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Le rôle des femmes en Namibie
Partisan N°267 - été 2013
par Rukee E Tjingaete / African Women’s Charity Organization
La résistance des femmes au colonialisme en Namibie remonte à 1904, lorsque les femmes Herero ont lancé leur mouvement historique de « grève du sexe » afin de stimuler la lutte des hommes contre l’occupation allemande (Clever & Wallace, 1990). Elles ont alors fait le vœu de ne pas avoir d’enfants jusqu’à la fin de la guerre contre les colons allemands. Leur résistance contre le nouveau régime sud-africain qui avait renversé le régime d’occupation allemand en 1915, a pris une tournure de confrontation plus directe.
C’est le 10 Décembre 1959 que les femmes ont engagé une résistance ouverte à la politique violente de confiscation des terres à Windhock par l’Etat sud-africain. Ce jour-là, les forces de police sud-africaine ont ouvert le feu et tué 12 personnes, en blessant 54. De même qu’au Zimbabwe, où Nehanda avait pris la direction du mouvement, la direction de la SWANU, lors des manifestations de 1959, comprenait une militante, Kakurukaze Mugunda (...). Cette militante a été fusillée et devint l’une des premières victimes et martyres de la féroce répression sud-africaine. De nos jours, le 10 décembre est devenu le jour officiel de commémoration du massacre de Mugunda et des autres victimes (10 morts, 25 blessés). C’est aussi le jour qui marque la décision de passage à la lutte armée populaire comme étant la seule réponse à la situation.
« Kakurukaze a été touchée par une balle en pleine poitrine, et lorsqu’elle a réalisé qu’elle était mortellement atteinte, en dépit du sang qu’elle perdait, elle s’est dressée pour s’approcher de la voiture du superintendant de la ville, et s’est débrouillée pour y mettre le feu à l’aide d’une boite d’allumettes. Elle est décédée peu de temps après. C’est en hommage à la bravoure et à l’héroïsme de Kakurukaze Mugunda que la Swapo a choisi le 10 décembre comme la journée des Femmes Namibiennes.
L’activiste Potus Appollus déclarera par la suite qu’on pouvait voir dans le massacre de Windhoek un tournant dans la nature de la résistance des femmes, puisqu’elles ont alors transformé leur patiente lutte de résistance en lutte de « l’ indomptable volonté de résistance des Femmes Namibiennes ». Suite à ce massacre, le mouvement des travailleurs Nujoma a quitté la Swanu qui répugnait à mener la lutte armée et a constitué le mouvement de la Swapo qui a effectivement conduit les masses namibiennes jusqu’à la liberté par une guerre de libération. Mais à la différence du Zimbabwe où les femmes ont toujours fait partie du « Second Chimurunga », les femmes namibiennes n’étaient pas totalement impliquées dans le combat armé au tout début de la guerre. Par exemple,le Conseil des Femmes de la Swapo ne s’est pas constitué avant 1969 , et à cette époque, seulement parmi les exilés, jusqu’au premier congrès de la Swapo en Angola en 1980 ; c’est alors qu’il a été demandé de faire des changements au sein de la Swapo afin de reconnaître la participation des femmes à la lutte et de partager les tâches de direction.
Mais, ainsi que les historiens Sparks & Green le confirment (1992), la politique de participation des femmes à la lutte armée dans la Swapo a posé problème aux hommes dans un premier temps. Depuis que le manifeste électoral de la Swapo en 1989 mentionne le rôle très limité des femmes dans l’armée indépendante de Namibie, cela confirme les hypothèses précédentes que le rôle des femmes au combat a toujours été considéré comme extraordinaire, en dépit de l’engagement des femmes à y participer activement. La question du ratio femmes/ hommes au sein de l’armée namibienne pourrait bien être un des axes de la lutte contre la discrimination, tout comme cela se pose dans d’autres secteurs des responsabilités gouvernementales.
En 1966, aux débuts de la lutte armée, il y avait seulement une poignée de femmes en exil qui participaient. Mais au cours des 20 dernières années, les femmes sont devenues visibles dans pratiquement tous les domaines de la lutte.
