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Quelle est la situation au Moyen-Orient ?
Les pays du Moyen-Orient sont des pays dominés par l’impérialisme , des pays dits semi-coloniaux : Ils possèdent formellement l’indépendance politique, mais en réalité ils sont surtout dirigés par les puissances impérialistes. Les interventions étrangères, non seulement militaires mais également politiques et économiques, sont la principale cause des bouleversements, des guerres, des évolutions des sociétés dans cette région du monde. Ce point de vue anti-impérialiste est, évidemment, l’inverse de celui que propagent les impérialistes. Les guerres d’Afghanistan et d’Irak, ne seraient, pour eux, que des conséquences légitimes des attentats du 11 septembre 2001.
Mais les questions qu’ils évitent de poser, sont : quelles sont les causes de ces attentats ? Quelles sont les causes du développement de l’islamisme intégriste dans ces pays ? Quelles sont les causes qui poussent des milliers de jeunes Arabes à rejoindre hier Al-Qaïda, aujourd’hui l’Etat islamique ? A chaque fois, il faudrait en revenir à l’Histoire de cette région, à la manière dont les interventions impérialistes ont encouragé les régimes fascistes, les guerres, la ruine des peuples, le délitement des sociétés, les idéologies ultra-réactionnaires... Évidemment, cela n’est pas conforme à la version servie par les gouvernements français ou étasuniens successifs, ou par les télévisions de Bouygues et les journaux de Dassault.
Ce sont eux qui ont modelé le Moyen-Orient. Sauf que les choses ne finissent jamais par se passer comme ils l’auraient souhaité, car il y a des résistances, il y a tout un tas de conséquences indésirables mais inévitables... Alors que ce sont eux qui ont assaisonné la soupe, ils semblent les premiers étonnés de son mauvais goût !
D’un côté, en Irak et en Afghanistan, malgré leur supériorité militaire, les impérialistes n’ont pas pu installer des régimes vassaux stables. En Syrie ou en Irak, ce sont nos gouvernements qui ont commencé à armer les tyrans et affamer le peuple, entraînant la société irakienne vers le chaos, encourageant au final l’émergence des organisations fascistes du type de l’Etat islamique (EI). Les impérialistes n’ont jamais eu pour objectif de libérer les peuples, d’assurer leur indépendance nationale ou la démocratie ; leur objectif ultime a toujours été de soutenir ou d’installer des gouvernements dociles, quitte à placer au pouvoir de véritables bandits. Les régimes fantoches sont gangrenés par la corruption, le sectarisme, la violence, l’incapacité à répondre aux besoins minimaux de leur peuple.
De l’autre, les peuples de la région n’ont cessé de lutter. Les « Révolutions arabes » étaient un mouvement de révolte généralisé contre les régimes bureaucratiques et compradores pro-impérialistes. Ces révoltes étaient confuses, dispersées, sans orientation politique, mais exprimaient à chaque fois une aspiration à la liberté et au pain. Faute de direction politique révolutionnaire, d’organisation des masses, de ligne politique claire, ces révoltes sont retombées ou ont été écrasées (Egypte), ont été dévoyées (Tunisie), ou alors ont dégénéré en mouvements réactionnaires (Syrie). Mais malgré les échecs, elles ont montré que les peuples de la région ne se laissent pas faire, et qu’ils finissent toujours par s’opposer à la domination impérialiste et à ses régimes vassaux.
Retour sur l’Histoire
Dès les années 1840, les puissances européennes se mêlent de la situation au Moyen-Orient. Prenant prétexte de la situation de la minorité chrétienne Maronite de la région du Mont-Liban (qui donnera son nom au pays) opprimée par l’Empire Ottoman, Français et Britanniques (principalement) envoient un corps expéditionnaire qui débarque à Beyrouth en 1860, et imposent la constitution d’une province chrétienne autonome, dirigé par un gouverneur ottoman chrétien, mais surtout sous le contrôle (officiellement « sous la protection ») des consuls européens. Cela fait donc près de 150 ans que les puissances occidentales interviennent de la même manière et avec les même prétextes politiques dans cette régions du Monde.
