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Une vieille histoire : le PS et le soutien inconditionnel à Israël

La position de PS à l’égard du sionisme n’est pas une question tactique ou de circonstance. C’est une attitude politique qui depuis la scission du congrès de Tour en 1920, est restée une constante inséparable de l’attitude de ce Parti à l’égard du colonialisme en général.

 

Dans l’entre deux guerres la majorité du PS (SFIO) a une position « moyenne » sur la question coloniale. Reconnaissant les crimes commis lors de la colonisation, le PS la justifie néanmoins au nom des bienfaits apportés aux peuples « arriérés ». Ainsi en 1928, présentant un rapport au troisième congrès de l’Internationale ouvrière socialiste qui se réunit à Bruxelles pour discuter du problème colonial, le PS (SFIO) peut affirmer qu’« iI n’est pas douteux que la colonisation capitaliste, quelles que soient ses tares, voire ses crimes, a amélioré les conditions de vie des indigènes, leur hygiène lamentable auparavant [...] En même temps disparaissaient ces manifestations de la barbarie primitive, les cruautés, les tortures couramment pratiquées avant la conquête ». Donc, il y avait pire crimes que ceux du colonialisme, ceux de la barbarie primitive dans laquelle étaient, selon, une vision raciste, les peuples non européens.

 

L’attitude de Léon Blum face au problème colonial illustre bien les hésitations des socialistes français : « Nous n’admettons pas, déclare en 1927 le leader socialiste, qu’il existe un droit de conquête, un droit de premier occupant au profit des nations européennes sur les peuples qui n’ont pas la chance d’être de race blanche ou de religion chrétienne. Nous n’admettons pas la colonisation par la force […] Nous aurons accompli ce que vous appelez notre mission civilisatrice le jour où nous aurons pu rendre les peuples dont nous occupons les territoires à la liberté et à la souveraineté. En revanche, en présence de situations de fait dont nous ne sommes pas comptables, […] que nous avons toujours obstinément combattues, que nous combattrons encore en toute occasion, nous ne nous contenterons pas de cette solution à la fois trop simple et trop périlleuse qui consiste soit à prêcher l’insurrection et à faire appel à la guerre de races, soit à exiger l’évacuation immédiate avec tous les périls qu’elle comporterait et pour les colons et pour les indigènes eux-mêmes ».

 

Ainsi, le leader socialiste condamne l’expansion coloniale guerrière, mais aussi l’insurrection armée des peuples colonisés. D’autre part, comme la très grande majorité de son parti, il reste fidèle, avec certaines nuances, à la notion de mission civilisatrice. En pleine guerre du Rif, Léon Blum ne craint pas d’affirmer : « Nous avons trop l’amour de notre pays pour désavouer l’expansion de la pensée, de la civilisation française [...] Nous admettons le droit et même le devoir des races supérieures d’attirer à elles celles qui ne sont pas parvenues au même degré de culture et de les appeler aux progrès réalisés grâce aux efforts de la science ou de l’industrie ». Le Populaire, journal du PS fait à l’occasion l’éloge du colon qui, « avec l’artisan, le petit fonctionnaire, postier, gendarme, ou instituteur, et tous ceux qui consent à l’exil obscur et laborieux du bled, [...] conquiert l’Afrique à la France et à la civilisation ».
Cette attitude constante faites de préjugés racistes sur la « mission civilisatrice » des « races supérieures » fondant la justification d’un colonialisme qui aurait à sortir des « peuples arrières » de la barbarie, pour les conduire vers la lumière de la civilisation, explique bien plus que les liens réels de socialistes juifs avec le mouvement sioniste, leur attitude par rapport à Israël. L’appui des socialistes au sionisme est d’abord l’appui à un mouvement européen porteur des valeurs colonialistes de l’occident bourgeois qui, du fait de sa supériorité, aurait le droit de soumettre des peuples peules arriérés et parmi eux les arabes de Palestine.
Toutefois, Léon Blum a été, tout au long de sa vie politique un sympathisant actif du sionisme, n’y voyant « aucun heurt possible dans sa triple qualité de Socialiste, de Français et de Juif ». Il se disait issu « d’une longue suite d’aïeux français, ne parlant que la langue de mon pays, nourri principalement de sa culture » mais participant « cependant à l’effort admirable miraculeusement transporté du plan du rêve au plan de la réalité historique, qui assure désormais une patrie digne, également libre à tous les Juifs qui n’ont pas eu comme moi la bonne fortune de la trouver dans leur pays natal […]. Je m’en suis toujours senti fier et j’en suis plus que jamais solidaire ». La Palestine, « pays natal des Juifs », ne l’était donc pas des palestiniens eux-mêmes.
En 1928, avec de grands dirigeants comme Arthur Rubinstein et Edouard Bernstein, il a créé le « Comité Socialiste pour la Palestine ». En 1929, il entre à l’Agence Juive pour la Palestine, comme représentant de la Gauche non sioniste et exalte, devant le congrès de Zurich de cette organisation, l’esprit de peuple juif.
Après 1945, Léon Blum est, dans ses fonctions politiques et gouvernementales, un artisan actif de la reconnaissance d’Israël sur le plan international. Il est proche de Chaim Weizmann, premier président d’Israël et participe à la construction de l’étroite alliance diplomatique, économique, militaire et technologique qui unit la France de la IVe République à Israël. En 1947, alors que la France envisageait de s’abstenir au vote sur le partage de la Palestine (Résolution 181), il intervint auprès de Président de la République pour que celui-ci donne ordre, malgré l’avis contraire du ministre des Affaires étrangères Georges Bidault, à Alexandre Parodi représentant français à la jeune ONU, de voter « pour » la partition.

