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INDE : Les maoïstes émergent en tant que plus grande menace.

Partisan N°232 - Novembre 2009

« Les maoïstes émergent en tant que plus grande menace ». C’est le titre d’un article paru dans le Hindustan Times. « Durant les cinq dernières années, les rebelles maoïstes ont émergé comme plus grande menace pour la stabilité interne de l’Inde, laissant les autorités tâtonner à la recherche d’une réponse à leurs croissantes et audacieuses attaques. Avec une embuscade qui a tué 30 policiers la semaine dernière, les insurgés gauchistes ont démontré leur capacité à frapper avec une apparente impunité et ensuite disparaître de nouveau dans leurs cachettes rurales avant que quiconque ne puisse réagir. » Qui menace réellement la « stabilité interne de l’Inde », sinon les conditions de vie de plus en plus précaires imposées à la majorité de la population par une bourgeoisie soucieuse uniquement de sa « compétitivité » dans l’arène capitaliste internationale ? Que peut un Etat totalement discrédité aux yeux du peuple, sinon assumer ouvertement sa fonction répressive de défense des privilèges d’une minorité haïe ? D’où les « tâtonnement »... Il n’est alors pas étonnant que la guérilla communiste se meuve « comme un poisson dans l’eau » parmi une paysannerie opprimée qui est la première à lui offrir des « cachettes rurales » dès qu’elle en a besoin.

« Leur insurrection, qui a débuté par un soulèvement paysan en 1967, s’est répandue sur plus de la moitié des 29 Etats indiens et a été identifiée par le Premier ministre Manmohan Singh comme la menace principale sur la sécurité intérieure. On sait peu de choses sur la direction fantôme du mouvement basée dans les denses forêts de l’Etat du Chhattisgarh ou sur le nombre de ses cadres estimé variablement entre 10 000 et 20 000. » Travail lent que celui de la conscientisation des masses. Travail dont les résultats fluctuent au gré des avancées ou reculs de l’idéologie dominante, travail exacerbé par l’âpreté de la guerre économique qui oblige les bourgeoisies nationales à pressurer de plus en plus les populations dont elles se veulent les « élites ». Comment s’étonner que ce soit au Chhattisgarh que la direction clandestine du Parti ait trouvé refuge et appui ? Cet Etat a été artificiellement créé par le BJP (parti au pouvoir de 1998 à 2004) pour isoler les tribus aborigènes et disposer plus facilement des vastes ressources naturelles qui se trouvent dans leurs réserves forestières. Et le journaliste de déplorer qu’on ne sache pas grand chose sur le nombre et l’identité des cadres du Parti ! Ce « on » étant bien entendu la police, que messieurs les journalistes et autres « politologues » s’empressent de renseigner lorsque l’électoralisme ne suffit plus à contrôler toute opposition en la « professionnalisant ».

« La peur et l’absence d’une présence de l’Etat dans de nombreuses régions éloignées accroissent la vulnérabilité de la population » (Ajai Sahani, directeur de l’Institut de polémologie de New Dehli).
« Malgré tout, il est clair que l’augmentation des disparités sociales produites par la croissance économique de l’Inde a été un facteur essentiel à l’expansion maoïste. » « Dans presque un 5e du pays, il n’y a virtuellement aucune gouvernance. Il y a des zones habitées par les tribaux et les plus pauvres parmi les pauvres qui ont été dépassées par le boom économique » (Paranjoy Guha Thakurta, écrivain et économiste).
Loin d’être les seuls « laissés pour compte du boom économique », les tribaux et les masses paysannes ont néanmoins la chance d’être loin des moyens de répression de l’Etat. Contrairement au prolétariat urbain, ils peuvent s’organiser pour réagir de manière radicale sur le terrain (les lieux de production) et élaborer des projets socio-économiques alternatifs sur une assez longue durée. Loin d’engendrer la peur, « l’absence d’une présence de l’Etat » a permis aux exploités de redresser la tête. Les zones libérées par l’armée populaire voient aussitôt se constituer des conseils paysans qui décident collectivement de la redistribution des terres, de l’auto-organisation des services de santé, de l’éducation, de la justice, de la condition féminine, de l’abolition des castes, etc.

John Elliott, ancien correspondant du Financial Times en Asie, compare évidemment les naxalites aux talibans ! « Le problème devient plus sérieux parce que les naxalites ne sont plus juste concentrés sur les zones forestières reculées, mais menacent le développement économique et peut-être les centres urbains. » « L’insurrection a commencé comme une révolte paysanne au Bengale occidental il y a 40 ans. Il est significatif qu’ils soient maintenant de retour où ils ont débuté – merci largement à la mauvaise gestion du PCI(m). Le ressentiment s’accroît à l’encontre de la tentative du gouvernement de l’Etat d’industrialiser des terres agricoles qui furent originellement allouées aux paysans pauvres sous la très appréciée réforme agraire – c’est arrivé à Nandigram, et à l’usine Tata de production de la voiture Nano, également abandonnée, à Singur – et à l’encontre de la manière répressive et corrompue par laquelle les cadres du PCI(m) se maintiennent au pouvoir. » Il n’y a rien à ajouter à ce cinglant bilan des décennies de cogestion sociale-démocrate...

(Retrouvez l’intégralité de cet article sur le blog nouveaunepal@over-blog.com)

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