Lors de la Première guerre mondiale, les Ottomans s’étaient placés du côté de l’Allemagne et de l’Autriche-Hongrie. Comme eux, ils sont défaits militairement. Suite aux traités de paix, les impérialistes se partagent officiellement la région. Ce qui les intéresse en premier lieu à cette époque, on le sait, c’est de prendre le contrôle des réserves pétrolières. Remplaçant le charbon, le pétrole devient au cours du XXème siècle le combustible principal de l’industrie et des transports. Pour les impérialistes, le contrôle des gisements devient un enjeu capital pour assurer la production capitaliste dans les métropoles.
Pour battre l’Empire Ottoman, les Britanniques avaient soutenu la révolte des régions arabes et kurdes de l’Empire. Ils avaient promis la création d’un État arabe unifié et indépendant. Mais dès avant la fin de la guerre, les Occidentaux avaient redessiné les frontières du Moyen-Orient à leur profit, lors des fameux accords Sykes-Picot. Ils se sont partagé les provinces arabes de l’Empire Ottoman en établissant plusieurs « protectorats » : la Syrie et le Liban passent sous la coupe de la France, l’Irak, la Transjordanie (plus tard Jordanie tout court) et la Palestine sous celle des Britanniques. C’est de cette époque que datent les frontières entre les différents États de la région, qui ne sont donc que des créations récentes de l’impérialisme, allant à l’encontre d’un fort sentiment en faveur de l’unité arabe. Il arriva, à cette même occasion, la même chose aux Kurdes qu’aux Arabes. Le Traité de Sèvres de 1920 prévoyait la création d’un Etat kurde indépendant dans l’est de l’Anatolie ; cette promesse fut également bafouée, et lorsque la nouvelle République turque de Kémal Atatürk affirma son emprise sur le Kurdistan du Nord, les Occidentaux l’acceptèrent. Les Kurdes sont, depuis, écartelés entre 4 pays : Turquie, Irak, Iran, Syrie.
Ces protectorats sont des colonies pures et simples, même si formellement la France et la Grande-Bretagne ne les occupent que conformément à un mandat de la Société des Nations. Tout au long des années 1920 et 1930, des révoltes éclatent dans tous les pays de la région contre la domination étrangère. En 1925-1926, une grande révolte éclate notamment en Syrie, événement peu connu en France.
De leur côté, les kurdes sont eux aussi presque constamment en révolte, notamment contre l’Etat turc, qui colonise la majeure partie du Kurdistan. Le régime kémaliste interdit toute mention de leur spécificité : l’usage de la langue kurde est interdit, jusqu’à l’usage de l’adjectif « kurde » lui-même. Ils ne sont plus considérés que comme des « Turcs des montagnes ». De grandes révoltes kurdes ont lieu dans les années 1920 et 1930 à la fois en Irak, en Turquie, en Iran... à chaque fois écrasées par les régimes en place avec la complicité des impérialistes occidentaux.
Au cours de leur colonisation, les Britanniques mais surtout les Français ont attisé le communautarisme et le sectarisme pour diviser le peuple arabe entre Sunnites, Chrétiens, Chiites, Druzes... Ce sont les Français qui ont introduit au Liban le partage du pouvoir d’État en fonction de l’appartenance religieuse : dans ce pays, seul un chrétien maronite peut-être président de la république, un musulman sunnite premier ministre, etc. Alors qu’en métropole, l’idéologie officielle faisait le promotion de la laïcité, dans les colonies l’impérialisme français utilisait la division religieuse pour asseoir sa domination.
