugnant pas aux massacres de masse, comme à Hama en 1982.

Avec la libéralisation économique de la fin des années 1980, une bourgeoisie affairiste et prédatrice, associée au régime, a prospéré alors que le chômage explosait. Le fossé s’est élargi entre les exploités et leurs exploiteurs. Les « progressistes » ou les « communistes », qui ont accepté d’intégrer le « Front national progressiste » dirigé par le Baas, se sont coupés des masses. Ils ont laissé le champ libre à l’opposition politique islamiste, issue des Frères musulmans et aujourd’hui dans la résistance armée de plus en plus portée par les groupes salafistes et jihadistes.
L’absence de direction progressiste du soulèvement a permis aux impérialistes occidentaux de l’instrumentaliser avec pour objectif la reprise en en main la région et l’affaiblissement de l’Iran.

Les impérialistes occidentaux ont intérêt au renversement du régime

Les USA et les Occidentaux ont tenté d’utiliser le soulèvement populaire pour renverser le régime syrien, les autres impérialistes (Russie et Chine) soutenant Assad pour contrer les ambitions américaines. Que par le passé le régime baasiste ait rendu des services aux Occidentaux (contre Saddam Hussein par exemple), qu’il ait été un facteur de stabilité régionale, malgré ses déclarations antisionistes, cela ne pèse plus guère. Pour les USA, sa chute et la mise en place d’un gouvernement dominé par les Frères musulmans renforceraient leur contrôle de la région, y marginalisant la Russie et préparant la chute du régime iranien, obstacle à leur contrôle régional renforcé.

Depuis longtemps, les USA cherchent à organiser le « croissant fertile » sous leur hégémonie par une alliance entre la Turquie (membre de l’Otan), l’Irak, la Syrie, le Liban, en y incluant Israël. Ils veulent contrôler cette région pétrolière et stratégique, non pour sécuriser leur approvisionnement, mais pour tenir le robinet du pétrole dont la Chine a besoin. Ce que la Chine ne peut accepter en aucune manière. La Russie est encore plus engagée dans le soutien à Assad. Elle veut garder un débouché, important pour ses industries militaires et sauver un régime qui lui offre, grâce à la base navale de Tartous, une présence militaire, économique et politique solide en Méditerranée.

L’impérialisme français, qui cultivait les meilleures relations avec Bachar El Assad il y a quelques années, s’est engagé dans le soutien au soulèvement. Il lui apporte un appui politique et matériel. Il défend ses alliés régionaux : la bourgeoisie libanaise et les sionistes. La France a occupé la Syrie après le démantèlement de l’Empire ottoman. Le peuple syrien se souvient de sa sanglante répression de la révolte nationale de 1925-1926 et de celle de mai 1945. En 1939, pour acheter la neutralité de la Turquie dans le conflit avec l’Allemagne, le gouvernement français lui a donné le Sandjak d’Alexandrette peuplé de Syriens.

Les USA s’appuient sur la Turquie, le Qatar (soutien des Frères musulmans) et l’Arabie saoudite (soutien des Salafistes). L’Etat sioniste, qui a des relations avec la Turquie et le Qatar, est intervenu directement militairement par deux fois. Ces pays agissent pour le compte des USA, mais aussi pour le leur. Lors des accords conclus à Doha en novembre, la Turquie aurait obtenu qu’un gouvernement syrien issu de la « révolution » renonce à toute revendication de souveraineté sur des territoires comme Alexandrette et qu’il expulse les militants du PKK, les USA que la Syrie abandonne ses droits sur le Golan.

Mais les choses ne se passent pas ainsi que le souhaitaient les Occidentaux. Leur projet de renversement de Assad est contrecarré par la résistance du régime armé par la Russie. Ils craignent par ailleurs que la poursuite du conflit ne débouche sur un renversement d’Assad par les Salafistes, dont l’influence s’accroît dans l’opposition armée. Ils les contrôlent bien moins que les Frères musulmans du Conseil national syrien (CNS). Dans la perspective d’une conférence, au cours de laquelle ils s’entendraient sur une issue politique, les USA, les Européens et les Russes font de la surenchère militariste. Les premiers lèvent leur « embargo » à la livraison d’armes, alors que celles-ci sont déjà livrées par le Qatar, les seconds disent avoir fourni des missiles anti-aériens au régime.

Les USA, la France, la Russie et la Chine, n’agissent pas par souci du peuple syrien. Les impérialistes n’ont pas « d’amis », ne défendent pas des « valeurs », démocratiques ou non. Ils n’ont que des intérêts auxquels ils sacrifient les peuples quand il le faut.

La révolution syrienne est à venir !

