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Le capitalisme c’est la catastrophe, à bas le terrorisme industriel

Partisan Magazine N°15 - Juin 2020

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Il y a 150 ans, les catastrophes industrielles et minières ne posaient pas le moindre problème social, de même que l’exploitation féroce des enfants ou l’effroyable mortalité ouvrière, c’était dans l’ordre – capitaliste – des choses. C’est encore le cas aujourd’hui dans les pays dominés d’ailleurs, qu’il s’agisse des mines officielles ou clandestines, des montagnes de déchets et détritus, des plantations pourries de pesticides ou des catastrophes autour d’usines vétustes.

Et quand l’on constatait quelques effets indésirables, c’était vu comme la « rançon du progrès », progrès qui allait bien entendu porter le bonheur à l’humanité. Jusque dans les années 60/70, c’était le discours dominant issu de l’après-guerre et de la reconstruction des « 30 glorieuses », porté par toute la gauche réformiste en consensus avec la droite souverainiste, PS et PC réunis. Il a fallu le discours précurseur de l’écologiste René Dumont aux élections présidentielles de 1974 pour jeter un énorme pavé dans la mare du consensus du progrès soi-disant neutre.

Dès avant, il y avait eu des signes avant-coureurs, comme chez nous la rupture du barrage de Malpasset en 1959 avec 423 morts, et l’incendie de la raffinerie de Feyzin en 1966, avec ses 18 morts, 84 blessés et 1500 riverains touchés. Il y avait eu toutes ces pollutions dans le Tiers-monde, mais elles étaient alors peu connues.

A partir des années 70/80, à la fois les catastrophes industrielles se multiplient dans le monde entier, elles sont mieux connues et elles commencent à inquiéter sérieusement des fractions de plus en plus larges de la population.

Là encore sans faire dans le catalogue insupportable, il convient de faire quelques rappels.
- Il y a toutes les catastrophes liées au pétrole, les plateformes pétrolières qui fuient, en Norvège, dans le Golfe du Mexique, en Amazonie ; les marées noires sur tous les océans du globe, les raffineries, les séismes liés à l’extraction des gaz de schistes etc.
- Les catastrophes nucléaires, de Three Miles Island aux USA (1979) à Fukushima (2011) en passant par Tchernobyl (1986) – en attendant les prochaines ?
- Les catastrophes de l’industrie chimique qui se multiplient dans l’actualité, en commençant par Seveso en Italie (1976), puis Bhopal en Inde (1984) et ses 8000 morts en trois jours (voir l’article en ligne sur le site de VP), AZF en 2001, les explosions dans les usines chimiques à Tianjin, Yangcheng, Sanmexia en Chine depuis 2015, des centaines de morts, Lubrizol en 2019 et bien d’autres évidemment à venir.
- Les catastrophes sanitaires et médicamenteuses de la Dépakine, du Distilbène, du Levothyrox, du Mediator, de la Thalidomide, des glyphosates, de la chlordécone, des pesticides de plus en plus sophistiqués (SDHI), des perturbateurs endocriniens, gaz à effets de serre, montagnes de déchets plastiques, tous ces scandales moins « spectaculaires », mais à bas bruit, tous issus de la chimie, sans compter l’amiante que l’on peut assimiler à ces désastres… Ainsi, selon l’OMS (chiffres de 2004, donc sans doute largement dépassés depuis 15 ans), les produits chimiques dans l’environnement ont provoqué la mort de 4,9 millions de personnes chaque année dans le monde, dont 375 000 exposés sur leur lieu de travail… Catastrophe invisible, puisqu’il s’agit de mort à petit feu de millions de victimes éparpillées, parfois des années après leur exposition…
- Et il y a tous ces effets insidieux qui dégradent peu à peu la vie quotidienne : la pollution pour la respiration, les perturbateurs endocriniens dans l’alimentation et les emballages, les additifs alimentaires qui provoquent diabète, obésité et autres etc. et dont on se rend de plus en plus compte.

Désormais, les catastrophes industrielles et sanitaires sont permanentes et partout. Le terrorisme capitaliste devient visible. Car si les catastrophes sanitaires ont existé de tout temps, la sécurité sanitaire a trente ans seulement, mais aujourd’hui, plus personne ne peut plus dire qu’on ne sait pas. Il faut d’ailleurs souligner à ce propos le rôle positif très important des moyens de communication, des ONG pour l’information et la transparence. Non, il n’y a pas de fatalité, seulement de la négligence et de l’inconscience pour le plus grand profit des capitalistes.

Aujourd’hui, avec les médias modernes, les progrès de la connaissance scientifique, la conscience écologique est bien plus élevée qu’avant. A nous d’en faire une conscience anticapitaliste !

