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Quelle lutte pour le logement ?

Partisan N°248 - Juin 2011

En janvier dernier, l’INSEE a publié une étude sur la situation du logement en France. D’après l’institut national, il y a près de 3 millions de « mal-logés », vivant dans des logements insalubres où les conditions minimum de confort et d’hygiène n’existent pas. 1 million de ménages auraient du mal à payer leur loyer ou ont déjà des impayés. Sans parler de tous ceux qui, même s’ils y arrivent, doivent se saigner pour payer leur loyer, vivent dans des logements trop petits, dans des HLM où les parties communes sont dans un état effarant...
Les prolétaires, qui ont peur de perdre leur boulot, qui ont du mal avec leur petit salaire, doivent aussi gérer les problèmes de logement. C’est un enjeu de la lutte de classe. Le logement social fait partie du salaire indirect, c’est à dire que, comme la Sécurité Sociale, c’est une façon de rétribuer le travail de l’exploité en dehors du salaire direct qu’il reçoit à la fin de chaque mois.

La ligne révolutionnaire et la ligne réformiste.

Des luttes pour le logement, il y en a eu. Et VP en a été. Dans les années 1980 et 1990, en région parisienne, à Lyon, à Marseille, notre organisation a pris part à des collectifs de lutte pour le logement. A Paris, ce fut le Comité des mal-logés, qui organisait des occupations de logements vides pour exiger des relogements décents et des loyers abordables.
A l’époque, deux lignes apparaissaient clairement dans le mouvement de lutte pour le logement.
D’un côté, ceux qui voulaient l’orienter sur une voie opportuniste, en axant la lutte sur la recherche de soutien parmi les personnalités, en se mettant à la remorque du PS et du PC face à Chirac (alors maire de Paris), quitte à cautionner leur discours réformiste voir xénophobe : ainsi, le PC affirmait soutenir le relogement des familles expulsés, mais pas dans ses communes, sous prétexte qu’elles comptaient déjà trop d’immigrés et de pauvres ! Au final, c’est cette tendance qui créa le DAL (Droit au logement), devenu célèbre, mais dont le fonctionnement est totalement bureaucratique : quelques professionnels de le lutte gèrent tout, les familles mal-logés servent juste à faire du nombre.
De l’autre, il y avait l’orientation lutte de classe, révolutionnaire, qui considérait que les prolétaires mal-logés gagneront leur droit au logement par leur lutte autonome et collective sans devoir compter sur qui que ce soit, en étant clairs dans le discours et les objectifs : la lutte pour le logement est une lutte de classe, une lutte pour l’unité de la classe ouvrière face à la bourgeoisie. Un logement pour tous, à un loyer abordable, sans « préférence nationale ». C’est l’orientation que VP soutenait.
Le Comité des mal-logés occupait des logements vides pour dénoncer la politique délibérée de la bourgeoisie contre le logement ouvrier. Là aussi, l’opposition avec les réformistes était parfois brutale : pour le PCF et les associations qui lui sont proches, hors de question de se livrer à ce genre d’action.

Et les squats ?

L’occupation était vue comme un moyen de lutte, un moyen de mettre le pouvoir sous pression, comme une grève ou une manifestation. Il s’agissait d’obtenir un relogement en bonne et due forme. Le « squat » est un outil, mais pas une fin en soi. C’est ce qui nous différencie de certains anarchistes, pour qui la lutte pour le logement passe par la multiplication des squats, pour reloger les ménages dans le besoin, avec en prime la constitution d’un ilot collectiviste et révolutionnaire dans la société capitaliste. En fait, on constate qu’aucun squat n’a jamais été une solution durable d’hébergement dans des conditions convenables. Soit il s’agit de petites communautés militantes qui, dans les faits, ne concernent pas des prolétaires mal-logés, soit il s’agit de situations complètement subies (comme l’ancien squat de la cité U de Cachan) où les occupants réclament un relogement depuis des années. Ensuite, l’idéologie des squats portent la conception fausse selon laquelle on fera tomber la société capitaliste par son grignotage par petits bouts, en auto-gérant telle entreprise ou tel immeuble. Même si de telles expériences peuvent être intéressantes par les nouveaux rapports sociaux qu’elles laissent entrevoir, ou, dans le cas des squats, par les expériences culturelles qu’elles peuvent parfois permettre, ce ne sont pas des solutions. Car au final, au lieu de poser en premier la question de la destruction de cette société et de la prise du pouvoir par les exploités, elles contournent l’affrontement en laissant penser qu’on peut faire le communisme dans son coin, en ignorant le pouvoir bourgeois.

Alex.

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