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Sidérurgie 1984 : contre les licenciements et contre la Gauche

Partisan N°261 - Décembre 2012

Vague de licenciements et Gauche au pouvoir : ce n’est pas la première fois. Au début des années Mitterrand, le gouvernement PS/PC pilote directement les restructurations de secteurs nationalisés, la sidérurgie lorraine en 1984, Renault en 1985, et indirectement lorsqu’il s’agit d’entreprises privées comme Creusot-Loire ; mais c’est encore la sidérurgie.

Les formes de luttes en 1984

Les débrayages massifs à l’occasion de négociations sont combinés à des opérations « coup de poing ». Ces actions sont différentes selon qu’elles sont organisées par les syndicats (blocage des autoroutes au Creusot, déroulement de feuillards – rouleaux de tôle fine - dans les rues de Longwy), ou par des groupes non contrôlés par eux, comme le groupe 79-84 à Longwy (affrontement avec les CRS, saccage des locaux PS). Ce groupe réunissait des syndicalistes CGT et CFDT, ainsi que des ouvriers sur une base de classe ; « 79 » est en référence à la restructuration précédente menée par la droite en 1979.
Mais la forme de lutte ne permet pas à elle seule de tracer une démarcation entre une pratique réformiste et de rupture de classe. Des actions peuvent être violentes, et leur contenu corporatiste. A Longwy, la CGT mène des actions coup de poing, mais s’oppose à la participation des chômeurs, alors que le groupe 79-84 cherche à les associer. Une action contre le Centre des impôts permet la destruction des avis de relance des impayés adressés aux chômeurs. Mais cette orientation, forte en Lorraine, reste globalement minoritaire.
Ces actions coup de poing sont plus des actions de sensibilisation politique que la construction d’un véritable rapport de force. Les restructurations avec licenciements continent de passer.

Le contenu des luttes

Dans la majorité des cas, le mot d’ordre est « L’entreprise vivra ». Il est associé à la défense de l’outil de travail et du potentiel industriel (Le Creusot) ou à la mise en avant du caractère d’avenir de la production (Thomson Armement). La défense de l’emploi est vue comme subordonnée et conditionnée à la défense de l’entreprise. La mobilisation syndicale s’organise autour de la proposition d’un plan économique alternatif à la fermeture de l’entreprise. On peut citer le Plan Herzog (dirigeant du PCF) pour la sidérurgie. Mais les plans reposent sur une logique de concurrence avec rapatriement des sous-traitances et défense des industries nationales.

Des ouvriers refusent cette logique de concurrence

A Longwy, le groupe 79-84 dit : « On ne se bat pas pour la sidérurgie, mais pour un emploi pour tous ». Action en direction des chômeurs ; revendication d’un revenu garanti pour les chômeurs ; demande d’extension de la convention sociale de la métallurgie (très favorable) à tous les travailleurs du bassin ; rejet explicite du nationalisme lorrain ou français.
Mais le contenu dominant de la lutte a conduit à se battre sous le drapeau de sa bourgeoisie. Avec la défense de son entreprise, de sa région, de son pays, la défense de l’outil de travail impose par exemple l’alliance avec les cadres, les bourgeois locaux, et le renoncement à toute violence. Le soutien aux plans alternatifs des experts des syndicats et du PCF, c’est l’abandon de toute revendication sur la réduction du temps de travail et d’un salaire pour les chômeurs. Alors que les enjeux sociaux et politiques devenaient plus élevés, le mouvement de résistance dans sa dominante réformiste se repliait sur la défense de l’entreprise.

 

Sébastien

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