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Kanaky : quels enjeux derrière le référendum ?

Bulletin N°31 - Novembre 2018

La Kanaky [1] fut découverte par les anglais à la fin du 18ème siècle puis conquise par les français en 1853 et colonisée durant le 19ème siècle. Depuis le début de la colonisation, le peuple kanak [2] résiste et lutte pour sa libération. Deux épisodes ont marqué les mémoires des Kanak : la Révolte d’Ataï en 1878 et la Révolte de 1917. Au-delà de ces deux moments, le peuple kanak a su construire de véritables résistances pour libérer son pays.
Le 4 novembre 2018, se déroulera en Kanaky un référendum d’indépendance.

Ce référendum fait suite aux accords de Matignon de 1988 puis des accords d’Ouvéa de 1998.
Ces accords ont été signés pour mettre fin à plus de dix ans de luttes indépendantistes dans les années 80. Durant cette décennie, le mouvement indépendantiste était fort et offensif. Nous retiendrons, entre autres événements, la campagne de boycott des élections de 1984 mais aussi l’épisode de la prise d’otage de gendarmes dans la grotte d’Ouvéa en avril et mai 1988 ; épisode qui se solda par un carnage de la part des gendarmes.

Alors, que penser de ce référendum ?
Tout d’abord, une question se pose : qui peut voter à celui-ci ?
L’État français a instauré un corps électoral spécial, c’est à dire des critères spécifiques pour pouvoir voter (être installé en Kanaky depuis un certain temps par exemple). Ce corps électoral spécial pose déjà des problèmes : nombreux sont les Kanak éligibles mais non-inscrits, inscriptions frauduleuses dans les municipalités loyalistes...

Mais au-delà des insuffisances des listes électorales, est-ce justifié que les caldoches [3] puissent tous voter ? Sachant que nombres d’entre eux ont fait partie des vagues d’immigration mises en place par la métropole pour contrebalancer la population kanak.

Peut-on espérer une indépendance avec un référendum ?
Bien entendu, le « Oui » pourrait théoriquement l’emporter. Mais si cela était le cas, quelle indépendance cela apporterait ? Pour y répondre nous avons l’expérience des indépendances des colonies françaises en Afrique subsaharienne : une indépendance sur le papier, une dépendance à la métropole impérialiste dans les faits ! La Kanaky est stratégique pour la France : c’est une source de matières premières (principalement du nickel) mais l’occupation de cet archipel lui permet aussi de détenir une zone maritime et une présence dans cette région. On voit donc mal l’impérialisme français lâcher sa main mise !

Une réelle indépendance ne se gagnera que par la lutte contre la puissance coloniale, c’est à dire la France. Cette lutte devra être dirigée par une organisation ou un parti révolutionnaire afin d’assurer la victoire au peuple kanak et non pas une indépendance fantoche. Assurer une victoire anti-colonialiste et construire le chemin vers l’émancipation sociale du peuple kanak. Force est de constater qu’une telle organisation n’existe pas encore en Kanaky. Pourtant, un souffle de révolte gronde dans la jeunesse kanak. Espérons que celui-ci se transformera en un mouvement capable d’arracher la victoire, au delà des enjeux institutionnels.

Ici, en France, soutenir les luttes des peuples colonisés fait partie de nos tâches de révolutionnaires. La lutte anti-colonialiste là-bas renforce la lutte anti-impérialiste et anti-capitaliste ici. C’est donc dans l’intérêt des prolétaires en France de soutenir l’autodétermination réelle du peuple kanak.

- Le référendum, ce n’est pas l’indépendance ; c’est le renforcement de la domination coloniale.
- Retrait des troupes militaires et des intérêts économiques français !
- Réparation du pillage économique !
- Droit à l’autodétermination sans condition du peuple kanak !

Bulletin N°31 - Novembre 2018

[1Nom de la Nouvelle-Calédonie donné par les indépendantistes dans les années 70. Ce nom dérive du mot polynésien « Kanaka » imposé par les colonisateurs anglais dans le Pacifique.

[2Le mouvement indépendantiste a repris, dans le années 70, le stigmate « canaque » apporté par la colonisation dans son orthographe première « kanak ». En 1985, il a été décidé d’écrire « les Kanak » ou, comme adjectif , « kanak », sans accord.

[3Population blanche originaire d’Europe et ayant immigré en Kanaky.

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