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Les sans-papiers et la circulaire zéro !

Partisan N°234 - Janvier 2010

La bourgeoisie et la CGT

Après la vague de régularisation de 2008, les régularisations avaient été bloquées. L’initiative prise par la CGT en octobre a effectivement relancé un mouvement auquel le gouvernement devait faire face. Le mouvement a pris une ampleur sur la région parisienne, ce qui témoigne, bien plus que de la volonté de la CGT, du raz-le-bol des travailleurs.
En posant le problème en termes d’harmonisation entre préfectures, la direction de la CGT a déroulé le tapis rouge sous les pieds du gouvernement, qui a pu faire traîner les négociations. Dans le même temps, il s’employait à disperser les occupations par des évacuations auxquelles les travailleurs ne pouvaient pas s’opposer manu militari, sans que la CGT ni ne les freine par des procédures de recours, ni ne propose de piquet devant les agences concernées.
La fermeté de la bourgeoisie, de son gouvernement, répond à des nécessités politiques et idéologiques d’autant plus fortes qu’elle est déstabilisée et discréditée par la crise. Besson, dans le dossier de presse et dans sa conférence, insiste sur les « dangers » que fait courir l’immigration au « pacte républicain » et au « pacte social ».
Dans sa campagne contre une « régularisation large », le gouvernement active la contradiction entre les immigrés en règle, dont 25% sont au chômage, et les sans-papiers qui les « concurrencent ». Les branches économiques concernées, qui offrent des emplois peu payés et durs, emploient presque exclusivement des immigrés.
Dans le dossier de presse de Besson, il est annoncé un projet de loi visant à rendre impossible l’emploi de travailleurs entrés illégalement en France, par des sanctions frappant les patrons. Cette loi viserait surtout à dissuader un employeur de demander la régularisation d’un sans-papiers qu’il emploierait.
Il y a toujours eu une contradiction entre les intérêts politique et idéologique de la bourgeoisie (la recherche du consensus national) et les intérêts économiques de certains secteurs (ici, patronat des BTP, nettoyage, restauration, confection). Les premiers poussant au contrôle de l’immigration, les seconds étant pour plus de liberté de circulation. Dans le mouvement ouvrier sous direction réformiste, c’est une vieille tradition que d’être pour le contrôle de l’immigration, voire la fermeture des frontières.

La CGT et les travailleurs

La direction de la CGT a manoeuvré non pour la défense des travailleurs, mais pour des enjeux d’organisation : faire oublier l’évacuation de la Bourse du Travail, et surtout son absence des conflits sociaux et son incapacité à s’imposer face au gouvernement comme force de proposition et d’encadrement des mouvements sociaux, force sans laquelle est ne saurait rester un interlocuteur crédible.
Toutefois, sa volonté d’instrumentaliser le mouvement des sans-papiers ne va pas sans risque. Elle a effectivement réussi à se maintenir à la tête du mouvement. Mais elle a aussi mis en mouvement une force qui peut lui poser des problèmes, car les travailleurs veulent plus qu’une harmonisation, ils veulent leur régularisation.
Plus le refus de la circulaire par les travailleurs est manifeste, plus la CGT est dans l’impérieuse nécessité de briser tout embryon d’autonomisation du mouvement. Elle doit donc marginaliser tous ceux qui apparaissent comme des éléments de contestation. La direction CGT faut tout ce qui est en son pouvoir pour éviter que se fasse la jonction entre les divers mouvements de sans-papiers.
Les femmes sans-papiers, peu présentes dans les grèves à leur début, commençaient à s’organiser sur le site de la SAMSIC, dans le 17e arrondissement. Elles étaient 70 environ. L’évacuation du site les a dispersées. Au sein du CSP 75, des femmes sans-papiers ont tenté de s’organiser avec l’appui de soutiens. Violente opposition des délégués...

Les travailleurs et nous

Notre orientation générale reste la dénonciation de l’accord et du consensus sur le fond entre la direction de la CGT et le gouvernement, qui fondent tous les deux les régularisations sur les besoins du marché du travail (les métiers sous tension). La promesse d’embauche en est la traduction concrète. Notre objectif est la régularisation de tous les sans-papiers.
La construction du mouvement sur cette base nous confronte au problème de l’organisation d’une opposition de classe. Dans le contexte politique actuel, il n’y a pas plus de débouché pour le mouvement des sans-papiers que pour les autres luttes de travailleurs. La lutte des sans-papiers n’a pas d’issue en-dehors de son inscription dans un mouvement de toute la classe ouvrière. D’où l’enjeu de la lutte à l’intérieur de la CGT pour des positions de classe.

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