En même temps qu’ils avaient promis un Etat arabe indépendant, les Britanniques, avaient, de l’autre côté, promis au mouvement sioniste un Etat juif en Palestine. Mais cette fois, ils ont tenu leur promesse. Israël est ainsi devenu un point d’appui impérialiste dans la région, d’abord très lié aux Français et aux Britanniques, puis principalement sous la coupe des USA à partir des années 1960. L’Etat turc, membre de l’OTAN, jouera le même rôle et sera également, dans le cadre de la Guerre froide, le second « homme de main » de l’impérialisme nord-américain dans la région. Malgré leurs discours nationalistes, les différents gouvernements turcs seront toujours très liés aux USA. Israël et la Turquie jouent le même rôle de pivot de l’impérialisme, enserrant dans leur mâchoire les peuples Kurdes et Arabes...
D’où vient l’islamisme ?
Ce joug impérialiste engendre un sentiment de révolte immense chez les peuples de la région. En Turquie, au Kurdistan, dans les pays arabes, en Iran, des mouvements anti-impérialistes puissants s’organisent. Ces mouvements combattaient non seulement la domination étrangère, mais étaient également le plus souvent sur une ligne politique démocratique et laïque, avec une forte influence communiste. L’islamisme, lui, est un phénomène politique apparu en masse non seulement du fait du repli, partout dans le monde, des courants révolutionnaires-progressistes, mais également avec le soutien politique actif des gouvernements locaux pour contrer les mouvements de gauche. Ainsi, en Egypte, Anouar el-Sadate soutint le développement des mouvements islamistes en même temps qu’il signa la paix avec Israël ; le régime saoudien, meilleur allié arabe des USA, a envoyé dans tout le monde musulman des milliers de prédicateurs intégristes. L’impérialisme occidental a favorisé ces mouvements de manière consciente, pour s’opposer aux mouvements de libération des peuples, ou à leurs autres ennemis impérialistes, comme l’URSS. L’exemple le plus connu est tout de même Oussama Ben Laden, dont tout le monde sait qu’il a commencé en Afghanistan avec des armes livrés par les Britanniques et les Américains pour faire la guerre aux Soviétiques.
Comme en Amérique Latine et en Afrique Noire, mais de manière moins connue, les institutions impérialistes feront aussi subir dans les années 1970-1980 des « Plans d’ajustement structurels » aux pays de la région. C’est l’époque où l’impérialisme traverse une crise d’accumulation, et sa politique de redressement passe notamment par une ponction encore plus forte des richesses des pays semi-coloniaux. Les prix d’achat des matières premières (sauf des hydrocarbures) sont drastiquement diminués par les multinationales. Les pays dominés, le plus souvent cantonnés par la division internationale du travail imposée par l’impérialisme au rôle de fournisseurs de produits agricoles, de bois ou de minerais s’appauvrissent subitement. Après cela, les institutions internationales comme le Fond monétaire international (FMI) ou la Banque mondiale (BM) imposent aux peuples leurs plans d’ajustement qui exigent, en échange de prêts pour renflouer les caisses vides des États, que ceux-ci démantèlent les services publics, suppriment les aides sociales, abolissent les mesures protectionnistes qui pouvaient protéger la production économique locale de la concurrence inéquitable des produits étrangers. Ces plans se renouvellent régulièrement jusqu’à nos jours ; à chaque fois, les peuples en ressortent un peu plus pauvres, les sociétés locales plus faibles et désunies. Le chômage, notamment celui des jeunes, grimpe : c’est au sein d’une jeunesse déclassée que les mouvements islamistes ont leurs viviers de recrutement.
Enfin, l’invasion du Koweit en 1990 puis les attentats du 11 septembre 2001 ont servi d’excuse à l’impérialisme pour mener de nouvelles offensives massives au Moyen-Orient. Il s’agissait pour lui et ses alliés de resserrer son emprise en remplaçant les régimes des Talibans et de Saddam Hussein par d’autres plus conciliants. Tout au long des années 1990 et 2000, l’impérialisme US a concentré ses efforts sur le Moyen-Orient. Après l’effondrement de l’URSS, les USA sont restés la seule superpuissance, le seul impérialisme capable d’avoir son mot à dire partout dans le monde. Même quand le contrôle des ressources naturelles n’est plus en jeu, une superpuissance comme les USA a l’ambition de dominer les moindres recoins du globe. Mais cela a échoué : depuis près de 15 ans, les USA ont été incapables de stabiliser leur domination sur la région.
