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« Ni putes ni soumises » bouge encore

On parle moins de Ni putes ni soumises (NPNS), mais l’organisation bouge encore. Elle a été créée il y a dix ans.
En 2002 à Vitry-sur-Seine, une jeune fille, Sohane Benziane, meurt dans un local à poubelles, brûlée vive par un jeune de sa cité. Au même moment, Samira Bellil publie un témoignage sur les viols qu’elle a subis : Dans l’enfer des tournantes. début de 2003, la marche des femmes des quartiers est organisée. Les médias sont tous présents, les marcheuses disent qu’elles se sont mobilisées à la mort de Sohane. Qui ne pourrait être ému ?
Mais, la marche n’est pas spontanée. Celle qui l’organise, Fadela Amara, est présidente de la Fédération nationale de la maison des potes, elle est aussi membre du PS. Si le PS organise NPNS et la marche, c’est qu’il en a besoin, et pas par sympathie pour les filles des banlieues.
Dés 2003, la direction du bureau politique du PS décide de soutenir la loi interdisant le foulard et de la voter à l’Assemblée. Fadela Amara et NPNS changent de discours. Il faut cibler non seulement les jeunes des banlieues, qui seraient potentiellement violeurs, intégristes musulmans, mais aussi les femmes voilées, 5ème colonne de l’islamisme militant. Bien sûr, ces gens-là seraient un danger pour la « République ». Le discours est sans nuances et plaît à la bourgeoisie. Raffarin leur alloue des aides ; Borloo, le PS, tout le monde met la main à la poche. Et ça continue encore aujourd’hui.
En mars 2005, NPNS organise une manifestation des femmes séparée, sans femmes voilées. Arlette Laguillier est même présente : quel féminisme soutient donc Lutte Ouvrière ? NPNS continue sur sa lancée, demande que l’on remette de l’ordre dans les banlieues, que les petits caïds machos cessent de faire la loi, que l’ordre de la République soit respecté. Nicolas Sarkozy le ministre de l’Intérieur de l’époque est aux anges.
En 2007, consécration ! Fadela Amara entre au gouvernement Fillon comme secrétaire d’État chargée de la politique de la ville. Elle travaille avec Christine Boutin, la catholique intégriste. Une bonne partie des comités NPNS quitte le navire. Inutile de rappeler que l’ancienne dirigeante de NPNS ne changera rien à la situation des banlieues.
CertainEs s’illusionnait sur NPNS, de gauche, proche du PS, ou même filles des banlieues en révolte. Le discours sécuritaire dès le départ, ainsi qu’un laïcisme étroit, lui permet de trouver des soutiens politiques de tous bords. Les populations des banlieues sont instrumentalisées dans une soi-disant défense des droits des femmes par un État bourgeois, répressif mais juste. Pour NPNS, comme pour le PS, les rapports sociaux et les questions de classes n’existeraient pas, car seuls les musulmans seraient coupables.
Finalement, l’étonnant, c’est la complicité autour de NPNS, inconnu dans les banlieues, mais bien vu à la télé. En effet, NPNS représentele fantasme de la bourgeoisie, des filles immigrées qui se réclament de la République, qui n’emmerdent pas avec des questions de classes sociales. Donnons-un peu d’argent, elles feront le spectacle. Elles serviront à faire croire que la démocratie bourgeoise peut libérer les femmes. Finalement, on peut laisser les banlieues dans la misère, puisque les coupables sont trouvés, ce sont les machos intégristes et les femmes voilées. Significatif : lévolte de 2005 laissera voix.
Le chemin, c’est construire un mouvement féministe et communiste dans les banlieues, comme Femmes en lutte 93, comme des tas d’autres associations dans les cités qui ont de vrais liens aux masses, qui y font un réel travail.

 

Sébastien

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