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À propos de « l’affaire DSK »...

Partisan N°250 - Octobre 2011

Il est frappant de voir ce que cette affaire a fait ressortir chez les gens autour de nous, principalement chez des hommes, mais aussi chez quelques femmes. Il y a eu les « bons mots » de Jean François Kahn ou de Jack Lang, mais aussi tout ces petits commentaires autour de nous, parmi nos collègues, nos amis, nos voisins.

Il y a ceux qui sont gênés, et préfèrent fuir la discussion sur le sujet en enchaînant les bonnes blagues. Ceux qui se sentent visés lorsqu’on attaque DSK – sans qu’on sache pourquoi – et disent avoir peur que maintenant « il suffirait de draguer un peu lourdement pour être accusé de tentative de viol ». Or, ce n’est pas des « dragueurs lourds » dont il est fait le procès. Même si, il y aurait beaucoup à dire sur ce qui, dans notre société, est considéré comme « correct » dans une tentative de séduction. Non, ce qui est en cause, c’est le comportement d’un homme. L’abandon des charges ne signifie pas que DSK est reconnu innocent ; le procureur en charge de l’affaire a seulement renoncé à se lancer dans un procès de crainte que le jury populaire ne soit pas convaincu par la femme de chambre. Le rapport du médecin légiste affirme qu’il y a eu « rapport sexuel précipité » en moins d’une dizaine de minutes ; il reste donc de fortes chances qu’il y ait bien eu viol. Dans le cas contraire, la seule explication est que Dominique Strauss-Kahn, grand bourgeois de son état, se soit offert une relation sexuelle avec une femme de ménage qui serait donc une prostituée occasionnelle.

Pas de viol sans sexisme

Rien de très honorable, donc, pour DSK. Si il n’est pas coupable de viol, il l’est au moins d’avoir considéré le corps d’une femme comme un objet à sa disposition. La différence entre le viol et la prostitution est la même qu’entre l’esclavage et le travail salarié ; la manière change, mais il s’agit à chaque fois de s’approprier le corps d’une personne, considéré comme une marchandise. On a entendu évoquer l’idée que Dominique Strauss-Kahn serait malade, frappé de pulsions sexuelles irrépressibles qui le pousseraient au viol... Mais le viol, ce n’est pas ça. Le viol est avant tout un acte de sadisme, de domination. Le viol, c’est la recherche de la satisfaction sexuelle grâce à la violence. Justifier l’acte de DSK par la maladie, c’est considérer les viols comme des phénomènes inévitables, c’est, d’une certaine façon, en excuser l’auteur. Or, si le viol existe, c’est parce que le sexisme et le patriarcat l’encouragent, parce que certains hommes considèrent qu’ils ont le droit de passer à l’acte, que leur victime le mérite.

La partie émergée de l’iceberg

L’affaire DSK n’est que la partie émergée de l’iceberg du sexisme. On a entendu des témoignages de femmes de chambres dévoilant que les clients hommes leur font souvent des avances sexuelles. On peut penser que les agressions sont nombreuses dans les hôtels, comme ailleurs. On voit bien que le sexisme est partout. La violence, lorsqu’elle n’est pas physique, est psychologique. On accepte des hommes des comportements qu’on n’accepte pas des femmes. Le harcèlement « léger » (blagues douteuses, gestes déplacés) dont sont victimes beaucoup de femmes est largement toléré. Certains craignent que l’abandon de l’accusation de viol ne fasse du tort à la cause des femmes. Mais toutes les femmes ont déjà plus ou moins été victimes du sexisme, et il ne devrait pas il y avoir besoin d’affaire suffisamment médiatiques pour s’en rendre compte et en discuter. Ce n’est pas lorsque DSK sera convaincu de viol que des hommes accéderont d’un coup à la conscience de l’existence du sexisme et des violences faites aux femmes. Un homme peut très bien être répugné par le comportement de DSK, mais en même temps ne pas voir toutes les petites manifestations quotidiennes du sexisme. De toute façon, il ne faut compter sur la bourgeoisie pour régler le problème du sexisme. C’est à nous de l’affronter autour de nous, de remettre à leur place ceux qui n’ont pas un comportement correct ; c’est aux femmes de s’organiser pour ne plus subir ce qu’on leur impose. Nous disons : pas de révolution sans libération des femmes, pas de libération des femmes sans révolution !

Axel