Les questions auxquelles nous sommes confrontés

-  Le capitalisme est un apprenti sorcier, qui joue avec des produits, des molécules et des procédés de plus en plus complexes et de moins en moins contrôlés (ainsi dans la coulée continue en sidérurgie, pourtant fonctionnelle depuis des décennies, il y a des processus chimiques mal connus et instables qui peuvent évoluer en catastrophes). Il faut donc refuser dès le départ la mise en place de processus mal connus et mal contrôlés, et on connaît le problème (par exemple avec les méthaniseurs). Car toujours, toujours, le profit l’emportera sur la prudence pour nos exploiteurs. Le mot d’ordre avancé par le NPA « Nos vies valent plus que leurs profits », est tout à fait correct.
-  Cela suppose la construction d’une expertise indépendante et ouvrière, appuyée sur des experts (il y en a besoin !) contrôlés, en partant du point de vue des exploités. Car en face, la bourgeoisie a des armées d’experts, qui cachent tout, mentent comme des arracheurs de dents pour faire valider leurs projets, on le voit avec Monsanto. Aujourd’hui, par exemple sur tous les sujets de santé au travail et de de toxiques chimiques, on n’en est qu’aux balbutiements de la construction de ce collège d’experts au service de la classe ouvrière. De plus, c’est toute l’information, toute la formation scientifique et politique qu’il faut bouleverser, afin que chacun soit capable d’avoir un avis et donc le contrôle sur sa vie : tous rouges et experts !
-  On ne découvre qu’a posteriori la dangerosité de produits utilisés depuis des décennies (par exemple le pyralène, huile isolante des transformateurs, qui se transformait en dioxine à haute température, ou les pesticides). C’est la conséquence d’une caractéristique fondamentale du capitalisme : il est aveugle sur le futur, ne connaît qu’a posteriori dans la réalisation de la valeur d’échange la réalité des effets physiques dans la réalité matérielle. Donc il est obligé d’attendre la catastrophe pour corriger les effets « indésirables » qu’il constate alors ; c’est par exemple ce qui est en cours avec les nanoparticules qui se développent à toute vitesse hors de tout contrôle, ou la 5G dont les effets sont mal connus sur les organismes vivants.
-  A l’inverse, pour être capables d’anticiper de nouvelles productions, produits, processus, il faut être capables de planifier, d’essayer, de renoncer éventuellement si les risques sont trop grands. Cela suppose une société non pas construite autour de la guerre économique mondialisée et de la quête de la rentabilité maximale, mais sur la satisfaction des besoins réels et démontrés de la majorité de la population, des prolétaires au premier chef. Cela veut dire qu’on n’échappe pas au débat sur l’utilité sociale de la production envisagée ; et débat avant le début de la production, bien sûr. Est-il bien utile de produire des batteries jetables et polluantes ? des plastiques en masse ? des médicaments réservés à la bourgeoisie ? des déchets non recyclables ?
-  Le progrès neutre n’existe pas, n’en déplaise au PC et à Lutte Ouvrière. Le progrès est façonné par la manière dont le capitalisme se développe, à la recherche de la rentabilité maximale dans la guerre économique mondialisée. Le principe que nous avons n’est pas un principe de précaution cher aux écologistes et réformistes de tous poils, c’est un principe de méfiance. Nous sommes anticapitalistes, donc nous SAVONS que les progrès techniques n’ont qu’un seul objectif la rentabilité maximale, et qu’en matière de chimie comme partout, le profit l’emportera toujours sur le risque, quel qu’il soit, même s’il doit y avoir encore des millions de morts silencieux.
-  Le capitalisme à visage humain proposé par tous ces réformistes, plus les écologistes plus ou moins radicaux (Verts, Insoumis…) n’est qu’une plaisanterie qui va nous faire fracasser sur le mur de l’impuissance. Imaginer une « chimie propre », sans parler de capitalisme, ça ne tient pas la route une seconde, chacun.e s’en rend bien compte.
Ce à quoi nous sommes confrontés, ce n’est pas une crise écologique, comme le prétend la pétition lancée par plus de 1000 scientifiques. Ce n’est pas une crise du risque qu’il faudrait apprendre à mieux gérer. C’est une crise en profondeur du mode de production capitaliste, c’est un problème général qui va s’accentuer dans les années à venir, et qu’on ne va pas pouvoir traiter au cas par cas, même si tous les combats partiels sont bien entendus légitimes.

C’est la crise générale du capitalisme et de l’impérialisme, qui détruit l’homme et la nature.

Nous sommes Verts parce que nous sommes Rouges ! Sauf le pouvoir, tout est illusion !

Révolution anti-impérialiste !

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