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8 mai 1945 - 8 mai 1981 : le "changement" contre la révolution

Tract du 8 mai 1981

Le tract d’époque à télécharger en fac-similé


Aujourd’hui, le 8 mai : la CGT va sans doute appeler à commémorer le 8 mai 1945, la capitulation de l’Allemagne nazie. A rendre hommage aux milliers d’ouvriers morts dans la lutte contre le fascisme et l’occupant. Au rassemblement à la stèle, elle va peut-être évoquer la libération et les changements obtenus « quand il y avait des ministres communistes ». Et peut-être évoquer les changements demain si MITTERRAND est élu et s’il y a des ministres communistes…

Hommage aux combattants de la cause ouvrière

Nous saluons ici la mémoire des combattants de la guerre de classe. Beaucoup de ces résistants, français comme immigrés, étaient des vrais révolutionnaires. En luttant contre le fascisme et l’occupation, beaucoup étaient convaincus qu’ils préparaient le renversement du pouvoir bourgeois et l’instauration du socialisme. Ainsi Ch. Debarge mineur communiste, écrivait en 1942 : « Il y aura un soulèvement révolutionnaire au moment de la défaire hitlérienne… le peuple en armes prendra le pouvoir. La classe ouvrière sera gagnée au communisme avant la fin de la guerre ».

1945 : pour quel changement s’étaient battus les ouvriers résistants ?

Tous n’avaient pas une aussi claire conscience du but. Mais tous, ils voulaient :
-  BALAYER LA BOURGEOISIE : en finir avec le pouvoir bourgeois qui avait eu si peur de la force ouvrière lors du Front Populaire. Qui avait installé Pétain et le fascisme avec soulagement. Qui s’était soumise au nazisme allemand comme elle l’aurait fait à n’importe quel impérialisme pourvu qu’il écrase la lutte ouvrière et relance ses profits. Mais balayer aussi la fraction bourgeoise qui avait choisi la carte gaulliste et anglo-américaine. Qui jouait la carte de la démocratie contre l’impérialisme allemand pour mieux défendre l’impérialisme français. Ouvriers, communistes, ils savaient n’avoir rien de bon à attendre de ces bourgeois nationalistes. Ils ne voulaient pas que « leur sacrifice quotidien assure le bonheur de ces milliers de gaullistes » (R. Migeot, ouvrier communiste fusillé en Octobre 1943).
-  INSTAURER LE POUVOIR OUVRIER ARMÉ : les ouvriers avaient vu les réformes de 1936 liquidées une par une par la bourgeoisie. Ils avaient vu la démocratie bourgeoise briser le mouvement ouvrier, emprisonner et fusiller les révolutionnaires, instaurer elle-même le fascisme et se vendre à l’impérialisme allemand. Ils ne voulaient pas plus de réformes, ou plus de démocratie bourgeoise. Ils luttaient pour tordre le cou aux exploiteurs, et leur prendre tout le pouvoir.
Ils ont mené la lutte armée. En 1944-1945 ils avaient les FTP, les milices : la force du prolétariat en armes. Ils avaient les Comités de Libération, les moyens d’épurer l’Etat fasciste. Ils occupaient des milliers d’usines (Renault, Berliet, Gnome et Rhône etc.) et expulsaient patrons et cadres, fascistes et collabos.

D’un côté un pouvoir bourgeois affaibli, largement isolé. De l’autre la classe ouvrière armée dirigeant le peuple. Le choix, c’était : restaurer le pouvoir bourgeois ou renforcer la force ouvrière. Le PCF et la CGT ont choisi le pouvoir bourgeois au nom du changement, de la démocratie, de l’union nationale.

1945 : tant d’espoirs et de sacrifices trahis

A quoi ont servi les ministres communistes ? Le 8 mai 1945 nous rappelle aussi le rôle des réformistes au pouvoir.

