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L’apparition d’un syndicalisme combatif à l’usine

Partisan N°237 - Avril 2010


Partisan : Quoi de nouveau avec les dernières élections professionnelles en janvier ?

On était inquiets. Le patron avait mené l’offensive avec la création d’une section CFDT. Non seulement cette création s’additionnait aux autres syndicats existants (FO, CFTC et nous la CGT), mais en plus ça dispersait les voix dans une entreprise de taille moyenne. On s’est donc retrouvés avec 5 syndicats (avec le lancement de SUD) dans le premier collège. La participation électorale a été très forte, et au dépouillement, surprise, c’est la disparition de 3 syndicats, FO, CFTC et SUD.
La CGT maintient ses forces avec 65% des votants (une légère baisse, nous avions 73% en 2008), et la CFDT 30%. Nous perdons un mandat au 2ème collège (techniciens et agents de maîtrise). Mais nous sommes largement majoritaires partout aux DP, au CE et au CHSCT.


P. : Est-ce que cela veut dire que votre combativité ne paie pas ?

Pas vraiment. Nous nous sommes créés fin 2005,, et les premières élections ont eu lieu en janvier 2006. A la production nous sommes majoritairement des jeunes, et c’est en nous appuyant sur l’expérience de quelques anciens que nous avons débuté. Notre premier tract a été de dire « bonjour » dans toutes les langues des travailleurs de l’usine. Dès le début, on est majoritaires à 65%. Sans expérience, on a quantité de problèmes, mais on les résout ; et en plus le patron réprime et sanctionne et là aussi, on s’en sort bien. Le nombre de nos adhérents augmente.
Début 2007, l’ambiance est à la grève. Les mécontentements sont nombreux. Il y a le comportement de la hiérarchie : commandement dictatorial, on nous maltraite, on nous insulte. Les salaires sont plus bas que chez les donneurs d’ordre (Renault et PSA), et les cadences de plus en plus fortes.
Le 28 février 2007, on part en grève. 30 à 40 % des ouvriers sont présents et actifs. Pendant une semaine on manifeste dans l’usine, puis on va défiler sur les lignes de production de PSA --- la CGT PSA nous y encourageait… C’est un plein succès : forte augmentation de salaires (130 €), plus divers autres acquis --- la reprise est votée en assemblée générale.

P. : Quelle est l’ambiance après la grève ?

L’ambiance est très bonne : on est tous frères et tous solidaires. La hiérarchie l’a bien compris et change de style de commandement. D’un autre côté, notre grève, les formes de mobilisation et les débats larges entre nous ont renforcé la section syndicale. On syndique plus de 40% des ouvriers. Et aux élections de janvier 2008, la section CGT ramasse 73% au CE et 75% au DP. La lutte paie, c’est une évidence, et surtout elle renforce la cohésion et la confiance entre travailleurs. Cette année, nous imposons, pour le travail de nuit, de passer de 6 à 4 nuits consécutives ; le développement d’une mutuelle et des augmentations pour tous. Si bien qu’actuellement, nous sommes au-dessus des salaires de PSA. Lorsque la crise survient et qu’on nous impose le chômage technique, nous imposerons d’être payés à 100%.
En 2009, pendant la négociation annuelle, nous menons une nouvelle lutte victorieuse : augmentation des salaires sous diverses formes (soit plus ou moins 40€ par mois).
Bien sûr, la direction ne reste pas les bras croisés et renforce la réaction. Elle suscite la création de la CFDT (des lèche-bottes en général). Et on arrive aux dernières élections, dont je parlais au début.


P. : Quelles relations vous avez avec l’Union Locale, avec la Fédé et la Confédé ?

Avec l’UL, c’est très bien. Elle nous aide en tout ; elle a été dès le départ un pilier essentiel pour nous qui étions des jeunes. Un ancien de PSA nous a vraiment donné conseils et coups de main. La Fédé a trouvé « intéressant » notre travail vis-à-vis des jeunes, c’est tout. On a montré que les jeunes n’étaient pas aussi indifférents à leur condition. Il faut savoir les intéresser, pratiquer la discussion et la démocratie. Lors de la préparation des listes pour les élections, on milite pour qu’il y ait le plus de monde et une rotation des responsabilités syndicales. On veut que de nombreux travailleurs deviennent délégués et se forment ainsi. C’est une garantie pour nous de dynamisme, de confiance et d’avenir. Quant à la Confédération, elle peut être utile pour la formation, mais on voit bien que ce sont des mous, ils ne veulent pas d’un syndicalisme de combat.
Une dernière chose. Notre boîte est isolée dans un groupe international puissant. Si l’on veut faire reculer le groupe, il faut que nous créions des liens avec les autres boîtes au niveau national comme international. C’est dans ce sens que nous allons aujourd’hui, c’est pourquoi aussi nous avons participé au Conseil international des travailleurs de l’automobile (CITA).
L’avenir est de ce côté-là !

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