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Travailler Tous, moins, autrement

Pour éclairer la lecture de l’article

Nous reproduisons ci-dessous un article de notre ancienne revue La Cause du Communisme N°5, qui date de février 1982, presque 40 ans, l’âge de VP.
Il faut resituer ce texte dans l’époque. 1982, c’est à la fois le développement de la crise capitaliste dans tous les domaines et, par voie de conséquence quelque part, l’arrivée des réformistes PS-PC au gouvernement en mai 1981. Car c’est en période de crise qu’on a besoin d’eux pour museler la colère sociale.

Dès le milieu des années 70, dans le textile, le BTP, la sidérurgie, le capitalisme commence à restructurer brutalement, en conséquence de la crise de compétitivité et de concurrence, après les années fastes de la reconstruction et de l’expansion de l’après-guerre. Les entreprises ferment, le chômage explose (3,4% en 1974, 8,3% en 1982) avec tous les risques d’explosion sociale comme dans la sidérurgie en 1979.

La bourgeoisie est inquiète, non seulement pour ses profits et sa compétitivité dans la guerre économique qui commence à se mondialiser, mais aussi pour la paix sociale, indispensable justement pour restructurer.

Alors elle réfléchit, et la réduction du temps de travail apparaît sur le devant de la scène. En avril 1980 (donc encore sous Giscard) un rapport – dit rapport Giraudet – paraît qui recommande à la fois l’annualisation du temps de travail (la fameuse flexibilité envisagée dès 1978) et sa réduction, avec en perspective la limitation de la hausse du chômage à un seuil « raisonnable ».

Quand les réformistes arrivent au gouvernement en mai 1981, ils attrapent la balle au bond et c’est le passage de 40 à 39h par ordonnance en décembre 1981, mais nombreuses contreparties à la clé, en matière de précarité, de flexibilité et de pertes d’avantages acquis. Le tableau sera complété par la loi Aubry sur les 35h de 1998, le patronat lui-même reconnaîtra que les contreparties auront permis de récupérer la productivité en à peine 18 mois, et de gagner encore plus par la suite.

Voilà le contexte.

Dès la création de Pour le Parti en 1976, puis de l’OCML Voie Prolétarienne en 1979, la priorité que nous donnions au travail ouvrier nous a rendu attentifs à cette question du temps de travail. Immédiatement nous avons compris tous les enjeux des propositions bourgeoises (réformistes ou non) et nous nous y sommes opposés. En mai 1978, un article de notre journal Pour le Parti alertait sur les enjeux de la lutte pour la diminution du temps de travail et la revendication des 35h portée par les réformistes déjà à l’époque. Durant l’été 1980, le même journal analysait le rapport Giraudet comme « la réduction du temps de travail à la carte pour la bourgeoisie ». C’était le début d’un travail systématique de l’organisation sur la question, entre fin 1980 et 1982, qui débouchera sur une campagne politique organisée.

L’article de la revue que nous rééditons ci-dessous est la théorisation à la fois de cette expérience directe vécue sur le terrain, et du retour aux fondamentaux du marxisme qu’est la lecture du Capital de Karl Marx. Il paraît début 1982, et ce n’est bien sûr par un hasard dans le contexte que nous avons décrit.

C’est un des textes « fondateurs » de VP au sens où il va marquer profondément notre compréhension de ce qu’est la nature véritable du capitalisme. A savoir que ce que cherche le capital, ce n’est pas le profit en tant que tel, mais la rentabilité la plus élevée, le taux de profit. Et que donc la question de l’intensité du travail, de la productivité et de tous les maux associés (travail posté, précarité, pénibilité) sont au cœur de l’exploitation. Que la question du temps de travail et du temps libre sont au cœur du capitalisme, de la transformation socialiste et de la prise du pouvoir.

Ce texte n’est pas sans défauts, on le verra plus loin. En particulier il n’envisage le combat pour le temps libre que comme diminution brute du temps de travail hebdomadaire, et cela a fait discuter dans notre organisation à l’époque : la question de l’intensité du travail est peu abordée. Mais cela reste une critique secondaire qui ne remet pas en cause l’ampleur même du travail théorique ainsi réalisé.

Voilà pour comprendre un peu le sens de cette réédition. Nous avons été les premiers (même si nous ne sommes plus les seuls aujourd’hui) à avancer le mot d’ordre « Travailler tous, moins et autrement », en lui donnant un sens bien précis dans le combat anticapitaliste, pour la libération du travailleur exploité, pour la prise du pouvoir. Il reste complètement d’actualité, et un des socles de notre combat ouvrier.


L’article de la Cause du Communisme N°5 : http://ocml-vp.org/article2053.html

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