L’Armée syrienne libre est un label auquel se réfèrent des groupes armés, autonomes et idéologiquement divers. Mais les brigades qui ont infligé les principaux revers à l’Armée du régime sont jihadites et indépendantes de l’ASL. Certains groupes sont dirigés par des démocrates bourgeois, des progressistes, des laïcs, mais le soulèvement bénéficie à ceux qui seront les plus efficaces et ont l’appui financier ainsi que militaire de puissances étrangères : les Islamistes. Leur cohérence politique et idéologique, leur organisation, les fonds venant du Qatar ou de l’Arabie saoudite, en font les seuls capables de s’imposer en cas de chute du régime.

L’affrontement actuel ne laisse plus de place à la mobilisation populaire et aux partis progressistes qui refusaient de s’engager dans les actions militaires, comme ceux de la Comité national de coordination des forces de changement démocratique (CNCCD). La montée de la corruption dans l’opposition au régime, le rôle croissant qu’y jouent les jihadistes, les crimes qu’ils commettent, bien que moins massifs que ceux du régime, démoralisent l’opposition populaire qui craint l’avenir que ceux-ci préparent. En Syrie, ce n’est pas la révolution qui va de l’avant, mais la réaction.

La lutte révolutionnaire passe par la lutte armée, mais la politique doit « commander au fusil ». Et pas n’importe laquelle. Impossible sans un Parti communiste, enraciné dans les masses exploitées et capable d’unir autour d’elles toutes les autres couches dominées, de faire une révolution au bénéfice du peuple. Les forces « progressistes » sont faibles, divisées. La plupart de celles regroupées dans le CNCCD, ont longtemps appuyé le régime et l’ont considéré comme progressiste et anti-impérialiste. Elles attentent l’issue de la crise de l’action de la Russie. Le Parti communiste syrien, qui a connu des scissions dans les années 2000, a un ministre au gouvernement. Il a pris le parti de la répression et trahit le peuple syrien.
En Syrie, la révolution est à venir. Le peuple y fait l’expérience dramatique de l’impasse dans laquelle débouchent les soulèvements populaires lorsqu’ils ne sont pas organisés par les communistes. Et quand ils ne sont pas appuyés par la solidarité désintéressée des autres peuples, mais comptent sur l’appui des impérialistes et se soumettent à leurs intérêts. Face à la réaction et à l’impérialisme, le peuple syrien, comme les autres peuples arabes et dominés, retrouvera ce chemin, celui de la révolution sociale et anti-impérialiste.

Dans ces conditions, le soutien politique de l’OCML VOIE PROLETARIENNE va aux organisations, aux militants, indépendants du régime, des puissances impérialistes et de la réaction. Il va à ceux et celles qui s’engagent dans cette voie, qui « affirment que la libération des peuples et des exploités dépend principalement de leur lutte indépendante, [qui] luttent pour l’égalité entre les hommes et les femmes, sont laïques et font de la question religieuse une question personnelle, [qui] défendent les droits démocratiques des minorités nationales ». (Résolution du 6e congrès de VP). Il ne peut donc aller à l’ALS, au CNS ou au Gouvernement provisoire syrien dominé par le Frères musulmans, soutenus par la Qatar ou l’Arabie saoudite et liés aux impérialistes. De plus, à Doha, le CNS a accepté d’abandonner au profit de la Turquie et d’Israël la souveraineté syrienne sur certaines régions qu’ils occupent, ainsi que la libre détermination de sa politique étrangère.

Opposé aux ingérences impérialistes, nous dénonçons le régime antipopulaire syrien qui ne répugne à aucun massacre contre son peuple, sans tromper les travailleurs d’ici, révoltés par ses crimes, sur la nature et les buts de ceux qui dirigent la rébellion « parlant au nom du peuple », ou de leurs appuis.

  • Contre les ingérences impérialistes en Syrie. Contre celle de la France en particulier.
  • Contre le régime bourgeois baasiste et ses massacres
  • Soutien aux progressistes emprisonnés et réprimés !
  • Oui le soulèvement armé des peuples contre leurs oppresseurs est légitime, mais en Syrie ce n’est pas le peuple progressiste qui dirige, mais la réaction et les impérialistes.
  • Sans direction communiste, toute insurrection restera aux mains de bourgeois ennemis du peuple.
  • La révolution syrienne est à venir ! Elle ne se fera pas avec l’appui des impérialistes, mais contre eux !

Prolétaires de tous pays, peuples dominés, unissons-nous contre le capitalisme, les impérialistes et leurs complices !

Le 1er juin 2013

Déclaration Syrie Juin 2013

La déclaration à imprimer en pdf

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