L’OCML-VP > Cahier N°4 de notre Plate Forme politique

Cahier N°4 de notre Plate Forme politique

700 - La priorité aujourd’hui, c’est de construire un Parti Communiste

710 - Il nous faut un Parti

711 - Un parti : pour quoi faire ?

L’exploitation capitaliste engendre inévitablement la lutte des classes. Celle-ci amène les ouvriers à s’organiser face à leur ennemi. De manière différente selon les périodes de l’histoire et les régions du monde, les exploités ont toujours compris qu’il fallait se regrouper pour se défendre.

Au delà des organisations de masses, destinées à assurer la défense de leurs intérêts immédiats, ils ont cherché à constituer des partis politiques. La plupart des tentatives révolutionnaires n’ont pu voir le jour que parce qu’il existait de tels partis. La question aujourd’hui, au vu des erreurs et des échecs passés, c’est : de quel type de parti avons-nous besoin, et pour quelle alternative ? C’est là une question bien vivante, malgré le reflux.

On n’a pas besoin d’un parti pour organiser la révolte. Avec ou sans organisation, elle éclatera toujours. Par contre, si l’objectif est d’en finir avec l’exploitation capitaliste et d’instaurer le communisme, on ne peut s’en passer. La nécessité d’un parti n’est pas fondée sur les exigences immédiates de la lutte, mais sur le but final que l’on veut atteindre.

712 - Quel parti pour aujourd’hui ?

Le communisme n’est pas la suite inéluctable du capitalisme, dont il suffirait d’attendre la venue. Il est au contraire le fruit de son renversement conscient et organisé. Cela implique l’étude théorique et le bilan du passé, l’élaboration de programmes, une analyse du capitalisme et une vision de l’avenir, une grande clairvoyance dans les méandres de la lutte des classes pour conserver le cap du communisme, une direction pratique de la lutte politique et de la lutte armée, etc...

Le parti construit peu à peu l’orientation nécessaire à la libération des exploités. Et cela sur la base des délimitations essentielles que sont : l’anti-impérialisme, le fait de mettre la politique au poste de commande, une compréhension claire de ce qu’est la transition socialiste et du rôle de la classe ouvrière, le rejet du pacifisme...

Laconstruction d’une organisation communiste est la première étape de la construction d’un parti ouvrier. Elle se heurte à deux conceptions fausses, que renforce la situation actuelle de reflux. Face à l’immensité de la tâche, et à l’absence d’alternative crédible au capitalisme, beaucoup de militants se réfugient dans des combats sectoriels qui répondent à une nécessité immédiate : lutte contre le racisme, contre l’extrême droite, etc. D’autres, moins nombreux, se contentent de diffuser des idées, de commenter l’actualité.

Dans les deux cas, qui peuvent d’ailleurs aller de paire, les camarades repoussent la prise en main d’un travail d’organisation communiste. Les activités parcellaires qu’ils privilégient sont d’autant plus soumises à la pression idéologique et politique du reflux. Le manque d’ambition politique dont elles relèvent n’aboutit qu’à stériliser des forces.

Ces perspectives détournent nombre de camarades des confrontations politiques, et donc de la construction d’une organisation. Elle seule, pourtant, leur offrirait le cadre collectif dans lequel ils pourraient développer l’alternative politique révolutionnaire dont ils déplorent par ailleurs l’absence.

720 - Prendre cette tache en main aujourd’hui,qu’est-ce que cela signifie ?

721 - Organiser autour d’une ligne politique en développement.

La structure et le fonctionnement du parti sont modelés par ses objectifs : la révolution prolétarienne et le communisme, et par les moyens à mettre en oeuvre pour y parvenir ; l’ensemble se traduisant dans sa ligne politique. Même à long terme, ces objectifs conditionnent dès aujourd’hui la construction d’une organisation communiste. Entre la ligne politique de l’organisation communiste, puis du parti, et leur édification, il existe un rapport dialectique.

Ce rapport n’est pas exempt de contradictions. Car l’organisation n’est ni coupée de la société, ni immunisée contre la réalité impérialiste dans laquelle nous baignons et que nous combattons. Elle est constituée d’individus qui ont des origines diverses, et des situations différentes dans la division sociale du travail. Néanmoins, avec ces moyens-là, nous cherchons à instaurer une société totalement nouvelle, sans classes, sans domination, et sans oppression. Dans cette relation contradictoire, c’est la ligne politique qui joue le rôle déterminant. Les règles de l’organisation aussi sont l’expression de ses buts.

