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Nelson Mandela : Un héros pour les oppresseurs, un traître pour les opprimés !

Nous reproduisons ci-dessous des extraits d’un texte publié par la Democratic Students’ Union, une organisation étudiante maoïste indienne.

Depuis la mort de Nelson Mandela, le 6 décembre, les hommages les plus fleuris lui ont été adressés par les classes dirigeantes du monde entier. C’est précisément cette unanimité des impérialistes et de leurs agents qui est le plus révélateur. Le prétendu héritage de Mandela est construit sur une illusion, illusion construite par Mandela lui-même. (...)

 

Quel est exactement l’héritage de Mandela ? (...) Pendant les années 1980, le régime de l’apartheid a commencé à offrir des prêts généreux à une poignée d’hommes d’affaires noirs, provoquant la montée d’une nouvelle bourgeoisie essentiellement compradore. Les chefs de l’ANC [le parti de Mandela], en même tant qu’ils emménageaient dans de belles résidences entourées de terrains de golf, se sont mis à désirer la paix. A cette époque, les forces impérialistes ont très bien compris que, face à la vague de révolte qui grossissait de plus en plus parmi les masses noires, ils n’avaient le choix qu’entre la Révolution et la « Réconciliation ». En d’autres termes, subir une révolution sociale, ou accepter une "transition pacifique" qui laisserait la minorité possédante blanche et les intérêts occidentaux intacts, mais tout cela retouché par des changements cosmétiques. Au fil de longues négociations clandestines, qui ont finalement conduit à sa libération, Mandela (et l’aile modérée de l’ANC) ont choisi cette dernière voie.

Dès 1985, des années avant la libération de Mandela, ce compromis était déjà écrit lorsqu’un groupe d’industriels sud-africains dirigé par Gavin Reilly, président de l’« Anglo-american mining company », le plus puissant des monopoles sud-africains, rencontra en Zambie les dirigeants de l’ANC. Les deux parties avaient alors convenu d’une « transition » de l’apartheid à une « démocratie libérale noire » régie par l’ « ordre » et la « stabilité ». Des rencontres secrètes ont également eu lieu en Angleterre, notamment avec un futur président de l’Afrique du Sud « libérée », Tabo Mbeki. Mandela lui-même avait entamé entre-temps des négociations secrètes avec les autorités depuis sa prison. (...)

 

Peu de temps après sa libération lors de sa première visite aux USA, il a immédiatement rassuré l’impérialisme occidental : « L’ANC réintroduira le marché en Afrique du Sud ». Accusé alors par certains d’être devenu un émule du modèle néo-libéral, il affirma : " Vous pouvez lui mettre l’étiquette que vous voulez mais, pour ce pays, la privatisation doit être la politique fondamentale. » Salué comme « le plus fiable serviteur de la plus grande économie d’Afrique sub-saharienne en embrassant des politiques monétaires et fiscales orthodoxes » par le journal d’affaires Financial Times, Mandela s’est chargé d’assurer que les profits des mines et de l’agriculture sud-africaine continuent bien d’être versés dans les coffres des investisseurs étrangers et de l’élite blanche. (...)

 

Alors que le mandat du peuple, formulé par la Charte de la liberté [programme de l’ANC à ses débuts], exigeait la nationalisation des mines, Mandela passa des compromis avec les milieux d’affaires blancs pour laisser intacte leur part du gâteau. Plusieurs des figures de l’Apartheid ont gardé des postes clés, comme le ministre des finances Derek Keyes, qui a conservé son poste sous Mandela. Une autre promesse fondamentale de la Charte, la redistribution totale des terres, a été abandonnée, remplacée par une nouvelle clause de la Constitution qui « protége toute propriété privée ». Le transfert de propriété des ressources naturelles et des terres, qui constitue une base indispensable pour une véritable transformation de la société, a été délibérément occultée sous les slogans de "Vérité et réconciliation » et de « Nation arc-en-ciel ».

 

Ces slogans n’ont fait que couvrir l’appauvrissement des masses noires. Mandela n’a fait que remplacer l’apartheid raciale par l’apartheid économique. Bien que les disparités entre les Blancs et une minuscule élite noire enrichie se soient rétrécies, elles se sont élargies entre ceux-ci et la majorité noire. Ses conditions de vie sont les mêmes, voire même pires, que sous l’Apartheid. Les Noirs, qui constituent 80 % de la population, ne contrôlent que 5 % des richesses. Seule une infime fraction (3 %) des terres appartenant à des Blancs (87% du total) a été transférée à des Noirs depuis 1994. Post-apartheid, le revenu des 40 % de familles noires les plus pauvres a diminué de 20%. 2 millions d’entre elles ont été expulsées de leurs maisons. La privatisation des services de base a privé d’eau et d’électricité des millions de personnes. En 2010, 30 % des Noirs étaient officiellement au chômage contre seulement 5 % des Blancs. Le niveau de revenu des noirs par habitants en 2008 n’était que de 13% de celui des Blancs, pour 10,9 % en 1993. Le massacre de 34 mineurs de Marikana (mine de platine, propriété de capitaux britanniques), abattus dans le dos par la police, témoigne de la brutalité du régime post-apartheid mis en place par Mandela.

 

Mandela, par sa trahison historique, a vendu l’énorme potentiel révolutionnaire de la lutte anti-raciste qui a fait rage dans toute l’Afrique contre des années d’oppression raciste brutale et d’exploitation. C’est cette trahison qui a fait de Mandela un « saint » pour les oppresseurs. Ils l’admirent non seulement par ses compromis, mais aussi pour sa capacité à utiliser son prestige et son charisme pour convaincre les opprimés de se plier à la « réconciliation » et à sacrifier leur propre intérêt pour le plus grand bien des classes dirigeantes. Mais il ne peut y avoir « réconciliation » avec le féodalisme, avec le fascisme ou avec l’impérialisme. La seule façon d’avancer vers la libération est le renversement complet d’un ordre injuste par la révolution.

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