Des régimes tous liés à l’impérialisme
Les différentes puissances peuvent être alliées, mais restent tout de même en concurrence dans la région, avec chacun ses gouvernements vassaux privilégiés. Ainsi, l’État égyptien est complètement entre les mains des USA, qui lui fournissent une aide militaire et économique importante. Le régime syrien de la famille El-Assad a été particulièrement soutenu par la France, avant que la guerre civile dans leur pays ne pousse opportunément les gouvernements Sarkozy et Hollande à changer de politique. Souvenons-nous de M. et Mme El-Assad reçus pour le thé à l’Elysée par le couple Sarkozy, dont les photos avaient été complaisamment diffusées via Paris Match. A l’époque, la démocratie en Syrie n’était pas une très grosse préoccupation de la diplomatie française. Ou encore de l’opposition de Chirac à la guerre en Irak en 2003 : pas par pacifisme (sous sa présidence la France est intervenue en Côte d’Ivoire), mais parce que le régime de Saddam Hussein avait des alliés dans les grandes entreprises pétrolières et parmi les hauts fonctionnaires français.
Outre Israël, qui est un cas à part, on distingue donc dans la région des régimes ouvertement réactionnaires et alignés sur les impérialistes, notamment US : c’est le cas des monarchies ou de l’Egypte. Dans les pays du Golfe ou en Jordanie, les classes dominantes sont issues des anciennes classes féodales dominantes avant la colonisation, qui ont fini par se placer au service de l’impérialisme. Le féodalisme a encore une influence très forte dans toute la région. Non pas parce que les rapports de production féodaux y seraient encore dominants, mais parce que les régimes actuels tirent leur pouvoir de cet héritage et que l’idéologie féodale a encore une influence déterminante dans la société. Le clergé, les chefs de clans (chez les Kurdes) ou de tribus (chez les Arabes sunnites) ont une importance politique forte.
Mais d’autres régimes ont des postures politiques qui se veulent opposés à l’impérialisme ou progressistes. Il s’agit principalement des régimes issus des mouvements nationalistes arabes. Ces mouvements nationalistes arabes, principalement nassériens et baasistes, sont nés comme mouvement de la petite-bourgeoisie et de la bourgeoisie nationale arabe en opposition à l’impérialisme et au féodalisme qui entravaient son développement. Ces mouvements portaient un discours moderniste et démocratique : laïcité, promotion de la place de la femme dans la société... Souvent, même, ils se prétendaient « socialistes », c’est à dire que leur programme économique contenait également des mesures progressistes. Mais, outre leur opposition à l’impérialisme, ces mouvements se sont dès le début opposés également au communisme, qui dans certains pays arabes avait une grande influence parmi les ouvriers et les paysans, comme en Syrie et en Irak. Même si opposés à la prédominance de la religion dans la société, ils combattaient l’athéisme et le matérialisme dialectique. Ils s’opposaient aux mesures économiques trop radicalement en faveur des masses, et prétendaient rejeter à la fois le Capitalisme et le Marxisme. D’ailleurs, arrivés au pouvoir, tous, que ce soient Nasser, El-Assad ou Saddam Hussein, ont réprimés violemment les organisations communistes, n’acceptant le maintien légal que de partis soumis.
Souvent issus de l’armée ou de l’administration, ils ont utilisé des méthodes de direction bureaucratiques, brutales et inefficaces, ignorant la démocratie et la ligne de masse. Ces conceptions découlaient de leur idéologie petite-bourgeoise et bourgeoise. Ces régimes ont pu mener quelques réformes progressistes : partage des terres des grands propriétaires, nationalisation des grandes industries. Mais, globalement incapables d’appliquer leur programme, les couches dirigeantes se sont transformées en bourgeoisie bureaucratique et n’ont pu finalement que se rallier à l’impérialisme, seul capable d’assurer leur pouvoir, à défaut d’avoir mérité le soutien des masses. Ces bourgeoisies bureaucratiques tentent cependant de garder un certain degré d’indépendance en cherchant l’appui d’une puissance impérialiste en particulier face aux autres. C’est ainsi que la Syrie a toujours été un allié de l’URSS puis de la Russie pour avoir plus de poids face à Israël, qui lui est le bras armé des USA.
