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Totalitarisme, un moyen de ne pas trop réfléchir

Le mot totalitarisme a tout d’abord été accolé aux fascistes italiens. Les fascistes assumèrent en expliquant qu’ils veulent un Etat totalitaire. L’idée de totalitarisme était en germe depuis longtemps, dans le travail de masse imposé aux colonisés, dans la notion d’« espace vital », dans l’anti-sémitisme.
Les fascistes italien et allemand prennent le pouvoir le plus légalement, par les élections. Ils sont « anti-individualistes, anti-libéraux, anti-marxistes, anti-bolchéviques, les fascistes mobilisent autour de leurs exécrations plus qu’autour de leurs rêves. » Les nazis veulent éliminer les « sous-hommes », surtout à l’Est, les Juifs, les Tziganes. Ils ne veulent pas bouleverser la société, et les classes les plus aisées sont sur-représentées chez leurs dirigeants. Le nazisme et le fascisme sont deux étatismes, l’appareil d’Etat et du parti finissent toujours par fusionner. Les deux fascismes « considèrent qu’ils n’ont de place ni dans l’ancien monde des castes installées ni dans son contraire, tel que l’incarne la tradition marxiste et ouvrière. Le double refus est déséquilibré : s’ils n’aiment pas les libéraux, c’est d’abord parce que ces derniers manquent d’agressivité face à la gauche. »

Le socialisme, un totalitarisme ?

Pour Martelli, Lénine avait été un des premiers à avoir compris le basculement vers une nouvelle époque. Comme la révolution mondiale ne vient pas, Staline propose dès 1925 « en même temps le principe de « la construction du socialisme dans un seul pays », la relance volontaire de l’industrialisation et la reprise de lourdes ponctions sur la paysannerie, que le trotskiste Evgueni Preobrajenski avait en vain suggéré trois ans plus tôt (« l’accumulation originelle socialiste »). C’est la montée d’un pouvoir cumulant la direction du parti et celle de l’État. On va, au printemps 1935, jusqu’au mot- d’ordre officiel « Les cadres décident de tout. ». Entre « le printemps 1934 et le début de 1939 s’amorce la stratégie communiste de fronts populaires antifascistes et s’enclenche la guerre d’Espagne. ». Quand on parle du « marché et la démocratie, le bolchevisme postule que le moment est venu de se débarrasser en bloc du premier ; le fascisme considèrent que le second a fait son temps. » Il y a des similitudes, peut-être, mais pas d’égalité de contraires.

Et le capitalisme libéral ?

Le capitalisme a engendré les crimes du colonialisme, les deux guerres mondiales, d’innombrables guerres et famines dans le monde. « La pensée totalitariste, au fond, veut dédouaner le parti pris libéral des errements de l’histoire contemporaine. Elle aurait raison, à la limite, si le libéralisme était autre chose qu’un mythe. Or, l’Europe d’avant 1914 ne connaît véritablement, au-delà des grandes proclamations, que la démocratie conservatrice et l’impérialisme - qu’il soit commerçant ou guerrier. La première totalisation de l’ère moderne ne vient pas des critiques de la matrice libérale, mais de la mondialisation qui s’installe à la charnière de deux siècles ». La théorie du totalitarisme n’a rien de matérialiste, elle ne sert qu’à dire que le monde ne peut pas changer, que tout rêve de régulation ne peut conduire qu’à une dictature sanguinaire. En France la théorie du totalitarisme a été promue par les intellectuels autour du PS, puis en 1997 paraît Le livre noir du communisme : « Vouloir transformer le monde, c’est mettre le doigt dans l’engrenage totalitaire ». Bien sûr cette propagande nie ou minimise les crimes du colonialisme et du capitalisme. Le capitalisme prétendait être la fin de l’histoire alors qu’il n’est qu’un moment déjà dépassé. Le nouveau monde est entre nos mains. Le livre de Martelli ouvre des pistes.
Sébastien

 

Roger Martelli : Pour en finir avec le totalitarisme, chez Laville brûle, 10 euros.

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