L’objectif de l’organisation étant l’émancipation de la classe ouvrière dans la perspective du communisme, elle doit combattre les effets de la division du travail pourtant nécessaire en son sein. Il faut qu’elle renforce sans cesse son lien aux masses. Les inégalités : entre intellectuels et manuels, entre dirigeants et dirigés, entre hommes et femmes... ne peuvent être éliminées sous le capitalisme, et elles ne disparaîtront que très progressivement sous le socialisme. La lutte contre ces

inégalités doit donc être permanente au sein de l’organisation. Dans ce but, son fonctionnement ne traite pas tous les militants sur un pied d’égalité. Il dooriser, par des mesures "inégalitaires", ceux que la société capitaliste a le plus écrasés De même, la concurrence, l’individualisme ou l’élitisme doivent y être bannis.

La stratégie de la révolution prolétarienne passe par un affrontement avec l’État bourgeois qui s’appuie sur la violence des masses opprimées. Cette violence doit être dirigée par l’avant-garde du prolétariat. Dès aujourd’hui, la lutte des classes et la lutte contre les interventions impérialistes imposent à l’organisation communiste d’assumer l’illégalité et la violence. Sous l’impérialisme, la liberté politique des exploités est relative ; l’activité ouverte et pacifique est donc toujours conditionnelle et provisoire.

L’abolition de l’oppression nationale et celle des frontières, de-même que la lutte contre le chauvinisme... passent par le regroupement dans l’organisation de tous les ouvriers, quelle que soit leur nationalité. Cela se fait en favorisant la réflexion sur les tâches révolutionnaires dans les pays d’origine et par la confrontation avec les autres organisations communistes de par le monde, dans l’optique de s’unifier et de construire une nouvelle Internationale.

Une organisation qui ne développe pas dès aujourd’hui une pratique anti-impérialiste, qui ne confronte pas ses positions avec celles des militants étrangers, risque de développer une ligne qui s’éloigne de l’internationalisme ; voire des positions européo-centristes.

Le fonctionnement de l’organisation a aussi une influence sur sa ligne. Notamment sur sa capacité à faire le bilan des expériences passées, à tirer parti de sa pratique directe et, plus généralement, de toute pratique sociale. Les tendances bureaucratiques, le fédéralisme, ou la faiblesse de son implantation dans la classe ouvrière, limitent sa capacité à élaborer une ligne politique révolutionnaire en rupture avec le réformisme.

722 - Dégager une nouvelle avant-garde.

Dans la période actuelle, l’heure n’est pas à rallier les larges masses à la perspective de la révolution, mais à construire le parti nécessaire à cet objectif. Cela implique de regrouper l’avant-garde ouvrière et militante.

Le terme "avant-garde" n’a aucun sens élitiste. Il n’établit pas une distinction entre bons et mauvais militants. Il reflète simplement le fait que, dans la société capitaliste, vu l’influence du réformisme spontané et organisé, seule une minorité peut percevoir les enjeux historiques du combat contre l’exploitation. Ces militants constituent l’avant-garde des masses, précisément dans la mesure où ils n’en sont pas coupés, mais où ils en représentent la fraction la plus lucide. C’est par le regroupement de ces éléments qu’il faut commencer la construction du parti.

Regrouper l’avant-garde, cela ne signifie pas pour l’essentiel, dans la période actuelle, rallier des militants qui existeraient déjà et qu’il suffirait de convaincre de la justesse de notre orientation. Nous ne devons pas exclure un tel travail. Mais force est de constater que de tels militants sont rares aujourd’hui. Ils sont souvent désorientés, découragés et réduits à l’impuissance.

Regrouper l’avant-garde, cela signifie principalement : dégager, former, éduquer en militants communistes les éléments avancés de la classe ouvrière et du mouvement de masses : tous ceux qui se distinguent, par leurs interrogations, leurs prises de positions, leur clarté de vue sur telle ou telle question : contre le chauvinisme, le nationalisme, le patriotisme d’entreprise et la cogestion, contre le réalisme économique, le pacifisme, le sexisme, etc.

