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La Gauche déjà, en 1997...

On était deux ans après la grande grève de 1995 contre le plan Juppé. Renault menaçait de fermer l’usine de Vilvorde en Belgique. Jospin, dirigeant du PS, trouvait la situation scandaleuse car l’État (comme toujours) avait mis énormément d’argent dans l’entreprise. Il manifestait à Bruxelles avec les ouvriers contre la fermeture. En mai 1997, il recevait même une délégation d’ouvriers à qui il promettait une autre solution. Et, il pouvait le faire car l’État est l’actionnaire principal de Renault.

 

En juin, les législatives sont remportées par la Gauche Plurielle. Changement de discours. Il fallait d’abord une expertise, qui ne donnera rien, et l’usine fut fermée. La liste des licenciements et fermetures continue, jusqu’à la célèbre déclaration à propos de Michelin : « L’Etat ne peut pas tout... » Pour enrayer le chômage, le gouvernement créait les emplois-jeunes, la CMU...mais la précarité augmentait. Les privatisations allaient bon train : les assurances Gan, Thomson, le CIC, Air France... Ce gouvernement de « gauche » fut celui qui a le plus privatisé. Les chômeurs étaient sommés d’accepter n’importe quel travail s’ils voulaient être indemnisés.

 

En 1998 et 2000, ce sont lois Aubry, dites des 35 heures. Un « progrès social » ? Ce fut la possibilité pour les patrons d’adapter les horaires de travail aux aléas de la production. En fait de 35 heures, c’était 1600... par an, les horaires pouvant varier jusqu’à 48 heures par semaine. Les temps de pause, les jours gagnés par les luttes antérieures sont sortis du temps de travail. Des milliards sont accordées aux entreprises qui acceptent d’embaucher. La loi se négocie entreprise par entreprise, ce qui donne un grand avantage aux patrons.

 

Pour les camarades immigrés, les lois Pasqua-Debré n’ont pas été abrogées. Nous dénoncions les lois Chevènement, ministre de l’Intérieur, qui aboutissaient « à soumettre une partie de la classe ouvrière de France à une précarité maximum, par le chantage permanent au titre de séjour... » Comme disaient des camarades sans papiers à l’époque , « il est plus compliqué de mobiliser sous un gouvernement de gauche ».

 

Les Verts et le PCF participaient à ce gouvernement de Gauche Plurielle. Ils critiquaient un peu, mais participaient. Par exemple, Gayssot, ministre PCF des transports, dans un conflit avec les patrons routiers, accepta « une dérogation à la loi Aubry en permettant aux chauffeurs de travailler 48 heures » pour « tenir le coup face à la concurrence européenne ». Le PCF qui ne parlait plus de « camarades » mais de « citoyens », organisait avec l’extrême gauche le 16 octobre 1999 une manifestation pour soutenir les revendications des travailleurs. La CGT refusait la manifestation, ce qui traduisait la fin de la mainmise historique du PCF sur la direction de la CGT. En juin 2001, à l’initiative de l’intersyndicale de l’usine Lu-Danone et à l’appel de syndicats d’entreprises, 20 000 manifestants défilaient à Paris contre les licenciements,. Les directions des confédérations syndicales étaient absentes. Ces manifestations militantes furent sans lendemain.

 

On peut ajouter que, sur la période, le PACS fut voté, et les réactionnaires vociférèrent que c’était la fin de la civilisation. Un air de déjà vu. Gauche-droite, gauche-droite : et si on arrêtait de marcher ?

LO, le PCF et la GAUCHE

 

La Gauche Plurielle a été au pouvoir de 1997 à 2002. Rappelez-vous sa fin, Jospin absent du second tour, Le Pen présent, grande panique chez les petits-bourgeois.
La Gauche Plurielle, ce fut le PS, le PC et les Verts au gouvernement. Le PC, sentant que sa base se dérobait, appelait à des manifestations nationales, le 16 octobre, puis le 11 décembre 1999. Mais, il ne voulait pas critiquer le gouvernement, juste le pousser dans la bonne direction. Le PC annonçait qu’il voterait la loi Aubry si elle était amendée sur quelques détails.
Ce fut donc, appelée par le PCF et l’extrême gauche LO et LCR, une manifestation « pour l’emploi ». Et dans cette manifestation, il ne fallait pas qu’il y ait la moindre attaque contre le gouvernement. Comme l’écrivait LO dans son mensuel Lutte de classe : « Nous participerons à la préparation et aux manifestations prévues le 11 décembre, sur de tels objectifs, en commun avec les militants du PCF et tous les militants ouvriers qui s’y associeront, mais sans tenter de faire de ces manifestations un règlement de compte envers le reste de la politique du PCF... Ce qui veut dire que nous nous désolidariserons de ceux qui voudraient le faire... ». Bref, silence sur la politique anti-ouvrière du gouvernement, parce que le PCF en fait partie.
A quoi cette politique a-t-elle servi ? A l’entrée en vigueur de la 2ème loi Aubry. LO se voulait responsable, il n’a servi que de roue de secours au PCF, qui lui-même soutenait le PS. Au lieu de tracer une ligne nette de démarcation avec la politique du PCF, par cette politique les travailleurs furent encore plus embrouillés, désarçonnés. Car si LO critiquait bien la Gauche Plurielle, il en innocentait presque le PCF, ne se contentant de critiquer que sa direction. LO a toujours été fasciné par le PCF et sa puissance passée.
Les révolutionnaires doivent montrer la voie à prendre, aller à contre-courant. Dans ce cas, comme VP, dénoncer la politique du PCF qui de façon évidente soutenait les attaques contre la classe ouvrière. Ce n’était pas diviser que dénoncer ces attaques, c’était éclairer, former, rassembler sur des bases de classe. LO, qu’elle le veuille ou non, se contenta d’être la gauche de la gauche et ne prépara pas les masses à la construction d’une société débarrassée de l’exploitation.

 

Sebastien
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