La domination d’une bourgeoisie bureaucratique
La bourgeoisie bureaucratique est, dans les pays dominés par l’impérialisme, la classe sociale le plus souvent à la tête des Etats. Elle tire la plus-value qu’elle consomme de sa main-mise sur l’appareil d’Etat (entreprises nationalisées, impôt, racket et aides étrangères) et des miettes (parfois assez grosses) que lui cède l’impérialisme en échange de son rôle de gestion de l’Etat et de ses intérêts sur place. Cette bourgeoisie bureaucratique englobe notamment la haute-bourgeoisie d’Etat et la bourgeoisie compradore.
La bourgeoisie dite « nationale », c’est-à-dire celle qui jouerait le rôle premier d’une bourgeoisie (investir du capital dans la production) est faible. En dominant l’économie, l’impérialisme laisse peu de place au développement d’un capitalisme local, empêche les bourgeoisies nationales de se développer. Les multinationales européennes ou nord-américaines veulent empocher seules le bénéfice de la plus-value et des ressources naturelles. Mais pour défendre leurs intérêts sur place, elles ont quand même besoin d’avoir une classe sociale prête à diriger les Etats : c’est le rôle de la bourgeoisie bureaucratique.
Même des régimes qui ont maintenu jusqu’au bout un discours pseudo-anti-impérialiste et pseudo-progressiste, comme Kadhafi en Libye ou le régime baasiste syrien, n’en étaient pas moins des collaborateurs de l’impérialisme comme les autres. En 1976, l’armée syrienne intervient au Liban pour soutenir les milices chrétiennes fascistes pro-occidentales et attaquer l’OLP (Organisation de Libération de la Palestine) avec le soutien de la France et la complicité d’Israël. En 1991, contre une très grosse liasse de dollars, elle a participé à l’invasion de l’Irak aux côtés des Américains. A l’intérieur du pays, le régime el-Assad a toujours mené une politique de terreur fasciste en réponse aux revendications des masses.
Le régime islamiste iranien s’est lui aussi constitué en tant que réaction contre-révolutionnaire. Lorsque les peuples d’Iran ont renversé en 1979 le régime pro-américain du Shah (empereur) d’Iran, les organisations de gauche étaient à l’avant-garde du mouvement. Le futur fondateur du régime islamiste, L’ayathollah Khomeiny, était réfugié en France : c’est le gouvernement français de l’époque qui lui a permis de rentrer rapidement dans son pays pour y prendre la tête du mouvement islamiste qui, finalement, a pris le pouvoir et fait assassiner des dizaines de milliers de révolutionnaires. Le régime s’oppose violemment à l’impérialisme US mais a été très lié aux impérialismes français et allemands jusqu’aux sanctions que tous lui ont imposé pour avoir voulu développer un programme nucléaire. Pour les Communistes, pas question de faire alliance avec n’importe qui au prétexte de combattre l’ennemi principal. Il est impossible de soutenir un régime fasciste tel que celui de la République islamique d’Iran, quelques soient ses contradictions avec l’impérialisme. Car son rôle historique, c’est celui d’un régime contre-révolutionnaire, qui s’oppose à l’impérialisme non pas sur des bases démocratiques telles que l’autodétermination des peuples, mais uniquement pour servir ses visées expansionnistes dans la région.
La situation est difficile, mais l’espoir doit renaître
Une règle immuable s’impose donc : les interventions impérialistes dans les pays semi-coloniaux finissent toujours, à plus ou moins long terme, par aggraver la situation des peuples concernés. Exemple de l’Afghanistan, de la Libye, et de l’Irak bien sûr. La situation après la Première Guerre du Golfe était pire qu’avant, et la situation après la Seconde Guerre pire qu’après la Première. L’intervention étrangère peut offrir un court répit au peuple, lui offrir une impression temporaire et illusoire de liberté retrouvée, mais ça ne dure pas.