-  A DÉSARMER LA CLASSE OUVRIÈRE : le PCF a tout fait pour liquider l’indépendance militaire du prolétariat : « Un seul Etat, une seule armée, une seule police » (Comité Central du PCF). C’est-à-dire à désarmer les FTP, dissoudre les milices : « Tus les groupes armés irréguliers ne doivent pas être maintenus plus longtemps » (Thorez). Tout fait aussi pour renforcer l’armée de al bourgeoisie : intégration des FTP dans les troupes gaullistes, développement de l’armée impérialiste et colonialiste : « nous devons faire des canons, des tanks, des avions pour l’armée française » (Thorez).
-  A RESTAURER LA DÉMOCRATIE BOURGEOISE : 1944-1945, c’est pour le PCF et la CGT le « renouveau démocratique » (Thorez) : installer De Gaulle, restaurer l’Etat bourgeois. Après avoir tout fait pour que la résistance soit uniquement dirigée « contre les Boches », après avoir renforcé le nationalisme, le PCF et autres liquident les Comités de Libération, limitent l’épuration de l’Etat fasciste, consolident la dictature démocratique bourgeoise : « le parti devra rester dans le cadre du système parlementaire qu’il a contribué à rétablir » (Thorez). Et pour mieux tromper la classe ouvrière, le PCF lui assure qu’ainsi elle « marche au socialisme par l’extension illimitée de la démocratie ».
-  A RESTAURER LE CAPITALISME FRANÇAIS : grâce au PCF et à la CGT, les usines (Berliet etc.) sont rendues aux patrons. Sauf quelques-unes qui sont nationalisées pour le plus grand profit de l’économie capitaliste (et des actionnaires grassement indemnisés, ceux de EdF qui créeront la CGE avec cet argent…). Le PCF et la CGT fixent aux ouvriers une seule tâche : « Travailler, travailler, et encore travailler » (J. Duclos). Ils sont en première ligne pour empêcher toute grève « arme des trusts (Thorez). Eux seuls pouvaient étouffer la lutte ouvrière quand on bossait 53h par semaine, quand les prix augmentaient de 50% et les salaires de 18% : « Un type de droite, on l’aurait envoyé balader, mais un communiste… » raconte L. Lengrand, ancien mineur.
-  A RESTAURER LE COLONIALISME FRANÇAIS : le 8 mai 1945, insurrection anti-colonialiste en Algérie. Le gouvernement, et ses ministres communistes, réprime sauvagement : de 30 000 à 45 000 morts. Les ministres communistes soutiennent, le PCF appelle à la répression : « Il faut tout de suite châtier impitoyablement et rapidement les organisateurs de la révolte » (Comité Central).
Pareil au Vietnam en 1945-46, à Madagascar en 47 : chaque fois le PCF a le souci « de ne pas laisser compromettre les intérêts français » (L’Humanité)

Voilà ce qu’évoque aussi le 8 mai 1945 : la trahison par le PCF et la CGT des aspirations révolutionnaires de la lutte ouvrière.

1981 : quel changement pour la classe ouvrière ?

36 ans après, les mêmes réformistes nous promettent toujours le « vrai changement ».
La classe ouvrière a fait l’expérience des réformistes au pouvoir : en 1936, en 1944-47 et encore après pour le PS. Elle a fait l’expérience de leur « changement » : 1936, 1945, 1968… Quand la classe ouvrière est fort et le pouvoir capitaliste ébranlé, les réformistes monnayent le désarmement des ouvriers, leur soumission à l’ordre bourgeois contre des réformes vite vidées de leur contenu.

-  QUE RESTE-T-IL DU « CHANGEMENT » ? Quand la semaine de 40h a-t-elle été appliquée ? Que sont devenues les augmentations de salaires de 68 ? Qui dira que les ouvriers de Renault ne sont pas exploités parce que l’entreprise est nationalisée ? Combien de licenciements ont pu être empêchés par les CE, cette « conquête » de 1945 ? Qui dira que les peuples des colonies n’ont pas dû arracher leur indépendance CONTRE les gouvernements bourgeois auxquels participaient communistes et socialistes ?
-  QUE SERA LE CHANGEMENT SAUCE PC-PS ? Qui peut penser que Mitterrand au pouvoir, avec ou sans ministres communistes, ce sera la classe ouvrière au pouvoir ? Ils vont nous lancer dans la « lutte contre la crise » : à coups de « lutte contre le déclin », de « produisons français », ils vont nous imposer une nouvelle « bataille de la production ». L’objectif u PC et du PS est au fond le même : remettre le capitalisme français en selle et pour cela faire travailler les ouvriers toujours plus dur. La hiérarchie, les petits chefs seront là comme avant pour nous faire bosser. Les ingénieurs, les cadres seront là pour penser, et nous pour exécuter, pour obéir passivement. Nous travaillerons « pour la France », c’est-à-dire pour les bourgeois, pas pour nous. Avec leur « changement », notre travail ne servira toujours que le profit, nos aspirations au changement ne serviront que le capitalisme. Et les améliorations qu’ils nous cèderont au départ pour nous endormir, elles seront annulées comme les autres…

CE N’EST PAS CE CHANGEMENT LÀ QUI RÉPONDRA À NOS EXIGENCES, LE CHANGEMENT QUE NOUS VOULONS ? C’EST CELUI DES RÉSISTANTS QUE NOUS HONORONS AUJOURD’HUI : LE POUVOIR OUVRIER RÉVOLUTIONNAIRE.

Et s’il faut que beaucoup d’ouvriers fassent encore une fois l’expérience des réformistes au pouvoir, faisons-la ensemble. Nous y combattrons pour la révolution ouvrière, contre les réformistes. Nous vous prouverons concrètement que nous avons raison : voilà pourquoi nous voterons Mitterrand avec vous.

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