Le critère principal pour distinguer ces éléments avancés est un critère politique, et non pas de plus ou moins grande radicalité dans les conflits. Tant chez les ouvriers que pour les rebelles dans les prisons ou les jeunes des cités, on ne peut conclure à l’existence d’un haut niveau politique, du seul fait de la radicalité des mouvements. Une telle confusion, déjà souvent commise par le mouvement révolutionnaire dans le passé, ne conduit qu’à des erreurs tactiques et stratégiques graves, et donc à l’échec.

La formation de militants communistes ne se réduit pas non plus à la formation
théorique. Elle passe par une pratique politique en direction des masses.
Dégager une avant-garde ouvrière, c’est former des hommes et des femmes capables
dans la pratique de maîtriser les orientations, de faire des choix, d’avoir
de l’initiative, et de tirer des bilans. C’est le meilleur moyen d’enrichir
l’activité et de mesurer les qualités, les acquis et les limites de chacun.
C’est ainsi que chaque militant prend sa part dans l’élaboration de la ligne,
au lieu de subir des directives venues d’en haut.

723 - Prolétariser l’organisation.

La classe ouvrière ne peut se libérer sans détruire toutes les formes d’exploitation et d’oppression. Et cela doit se traduire dans le travail d’organisation. Le travail ouvrier doit être la colonne vertébrale de tout le travail politique. Les efforts doivent porter, avant tout, en direction de la classe ouvrière : construction d’organisations de masses à divers niveaux ; formation politique des ouvriers qui revêt un caractère décisif, d’où l’importance des écoles ; transformation du style de travail de l’organisation... La priorité ouvrière n’est pas un prétexte populiste, mais la conséquence de notre lutte pour une société sans classes.

Dans une organisation fortement marquée par l’origine petite-bourgeoise de ses militants les plus anciens, cette prolétarisation est un impératif. Cela a pour conséquence d’imposer aux camarades non ouvriers des choix de vie, de travail et de logement, qui permettent de renforcer les liens de l’organisation avec la classe ouvrière.

724 - Lier la théorie et la pratique.

Le travail de construction du parti ne peut se faire en dehors de la lutte des classes. C’est par le travail d’organisation et la délimitation dans cette lutte des classes que se forgent les meilleurs dirigeants. Cela nécessite à la fois une pratique de classe et un important travail d’étude pour guider cette pratique. Ce travail d’étude est nécessaire, en particulier, pour faire le bilan des expériences passées tant positives que négatives, pour apprécier le rapport des forces à chaque moment et dégager la meilleure tactique pour avancer vers nos objectifs stratégiques.

Si la politique est au poste de commande, seules l’étude et la théorie peuvent permettre de faire le lien avec la perspective communiste. La théorie guide la pratique, qui en retour l’enrichit. Il ne faudrait pas réduire pour autant le travail d’étude à la théorisation de la pratique immédiate. Tout un volet de ce travail nécessaire possède une certaine autonomie : que ce soit le bilan des expériences socialistes, la définition de la stratégie, l’analyse des contradictions et des évolutions mondiales, etc... Il sera en définitive décisif, lorsque l’actualité politique imposera de se situer concrètement.

725 - Faire vivre l’histoire.

L’organisation aujourd’hui, et le parti que nous voulons construire demain, doivent faire vivre l’histoire. Ils représentent la mémoire ouvrière et communiste des expériences passées ; des révoltes anti-coloniales, anti-capitalistes, anti-impérialistes... Face aux tentatives de ré-écrire l’histoire selon des critères bourgeois, face à l’absence de mémoire des jeunes générations, l’organisation et le parti ont la responsabilité importante de transmettre cet héritage.

Faire vivre l’histoire, c’est aussi en tirer des leçons pour s’orienter dans le présent et construire le futur. Les positions que nous avançons aujourd’hui ne surgissent pas du néant. Elles sont le fruit du travail politique de nos prédécesseurs et du bilan de leurs difficultés. Nous-mêmes, comme les communistes du monde entier, apportons notre contribution à cette élaboration. On ne peut faire table rase de l’histoire, jeter le bébé avec l’eau du bain, imaginer de repartir à zéro... Ce serait liquider toute une expérience précieuse et recommencer des erreurs déjà commises.

726 - Centralisme et démocratie sont-ils incompatibles ?

