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A Mayotte, c’est le colonialisme de l’Etat français qui est coupable
Déclaration du 25 décembre 2024
Les ravages du cyclone Chido sont la pire catastrophe naturelle ayant touché un département français depuis l’éruption de la montagne Pelée en Martinique en 1902. En réalité, les Mahorais n’ont pas été victimes du cyclone, mais bien du colonialisme et du sous-développement. Ce sont bien la précarité de l’habitat, la pauvreté, l’impréparation de l’Etat, la méfiance légitime vis-à-vis des autorités coloniales qui ont tué ! Sans parler de l’inaction face au changement climatique, qui aurait décuplé la violence du cyclone. La bourgeoisie est incapable de prendre les mesures drastiques pour protéger de ce genre de phénomène.
Malgré les morts, dont le nombre est d’ailleurs inconnu, entre dizaines et centaines, Retailleau et Macron n’ont pas pu se retenir de se vautrer dans l’indécence et le mépris. Le premier en pointant du doigt l’immigration comorienne. Le second en envoyer balader avec morgue et mépris des Mahoraises mécontentes. A des Bretonnes ou des Niçoises, aurait-il oser dire « Ne vous plaignez pas, si vous n’étiez pas Français vous seriez 10 000 fois plus dans la merde » ? Non, car les Mahorais sont traités comme des sujets coloniaux, ne sont pas considérés comme des Français comme les autres.
Dans les bidonvilles de Mayotte, 60% des chefs de familles sont citoyens français. L’immigration illégale n’a donc pas grand-chose à voir avec le sous-développement de l’île. L’Etat n’a jamais eu de politique de relogement pour les habitants des bidonvilles, quelle que soit leur nationalité. Cela aurait pu sauver de nombreuses vies. Depuis l’opération Wuambushu de Darmanin, ils ont surtout peur de la police et n’ont donc pas fait confiance aux consignes émises avant le passage du cyclone.
La France a gardé Mayotte à l’indépendance des Comores en 1974, au mépris de toutes les règles internationales. Pour maintenir ses ambitions de puissance mondiale, la France a besoin de ces « confettis d’empire » pour servir de points d’appui. Mayotte est située sur le canal du Mozambique une route commerciale majeure, indispensable au trafic entre l’Europe et l’Asie lorsque le trafic sur le canal de Suez est perturbé par les crises au Moyen-Orient. L’archipel abrite par ailleurs une grande base navale militaire et un centre d’écoute secret du réseau « Frenchelon » pour tout l’Océan Indien. Voilà, ce qui intéresse notre impérialisme, voilà pourquoi la départementalisation.
Les élites mahoraises, favorisées par la colonisation, lui ont offert une caution locale. Aujourd’hui elles constituent la fraction diplômée de la population mahoraise qui profite de la création d’emplois publics liée au développement économique de l’île, aux côtés des expatriés de la métropole. Alors que les Mahorais du peuple vivent à 77% sous le seuil de pauvreté, et ceux d’entre eux qui ont cru que le rejet de leur identité comorienne et la départementalisation les feraient définitivement passer du bon côté en sont pour leurs frais. A l’heure de l’austérité budgétaire généralisée, il est évident que le « rattrapage » des infrastructures publiques promis aux Mahorais n’aura pas lieu.
On nous promet un grand plan de reconstruction de Mayotte, mais qui peut y croire, alors qu’on nous promet déjà depuis des années des plans pour « reconstruire » l’Ecole et l’Hôpital ? Ce qui est sûr, c’est que le gouvernement va continuer à pointer du doigt les Mahorais sans-papiers. A la fois pour se défausser de ne pas avoir su protéger Mayotte, justifier l’indigence des secours, et faire le tri, demain, entre ceux qui pourront bénéficier de la reconstruction et les autres.
L’extrême-droite (dont le RN) est majoritaire dans l’île à côté d’une forte abstention, et joue à fond la carte raciste anti-Comoriens en s’appuyant sur cet abandon du département par l’Etat. Elle manipule les masses en leur faisant croire que les immigrés sont responsables de tous les maux, alors que c’est évidemment la volonté impérialiste de maintenir sa domination coloniale et militaire sur cette région du monde qui est en cause.
A Mayotte comme ailleurs la solution n’est pas dans le chauvinisme et la division. Elle est dans la solidarité, solidarité entre Mahorais français et sans-papiers, entre habitants de Mayotte et des Comores, entre Mahorais et Français de métropole. C’est le colonialisme de l’Etat français qui est coupable !