Les peuples ne peuvent compter que sur eux-mêmes. Ce n’est pas une position anti-impérialiste dogmatique, c’est juste une leçon de l’Histoire.
Nous soutenons le concept maoïste de « Révolution ininterrompue par étape ». C’est l’idée que, dans des pays comme ceux du Moyen-Orient, avant la lutte pour le socialisme et la dictature du prolétariat, la première étape de la révolution doit être Nationale, Démocratique et Populaire : c’est la RNDP. « Nationale », car la tâche principale des révolutionnaires est de libérer leur pays de l’impérialisme, le père de tous les maux, en confisquant les intérêts économiques impérialistes, en chassant les troupes US, françaises ou britanniques. « Démocratique », car la lutte contre l’impérialisme va de pair avec la lutte contre ses agents locaux, notamment la bourgeoisie bureaucratique, par le renversement des régimes pour instaurer des républiques démocratiques, laïques, garantissant les droits individuels et collectifs élémentaires, ceux des minorités, des femmes ; en assurant les droit des petits paysans. « Populaire », car cette lutte doit mobiliser largement la population, qui a en grande majorité intérêt à cette RNDP bien au delà du seul prolétariat, en réunissant les paysans, les couches moyennes de la société et même une partie de la bourgeoisie nationale qui a intérêt à la démocratie et à l’indépendance. Nous nous distinguons donc des trotskistes pour qui, dans tous les pays, l’objectif immédiat est déjà celui de la dictature du prolétariat et de la marche au communisme, même dans ceux où la situation objective impose d’abord de construire un front démocratique et anti-impérialiste large. Voilà pourquoi nous disons « révolution par étapes ».
Mais pour assurer que la RNDP se transforme en révolution socialiste une fois les conditions réunies, que la révolution soit donc « ininterrompue », nous pensons que ce front doit être dès son origine dirigé par le prolétariat en alliance avec les petits paysans, l’autre grande couche sociale opprimée des pays semi-coloniaux. Et pour que le prolétariat puisse diriger, il lui faut un parti communiste. Ainsi, la RNDP n’est pas laissée entre les mains de certains bourgeois ou petits-bourgeois, qui, inévitablement, prendraient la même voie que les nationalistes arabes en Egypte ou en Syrie.
L’heure est grave pour les peuples. Mais l’échec des impérialistes à stabiliser la région malgré leurs interventions successives, notamment ces derniers mois, leur incapacité et celles de leurs alliés à reprendre l’avantage sur l’Etat islamique, montrent qu’ils sont plus faibles qu’ils ne le laissent croire. En ré-envahissant massivement l’Irak, l’armée américaine battrait sans aucun doute militairement l’EI en quelques semaines ou en quelques mois. Mais si ils ne le font pas, c’est parce qu’ils savent qu’ils n’ont aucune solution politique viable à disposition pour stabiliser la situation ensuite. Faute de cela, ils sont coincés : ils ne peuvent aller plus loin, car à l’heure actuelle cela signifierait se réengager dans une guerre longue et coûteuse sans perspective d’en sortir. Leur tentative de créer un Etat client solide et fidèle après 2003 s’est effondrée : aujourd’hui ils n’ont pas d’autre solution. Au final, les impérialistes sont des « tigres de papier » toujours plus faibles qu’ils n’en ont l’air, avec des points faibles et des limites. Les peuples doivent en prendre conscience : leur lutte sera difficile, mais l’espoir existe.
La photo illustrant l’article utilise deux symboles. La chaussure brandie est en référence à ce journaliste irakien qui jeta sa chaussure à la tête de Bush. Le V de la main symbolise la victoire. Deux symboles montrant la résistance des peuples du Moyen-Orient contre l’impérialisme !