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François Hollande et les Sans-Papiers

« Une lutte implacable contre l’immigration illégale »

Sur le thème des sans-papiers, Sarkozy est à l’offensive. De durcissement en durcissement, ce dernier en a fait un axe de campagne bien avant que celle-ci s’ouvre officiellement. La stigmatisation de la partie immigrée de la classe ouvrière valait comme programme. Cela remplaçait la question de l’emploi et des salaires où il ne pouvait avancer que des propositions démagogiques faisant peu illusion.
Face à ce feu roulant nauséabond, que dit Hollande ? Pendant des mois, il s’est tu, esquivant les questions des journalistes. Le peu qu’il a dit sentait mauvais. On peut lire dans la 50e « proposition » (sur les 60) : « Je conduirai une lutte implacable contre l’immigration illégale… » Sans plus de précision. Peut-être qu’il s’agit de l’augmentation des moyens de Frontex : plus de patrouilles en Méditerranée, plus de refoulements en mer, des pressions plus fortes sur les Etats, des restrictions encore plus grandes pour les visas, etc… Peut-être qu’il s’agit de la lutte contre ceux ayant déjà migré : les sans-papiers en France même.

« Contre les filières »

La « lutte implacable » se fera aussi contre « les filières du travail clandestin ». Là, c’est largement du fantasme. Comme s’il existait une mafia à laquelle le patron pouvait s’adresser. « S’il vous plait, je voudrais deux salariés sans-papiers pour faire la plonge dans mon restaurant… Oui un Noir et un Pakistanais… Non je préfère qu’ils ne parlent pas trop français, et qu’ils soient depuis moins de deux ans en France. Vous comprenez, au-delà, ils commencent à râler, à réclamer le paiement des heures sup… » Un tel Pôle Emploi-bis du travail clandestin n’existe évidemment pas. En fait, l’emploi se fait par connaissances. Untel, avec ou sans papiers, donne l’info à un frère ou un cousin. Les renseignements circulent par familles, par village, par foyer…
Les filières ont concerné la confection. Mais pas du tout le BTP, le nettoyage ou la l’hôtellerie. Il s’agit d’une construction largement enflée pour alimenter le discours anti-migrant de Sarkozy. Mais Hollande emprunte le même chemin boueux.

Une vision positive de l’immigration

La mi-mars a été un moment charnière. Le staff de campagne a enfin accepté de recevoir les organisations de la campagne racket (Syndicat SUD-Solidaires des Impôts, Droits Devant et des collectifs de sans-papiers). RESF, qui a envoyé une adresse à tous les candidats, après plusieurs mois d’attente, a enfin eu une réponse signée de Hollande. Ce dernier a aussi répondu à plusieurs journalistes. On peut résumer ainsi les positions développées :
- 1/ Le candidat Hollande a une vision positive de l’immigration, des militants du soutien aux sans-papiers, de RESF, met en avant la France comme modèle d’intégration, etc…
- 2/ Il reviendra sur les aspects les plus outranciers des dernières mesures. Celles citées datent de la dernière année. Par exemple la taxe pour obtenir l’Aide Médicale d’Etat, l’allongement à 45 jours de la rétention, le report du juge des libertés à 5 jours de rétention… Une loi (encore une) modifiera les dispositions en place.
- 3/ Il n’y aura pas de régularisation globale mais un changement dans la procédure avec des critères qu’il dit « objectifs ».

Expulser sur critères

C’est cette question des critères qui a le plus choqué le rassemblement du 14 mars : une centaine de sans-papiers et de soutiens des syndicats et collectifs de la campagne Racket. « Régularisation de tous les sans-papiers », ont répondu les manifestants et la délégation reçue par les spécialistes de l’équipe de campagne. Parlant du PS, un camarade sans-papier le résumait ainsi : « Ils ne sont pas très différents ».
Nous rajouterons deux choses. Ils ont l’hypocrisie en plus. La lettre de Hollande à RESF affirme vouloir traiter tout migrant avec dignité. Aubry dans sa déclaration pour les primaires parlait de « reconduire de façon humaine les personnes qui n’ont pas vocation à rester sur le territoire ». Il faudra qu’ils nous expliquent comment reconduire de façon humaine quelqu’un qui se débat et ne veut pas monter dans l’avion.
Deuxièmement, ils ont aussi l’opportunisme en plus. Fin 2009, en pleine grève des travailleurs sans-papiers, le PS votait l’engagement de mener une régularisation « large ».
Alors, l’élection du 6 mai prochain sera simplement un changement de contexte, un changement d’adversaire dans la longue lutte que mènent les sans-papiers et tous ceux qui se battent pour l’égalité des droits de tous les travailleurs.

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