 

En 1947, Jules Moch, Ministre socialiste de l’Intérieur, appuie l’armement des forces de conquête sionistes. Il fait autoriser les escales en Corse des avions américains alimentant clandestinement en armes la Haganah et l’Irgoun. Il facilite, par ailleurs, le transit par la France des Juifs en partance pour Israël. Combattant la tendance qu’il décèle de la part du Ministère des affaires étrangères de manager la Ligue arabe.
Le soutien des Socialistes au Sionisme se manifeste encore de manière éloquente en 1956, pendant le gouvernement dirigé par le leader socialiste Guy Mollet.
Il y a des liens intenses entre les Travaillistes israéliens et les socialistes, dont Guy Mollet. Pour la France, Israël est un allié indispensable au Proche-Orient où l’influence française décline après la fin de la tutelle sur la Syrie et le Liban. Elle y est en concurrence avec les États-Unis et le Royaume-Uni sur le contrôle des hydrocarbures. De plus, la France s’oppose à la politique panarabe de l’Égypte de Nasser qui soutiendra le FLN algérien. Elle trouve en Israël un État qui lui permettait de garder un pied dans la région.
Ainsi, en octobre 1956, Israël intervient avec la France et la Grande Bretagne contre L’Egypte qui a nationalisé le canal de Suez. Les USA et l’URSS mettront fin à cette intervention, par des pressions diplomatiques. Mais l’Armée française est intervenue en Egypte. Des avions français, prêtés par le gouvernement, mais portant alors l’Etoile de David, ont bombardé les Egyptiens. En contre partie de l’aide fournie par les sionistes à une opérations impérialiste mis en échec par d’autres impérialistes, la France, à l’initiative du gouvernement socialiste, fournit très discrètement à Israël la technologie permettant de construire un réacteur nucléaire dans la région de Dimona. Il entrera en fonction entre 1962 et 1964. Celui-ci est depuis considéré comme un site de fabrication d’armes nucléaires. Parallèlement à la construction du site de Dimona, à laquelle des ingénieurs français ont participé, des scientifiques israéliens sont soupçonnés d’avoir été conviés à participer aux essais nucléaires français dans le désert algérien.
La coopération entre les travaillistes israéliens et les socialistes français s’étend aux services de renseignements dans la lutte contre l’ennemi commun égyptien accusé par la France de soutenir les indépendantistes algériens. En 1956, Bourgès-Maunoury, ministre de la Défense dans le gouvernement de Guy Mollet élargit a coopération franco-israélienne à la fourniture d’armes dont des Mirages III de Dassault, dont certains seront fabriqués sous licence en Israël.

 

Depuis, le soutien des socialistes à la colonisation de la Palestine a été constant. En 2000, Lionel Jospin alors Premier ministre en visite en Israël apporte clairement un soutien aux sionistes en dénonçant en des termes très violents le Hezbollah : « La France condamne les attaques du Hezbollah et toutes les actions terroristes unilatérales, où qu’elles se mènent, contre des soldats ou des populations civiles. Oui, ces attaques sont terroristes, et la France souhaite que la réplique frappe aussi peu que possible les populations civiles. Epargner les populations civiles est une contrainte que s’efforce de respecter Israël (Jérusalem, 24 février 2000). » Ces propos avaient fait l’effet d’une bombe dans les Territoires palestiniens. Lionel Jospin avait alors affronté à sa sortie de l’université de Bir Zeit de Ramallah, les jets de pierres et les insultes de centaines de jeunes Palestiniens.

 

Les récentes déclarations de François Hollande sont dans la même veine. Pour lui, le droit est toujours du coté de l’occupant et la révolte de l’opprimé toujours illégitime et condamnable. De la SFIO au PS, les socialistes ont toujours pris le parti des colonialistes, de la « dite civilisation occidentale », contre la « barbarie des races inférieures » et des dominés. Les massacres de civils de femmes et d’enfants par l’armée sioniste sont toujours mis pour eux au compte des « bavures » inévitable dans une guerre, malgré « l’étique » de Tsahal. Les victimes de la révolte des opprimés toujours présentées par eux comme la manifestation de leur fanatisme, de leur barbarie.

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