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Le Bluff des capitalistes en matière d’environnement

Le cas du Sénégal

LA DÉFORESTATION PAR LE CAPITALISME SOUS LE RÉGIME DE DOMINATION COLONIALE

Le capitalisme colonial, parce qu’il pratique le développement inégal, a été le principal agent de la désertification du pays. Il avait fait de Saint-Louis une métropole pour son port entre mer et fleuve. Il a déforesté le nord du pays en drainant vers Saint-Louis pour les besoins alimentaires et pharmaceutiques des colons et de la métropole française les richesses forestières. Il a exploité irrationnellement le bois d’ameublement de choix et de chauffe en détruisant Acacia vérek (gommier) et Gonakier (bois d’œuvre et charbon). Aux indépendances en 1960, la forêt du Nord qui était la muraille contre les attaques du désert a été ainsi pillée. La CSS (Compagnie Sucrière du Sénégal) et la SONEES (Société des Eaux) ont eu à drainer et à exploiter sans contrôle et sans retenue les eaux du Fleuve Sénégal accentuant alors l’exploitation capitaliste des ressources environnementales. Ainsi les premières conséquences ont été le cycle de sécheresse dans les années 1970 dans le centre et dans une partie de l’Est du pays où la culture de rente (arachide, coton) avait supplanté depuis longtemps la culture vivrière pour les besoins des maisons de commerce de la métropole (Maurel et Prom, Lesieur et autres).

SOUS LE RÉGIME DES INDÉPENDANCES, LA MÊME POLITIQUE A ÉTÉ CONTINUÉE

La bourgeoise au pouvoir a choisi, dans les années 90 avec à la tête Abdou Diouf, de faire de la forêt un fonds de commerce électoral. Elle a eu à donner, en 1991, à la féodalité maraboutique alliée 55 000 ha sur 97 000 ha de forêt protégée de Mbégué pour des cultures de rente bousillant ainsi une faune et une flore exception¬nelle. A tout cela, il faut ajouter une délivrance sans souci de permis de coupe monnayés à coup d’argent et d’une contribution en voix électorales.

L’exemple de la baie de Hann est symptomatique de la destruction de l’environnement intrinsèque au mode de développement capitaliste. Le cas de la baie de Hann découle du choix de développement industriel où la question de l’environnement n’est pas prise ne compte. Dans les années 1980, l’État crée une Zone Industrielle le long de la baie de Hann d’une longueur de 14 km. 60% des industries manufacturières y sont implantées et sans se soucier des populations vivant le long de la baie ont déversé dans le canal d’évacuation d’eaux de pluies ses huiles mortes, ses déchets toxiques, ses effluents. Aujourd’hui, les populations riveraines, des pêcheurs ont en face d’eux une des baies les plus polluées du monde, ont vu la mer leur refuser leur moyen de subsistance. Les luttes ont eu lieu. Les populations mobilisées ont réclamé une baie sans les déchets des capitalistes.

L’État a mis en place un projet de dépollution de 35 milliards de francs CFA. Mais comme le dit l’adage : wait and see. Pourquoi ?

Le choix capitaliste du charbon incrimine davantage le régime parce qu’au même moment dans un village de la Baie de Hann, à Bargny, il a commencé la construc¬tion de la Centrale de Charbon de Sendou (nom du site). Si la pratique est le critère de vérité, il n’y a nulle raison, même pour le moins averti, de croire que l’État, au service exclusif des intérêts des capitalistes a une once de sérieux en politique de l’environnement. Il a choisi le charbon, l’énergie la plus polluante, la plus dégradante de l’environnement. Il crie tout haut que c’est parce que le charbon coûte deux fois moins cher que le fuel, et ne dit pas que la C.E.S. (la Compagnie d’Électricité du Sénégal) le veut. La C.E.S agit au nom de l’entreprise suédoise Nykomb synergetics development Ab. Les deux sociétés ont choisi le modèle Partenariat public privé (PPP) en Bot, pour une exploitation d’une durée de 25 ans avant transfert. La Centrale de Sendou d’une capacité de 125 mégawatts a démarré sur un financement de 140 milliards de francs CFA de la Banque africaine de développement (37%), la Banque néerlandaise de développement (23%), la Cbao (15%), la Boad (25%). Les intérêts de ces bailleurs sont explicites et ne se préoccupent pas du tout des résidus des 400 000 tonnes de charbon annuelles, de la pollution de 15 000 mètres cubes pompés, de l’aire des 1000 femmes travaillant à faire du poisson séché ou fumé vendu dans les pays limitrophes à hauteur d’un milliard de francs CFA en valeurs ajoutées. Mais comme toujours, là où il y a exploitation, injustice sociale, il y a des luttes.

Les familles dessaisies des parcelles à titre d’habitation au profit des entreprises capitalistes, les populations de Bargny qui seront coincées entre la pollution d’une cimenterie et celle de cette usine de charbon n’en veulent pas et se battent. Les travaux sont arrêtés pour certains du fait de la forte mobilisation, pour d’autres du fait de différends entre les bailleurs. Le sursis ne démobilise pas les luttes. Kayar, un autre site sur le littoral qui voit s’ériger une centrale de charbon a commencé en novembre 2015 à se battre.

LES CONSÉQUENCES DU CAPITALISME MONDIAL SUR L’ENVIRONNEMENT AU SÉNÉGAL

Au Sénégal, l’Océan gagne chaque année 2m sur les terres. Des villes comme Bargny, Rufisque, des quartiers à Popenguine, à Saint-Louis risquent d’être engloutis sous les eaux. Des centaines de familles ont quitté leur maison ou s’apprêtent à le faire sous la menace des eaux.

Le seul décret pris par l’État en juillet 2015 pour interdire l’exploitation industrielle des forêts, le recrutement annoncé de 400 agents forestiers n’est qu’une façade pour cacher la vérité que les gouvernements qui se succèdent obéissent sans rechigner à la seule logique capitaliste : le profit.

Donc, seul le communisme qui vient pourra mettre la terre au cœur des politiques. Nous serons tous en¬semble pour penser, décider, produire, partager dans le souci de préserver tous et la terre.

Chéky - Sénégal, novembre 2015

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