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ColiPoste : Accord handicap,

En fait, cet accord est une fumisterie totale. Par exemple : les nouveaux "process industriels" (!) sont générateurs de maladies professionnelles (très difficile à faire reconnaître) et d’inaptitudes qui conduisent inéluctablement au licenciement pour cause "d’impossibilité de reclassement".
Prenons l’exemple du chargement des semi-remorques. Pour des raisons soi-disant de "développement durable", les semi-remorques sont aujourd’hui chargées "en vrac". Une remorque chargée en vrac transporte la même quantité de colis que deux remorques chargées de colis en mode conteneurisation. Et la direction ose nous parler de développement durable ! En réalité, on sait tous et toutes que la véritable raison, c’est l’économie réalisée en divisant le nombre de camions par deux, voire même par trois !

« Développement durable » contre santé au travail

Les colis sont chargés un par un, manuellement, et le chargement doit être optimisé à fond. La remorque doit être chargée jusqu’en haut, jusqu’à toucher le plafond. Cela implique bien sûr une répétition d’un même geste des milliers de fois par vacation. Au bout de deux heures, on a l’impression d’avoir l’épaule en compote, comme si elle avait enflé considérablement. En fait, ce sont les tendons qui trinquent, la douleur est persistante et au bout de quelques mois, en fonction de la morphologie de l’individu, ça devient dur de se servir normalement de ses bras. De plus, selon une étude des médecins de prévention de La Poste, publiée à l’époque dans la presse d’entreprise, cette activité génère un « coût cardiaque lourd ». Le vrac n’est pas la seule activité qui bousille, il y a aussi le tri manuel des plus de 30 kilos, et d’autres tâches répétitives, facteurs de troubles musculo-squelettiques. Ils sont beaux, nos patrons écolos, ils avancent leur argument bidon, nous disent que moins de camions sur les routes, c’est quand même mieux pour la nature, mais ils n’hésitent pas à nous rendre handicapés et à raccourcir notre temps de vie à ce motif !

 

C’est bien tout le cynisme des exploiteurs qui est mis là en évidence ! Le profit ! Le profit ! Le coût humain, ils s’en foutent. Et pour cause, avec l’armée de réserve de prolétaires constitués par les bataillons de chômeurs prêts à tout (et on peut les comprendre) pour avoir un boulot, et bien, quand un ou une travailleur-euse est cassé-e, on jette et on en prend un neuf ou une neuve !

Médecins complices

Concrètement, voilà comment ça se passe. Suite à l’arrêt de travail du ou de la salarié-e, le médecin de prévention, appointé par La Poste, prononce une inaptitude à la manutention. La Poste suspend le contrat de travail, fait semblant de chercher un reclassement pour l’intéressé-e, évidemment ne trouve pas, et cela se conclut par un licenciement pour impossibilité de reclassement. C’est aussi simple que cela. La responsabilité des médecins est fortement mise en cause : ils prononcent des inaptitudes totales même si elles sont partielles et que les travailleur-euse-s blessé-e-s peuvent être utilisé-e-s à des boulots moins durs. Mais dans ce cas, il n’y a plus de polyvalence possible dans l’exécution des tâches, donc moins de rentabilité. Cela, bien sûr, au mépris de plusieurs articles du Code du Travail prévoyant, dans le cadre de l’inaptitude, des aménagements de poste et autres, dont les patrons se contrefoutent.
De plus, les médecins de prévention ne sont pas habilités à examiner et à se prononcer sur l’état de santé des personnels non fonctionnaires de La Poste (plus de 80% à ColiPoste à ce jour), le conseil d’Etat ayant annulé en 1998 un décret de 1997 qui leur donnait cette compétence, au motif du lien de sujétion liant l’employé à son employeur, en l’occurrence le médecin salarié et La Poste. Cette
dernière n’a cure de cet arrêt et continue d’employer ces médecins complaisants à cette tâche de nettoyage des inaptes. J’ai défendu devant le Conseil de Prud’hommes plusieurs collègues licenciés
pour inaptitude, en me servant de cet arrêt du conseil d’Etat et en mettant en évidence l’inanité des pseudo-recherches de reclassement. A chaque fois les recours ont été gagnés, les deux arguments ont été retenus. Bien sûr, c’est un peu d’argent qui est gagné et une dignité qui est retrouvée pour les camarades, mais c’est bien un emploi qui est définitivement perdu.

Accord de merde

Franchement, cet accord de 2008 sur le handicap, c’est de la merde ; ça permet à La Poste de se couvrir d’une caution tout en continuant à nous bousiller tous les jours.
Les syndicats signataires de cet accord sont complices, ils cogèrent le « pressage de citron » en toute connaissance de cause. Tu me diras, comme ça les bureaucrates ont de quoi s’occuper en allant poser leurs culs dans des commissions de suivi qui ne servent à rien et sèment l’illusion qu’ils se préoccupent vraiment de la santé des travailleur-euse-s ! Quant aux non-signataires, qu’attendent-ils pour faire péter le scandale ? Pourquoi n’entament-ils pas des actions pour dénoncer le rôle des médecins de prévention et l’illicéité du traitement réservé aux inaptes ? Cette passivité mène objectivement à une attitude complice ! C’est comme ne pas s’opposer à un accord qu’on refuse de signer ! Ras-le-bol de tous ces collabos !

 

Encore une fois, nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes. Sur le site où je travaille, une copine est actuellement dans les griffes socialement mortelles de la direction et du médecin de prévention. Je l’accompagne demain en entretien préalable suite à la fameuse « impossibilité de reclassement ». J’y vais armé d’une part de tout un arsenal juridique, Code du Travail, arrêt du Conseil d’Etat et différents rendus de jugement, d’autre part du mandat de mes collègues et camarades qui ont prévenu qu’ils ne laisseraient pas passer et qu’ils n’hésiteront pas à se mobiliser (surtout juste avant la période de Noël) si la copine n’est pas réintégrée sur-le-champ sur des postes qu’elle est parfaitement capable de tenir.

 

Enfin, pour finir, ColiPoste a quand même constaté l’ampleur du massacre et a décidé depuis quelques temps d’affecter sur les postes les plus destructeurs, je te le donne en mille… des intérimaires ! Cela se passe de commentaires. En tous cas, sur notre site, nous sommes décidés à faire cesser cet ignoble scandale et à tout entreprendre pour protéger nos camarades précaires de la malfaisance des rapaces qui ne pensent et raisonnent qu’en termes de profit.

 

Il faut résister collectivement, faire voir que la solidarité est possible, faire voir qu’on est toujours là, prêts pour la riposte à ce système.

 

Un camarade

 

* Coliposte est l’opérateur interne colis du Groupe La Poste. Leader en France et second opérateur en Europe de livraison de colis aux particuliers en 48 h et plus.

 

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