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Palestine : la guerre de l’eau
Partisan N°270 - Décembre 2013
Déclaration des ONG palestiniennes sur le projet sponsorisé par la Banque Mondiale pour le canal Mer Morte – Mer Rouge. Octobre 2013.
Les 22 ONG palestiniennes soussignées appellent l’OLP et l’Autorité palestinienne (AP) à stopper toute forme de coopération avec le projet RSDSP (transfert Mer Morte - Mer Rouge ) et à prendre publiquement une position claire de rejet de ce projet.
Il est devenu parfaitement clair et hors de doute que ce projet constitue une tentative inadmissible de contraindre les Palestiniens à consentir à leur propre dépossession et à compromettre leurs propres droits. Tout manque de position claire de la direction palestinienne sur ce projet scandaleux, toute attitude positive ou ambiguë envers lui, contribue à cette impunité qui a depuis trop longtemps permis à Israël de s’accaparer l’eau palestinienne en déniant les droits des Palestiniens.
Voici 5 raisons précises de rejeter ce projet :
1. Ce projet minimise les droits palestiniens à l’eau et légitime leur dépossession du Jourdain dont Israël contrôle unilatéralement le cours supérieur et empêche les Palestiniens - selon le droit du partage - de bénéficier des eaux du cours inférieur. Ceci est l’unique cause de la disparition de la Mer Morte. Au lieu de soulever le problème de ce vol par Israël, le projet vise à maintenir le statu quo injuste de partage du Jourdain et prétend sauver la Mer Morte par un transport à une vaste échelle de la Mer Rouge.
2. Ce projet vise à remplacer l’accès des Palestiniens à l’eau fraîche et naturelle du Jourdain, accaparée par Israël depuis son cours supérieur, par la vente d’eau de mer dessalée en provenance de la Mer Rouge, à un coût très élevé et en quantité médiocre. Ces ventes elles mêmes sont simplement une « option » de la Banque Mondiale (BM) qui n’envisage d’approvisionner que Jéricho qui se trouve être actuellement la seule ville riche en eau des Territoires occupés. A chaque goutte d’eau achetée, les Palestiniens capitulent sur leurs propres droits et dépossession.
3. Les graves dommages causés à la Réserve Orientale Aquifer – actuellement la seule source qu’ont les Palestiniens pour l’approvisionnement en eau et le développement - ne sont dénoncés ni par les études de faisabilité de la BM, ni par celles des ESA (études et estimations sociales et environnementales). L’ Orientale Aquifer est en train de régresser rapidement, et son eau potable s’écoule à un rythme alarmant, ces deux phénomènes résultant directement du recul de la Mer Morte. Accepter un tel projet signifie fermer les yeux sur la rapide destruction de la seule ressource en eau de la partie orientale des Territoires occupés. A l’inverse de ce qui se passe, Israël devrait être tenu responsable des dommages causés à cette ressource vitale dont dépendent actuellement un million de Palestiniens.
4. Loin de « sauver la Mer Morte », le projet RSDSP va détruire les caractéristiques et l’écosystème de celle-ci. Avec la mise en œuvre du projet, elle sera transformée en réserve pour le dessalement de la Mer Rouge, ce qui, au passage, détruit ce site, patrimoine palestinien et mondial.
5. Les deux organismes de recherche précités, ainsi que toute la conduite du dossier par la BM, manquent de crédibilité et tournent en dérision la prétendue concertation et participation au projet. Au cours de tout ce processus, la BM a fermé les yeux sur les violations israéliennes des droits palestiniens à l’eau. La BM a constamment et délibérément ignoré les intérêts majeurs des Palestiniens depuis le démarrage du projet et pendant les réunions de « consultation », en manquement total à sa propre déontologie et aux engagements du projet lui-même.
Les organisations de la société civile palestinienne réitèrent leur rejet du projet Mer Morte - Mer Rouge, et invitent les Palestiniens de toute sensibilité à exiger que l’OLP et l’AP honorent leurs aspirations à l’auto-détermination et à la justice, en exprimant d’une voix haute, claire, et sans équivoque, le NON à ce projet de spoliation. Ce dernier aurait pour conséquence de nouveaux dommages et la sous-estimation des droits des Palestiniens à l’eau, c’est pourquoi toute coopération à ce projet doit cesser immédiatement. La réparation et la compensation pour les dommages du passé, le respect des droits à l’eau des Palestiniens, trop longtemps négligés, constituent la seule perspective d’avenir.
Signataires : 22 ONG, dont PENGON, Palestinian Environment NGO Network ; Stop the Wall ; PHG, Palestine Hydrology Group ; AAA, The Arab Agronomic Association.
Traduction Partisan.