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Fétichisme

Partisan N°258 - Eté 2012

Le marxisme, c’est pas sorcier

Origine du mot

Le mot latin « facticius » (artificiel, dérivé du verbe « facere », faire) a donné en français « factice », mais aussi « fétiche », non sans passer, et c’est significatif, par le portugais « feitiço ». Nos pionniers de la colonisation désignaient ainsi, avec le mépris que l’on devine, les objets de culte religieux des Africains. Adorer ce que l’on a fabriqué ! Marx appliquera ce mépris à l’ensemble de la société capitaliste.

Signification

Les mots fétiche et fétichisme apparaissent très tôt chez Marx, dans la Gazette Rhénane de 1842 et dans les Manuscrits de 1844. On les retrouve en bonne place dans le Capital, où un chapitre est consacré au fétichisme de la marchandise. C’est donc une notion centrale chez Marx.
Reprenant et dépassant la critique humaniste de la religion par Feuerbach - « C’est l’homme qui fait la religion, ce n’est pas la religion qui fait l’homme » (1) -, Marx découvre la racine du fétichisme généralisé de la société bourgeoise : la valeur d’usage de la marchandise – l’objet au service de l’homme – s’efface devant sa valeur d’échange. Et dans ce « procès social » du capitalisme, les hommes n’existent plus que comme possesseurs de marchandises, comme rouages de l’économie. Ce renversement (économique et social) et cette « mystification » (idéologique et politique) atteignent leur sommet avec la marchandise « équivalent général » : l’argent. Les capitalistes scrutent les oracles de la Bourse, les Etats font tout pour rassurer les dieux du marché, et les prolétaires rêvent d’un autre monde dans lequel ils seraient millionnaires ! « Pour trouver une analogie à ce phénomène, il faut la chercher dans la région nuageuse du monde religieux » (2).
On vaincra ce fétichisme généralisé comme toute autre illusion religieuse : par une lutte d’idées, mais surtout et radicalement par une transformation totale des rapports entre les hommes, et entre les hommes et la nature.

Les mots qui servent à camoufler

D’abord ignorer l’importance de cette notion, sinon le mot lui-même, dans la lutte contre le capitalisme.
Ensuite, entretenir toutes sortes de fétichismes de remplacement, celui de l’Etat comme « deus ex machina », le communisme comme une solution miraculeuse, le parti comme une secte infaillible, la théorie marxiste-léniniste comme un dogme, voire même le culte de la personnalité du chef.

Pour en savoir plus

- 1) Critique de la philosophie du droit de Hegel
- _ 2) Le Capital, chapitre 1er, section I, IV : Le caractère fétiche de la marchandise et son secret.
Antoine Artous, Marx et le fétichisme, Ed. Syllepse, 2006.
Isabelle Garo, Le fétichisme de la marchandise chez Marx (www.marxau21.fr).

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