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Nous avons créé un cercle

Partisan N°226 - Mars 2009

« Nous avons créé un cercle »

Présentez-vous, s’il-vous-plait.

Nous sommes une dizaine de militants syndicaux, CGT et FSE, à nous retrouver deux fois par mois pour faire de la politique. Cela fait un an que ça dure, et nous comptons bien continuer. Parmi nous, il y a des militants de VP mais pas seulement. Il y a aussi des ouvriers et des étudiants non organisés politiquement mais qui ressentent tous la nécessité d’une formation et d’une pratique politique.

Comment avez-vous commencé à militer et à vous organiser ensemble politiquement ?

Nous avons d’abord tous commencé à nous organiser syndicalement.
Pour les étudiants, la lutte contre le CPE en 2006 a été importante dans leur engagement. Les tracts et les discussions avec les travailleurs les ont amenés à s’interroger et à développer leur conscience de classe. « C’est dans la lutte que tu commences à comprendre l’intérêt de l’organisation collective », et à voir l’intérêt du syndicat. « Dans la lutte, tu te positionnes sur une ligne que tu ne matérialises pas forcément, le syndicat t’aide ». Mais très vite, on se rend compte aussi que l’engagement strictement syndical a ses limites et cela amène à vouloir aller plus loin dans la compréhension du système.
C’est pareil pour les jeunes travailleurs. Faire de la politique, « c’est vouloir sortir du rapport immédiat entre nous et les patrons au sein de la boite », « c’est avoir envie d’acquérir des connaissances politiques pour mener une lutte plus efficace ». C’est « s’enrichir personnellement », « désirer se former pour comprendre le système capitaliste et le combattre ». Et puis, « faire de la politique te permet de mieux comprendre la lutte de ligne dans le syndicat, de te positionner, ça te donne les armes pour lutter dans et en-dehors du syndicat ».
Pour les militants CGT, nous militons ensemble dans une structure interpro, et c’est grâce à cette pratique commune que nous avons eu envie de continuer ensemble politiquement en nous organisant avec des militants de VP.

Qu’est-ce que c’est, pour vous, faire de la politique ?

« C’est avoir une pratique ainsi qu’une formation théorique ». « C’est aller vers les masses, discuter, faire de la propagande », « connaître les idées des masses et échanger ». « C’est élaborer une ligne de conduite qui mènera les prolétaires au pouvoir ». « C’est regrouper des personnes qui partagent et appliquent des idées jusqu’à réveiller les consciences de la classe populaire formatée par l’idéologie capitaliste ».
Faire de la politique, c’est réfléchir au monde que l’on veut construire, et à la façon d’y arriver, en tenant compte des erreurs du passé, et en les analysant. « Il faudra bien qu’on mette quelque chose en place pour que ça ne redevienne pas comme avant ».

Comment faites-vous ? Comment êtes-vous organisés ?

Nous nous voyons deux fois par mois. Nous nous formons aussi bien théoriquement que politiquement.
Nous sommes allés à quelques réunions du NPA, mais nous avons rapidement compris que nous n’y avions pas notre place. Cette expérience a été enrichissante pour nous dans le sens où elle nous a permis de comprendre réellement ce qu’était le réformisme petit-bourgeois, et de casser nos illusions sur ce NPA (anti-capitaliste, ou anti-communiste ?).
Cela ne nous a pas démoralisé du tout, au contraire. Nous avons décidé de continuer à nous former, à élaborer notre propre intervention politique. Nous avons beaucoup de discussions, nous faisons des tracts que nous diffusons sur un quartier, des boites, et des lycées professionnels.
Au départ, nous avons commencé à discuter à partir de définitions de termes que nous ne comprenions pas tous (exploitation, communisme, forces productives...). Et maintenant, nous nou_s formons sur l’histoire de la lutte des classes, les expériences révolutionnaires, leurs acquis et leurs échecs. Ce sont les militants de VP qui préparent la formation et animent le débat, mais tout le monde s’implique réellement, ce qui fait qu’il y a un véritable échange.

Pourquoi est-il si important pour vous de vous former ?

« La formation, c’est acquérir une autonomie intellectuelle qui nous permet de faire face et de répondre aux attaques continuelles ». « Tu te formes pour avoir des discours clairs et cohérents ». Et « pour ne plus te faire avoir par le patronat ». « Sans la connaissance, nous n’arriverons pas à mener à bien la révolution ».
Il ne s’agit pas seulement de constater la division entre les travailleurs intellectuels et manuels, et le fait que les travailleurs manuels dans ce système soient dépossédés de leur capacité à réfléchir à cause de leur aliénation. Car constater cela, ça implique d’essayer de le changer. Il faut donc donner la possibilité aux travailleurs manuels d’avoir accès, au savoir mais également remettre en cause notre rapport au savoir.
Cela, nous le faisons ensemble, dans une pratique commune, ouvriers, étudiants, militants VP ou non, et tout le monde s’enrichit de la pratique des autres. Pour ne pas renvoyer chacun à ses difficultés individuelles vis-à-vis du savoir intellectuel, nous lisons des tracts ou des articles ensemble, à voix haute, et tout le monde participe à l’élaboration des articles. Nous prenons en charge notre propre instruction. Nous parlons de notre rapport à la lecture, à l’écriture, nous ne cachons jamais les difficultés, mais au contraire, nous en discutons pour nous déculpabiliser et avancer !

Quelles difficultés rencontrez-vous ?

« Ce n’est pas simple d’avoir une implantation et de discuter avec les travailleurs ». « C’est difficile d’ouvrir les consciences ». Lorsqu’on diffuse les tracts devant les boites, nous avons peu l’occasion de discuter avec les ouvriers, soit parce qu’ils sont pressés, soit parce qu’ils ont peur des représailles.
D’autre part, « c’est super-difficile de lutter contre les idées réformistes », « de déconstruire l’idéologie bourgeoise ». « Les réformistes n’ont pas les mêmes moyens de propagande que nous ! »
Le terme de communisme a été déformé, associé à tout et n’importe quoi. Faire de la propagande communiste est un dur combat, ça demande d’accepter d’être « minoritaire et à contre-courant ».

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