Le fonctionnement d’une organisation selon le principe du centralisme démocratique est indispensable, tant pour l’élaboration de la ligne politique que pour l’action :

Pour l’élaboration, car celle-ci se fait à partir de l’expression des expériences et des idées. Elle doit être rendue la plus facile possible. Mais il est nécessaire qu’il y ait confrontation et qu’un point de vue général se dégage, au de-là des cas particuliers. Il faut donc une centralisation, sur la base de la démocratie.

Pour l’action, car l’orientation politique de l’organisation doit être assumée et traduite en pratique par chaque militant. Transformer la réalité sociale ne peut se faire qu’à travers une action collective unifiée.

Centralisme et démocratie sont nécessaires, mais de plus ils sont liés :

Il ne peut y avoir de véritable centralisme sans démocratie. La centralisation autoritaire et bureaucratique ne recueille pas la véritable expression de la base et ne peut donc pas permettre de connaître la réalité. Dans ce cas, la base a plutôt tendance à ne faire remonter que ce qui convient à la direction bureaucratique. Ce n’est donc pas seulement un problème d’absence de démocratie. Cela conduit à l’inefficacité. Dans ces conditions, il ne peut pas y avoir de direction juste.

Il ne peut y avoir de véritable démocratie sans centralisme. Un individu ne peut pas connaître la réalité à travers sa seule expérience, ni encore moins la transformer seul. Il n’y a pas de connaissance ni de pratique efficace sans la centralisation des expériences multiples.

Il faut donc faire coexister deux processus qui forment un tout, et qui constituent un principe de fonctionnement, mais qui s’opposent aussi dans leurs exigences. D’où certaines déviations qui ont marqué le mouvement communiste, et les expériences négatives de nombreux militants. Il y a eu des organisations où le centralisme était bureaucratique ; où il conduisait au monolithisme, soit par suivisme, soit du fait de l’exclusion des opposants. Il y a eu, par réaction, des organisations "libérales", dans lesquelles les débats étaient permanents, mais jamais conclus ; où les décisions n’étaient pas appliquées par tous. Cela les a conduites à la stagnation, à l’impuissance, et à l’éclatement.

La base du centralisme démocratique, c’est l’expression large et permanente des idées et des critiques. C’est ce qui permet de progresser, à travers la confrontation, l’expérience, et le bilan. Les idées nouvelles ne sont pas toujours admises immédiatement. Elles doivent s’opposer aux habitudes, aux positions acquises, et tout simplement être étudiées et vérifiées avant d’être acceptées. Toute idée nouvelle n’est pas forcément juste, mais il faut qu’elle puisse circuler, être débattue et qu’une position soit prise. C’est un processus qui exige l’ouverture au débat, et l’organisation collective de celui-ci : bulletins internes, prises de positions des diverses structures, etc.

Un tel fonctionnement, s’appuyant sur un débat sérieux, loin d’affaiblir et de diviser l’organisation, est le meilleur moyen de renforcer son unité et de traiter le plus tôt, et dans les meilleures conditions possibles, les éventuels désaccords. Cela permet d’éviter que ceux-ci ne s’aggravent et deviennent des oppositions plus profondes et systématiques.

Lorsqu’une position a été arrêtée, un point de vue juste peut être minoritaire. Autrement dit, la majorité peut se tromper. Aussi rejetons-nous le monolithisme, politique qui n’admet qu’une position dans une organisation communiste... et défendons-nous les droits de la minorité. La pluralité des positions a été fréquente dans les partis communistes, contrairement à l’image que nous en conservons souvent. Lénine et Mao ont été parfois minoritaires, sur des positions justes, dans leur parti.

Des positions différentes doivent donc pouvoir se manifester, et être défendues. Et pour cela, elles doivent avoir la possibilité de s’organiser lors des débats importants, par exemple avant un congrès. Ne pas reconnaître cette possibilité, c’est donner un poids écrasant, décisif, aux instances en places, tout en poussant à la pratique de fractions. Une fois le débat clos, s’il y a une minorité, elle doit accepter et appliquer la position majoritaire.

Par contre, on ne peut admettre l’organisation permanente de courants en tendances. Cette pratique a pour effet de multiplier les luttes d’appareil, de figer les positions, et d’empêcher tout bilan correct de la pratique.

Les divergences peuvent se cristalliser en orientations opposées, ensembles de positions cohérentes et systématiques ou systèmes d’idées qui s’affrontent. Il s’agit alors d’une lutte de lignes. Celle-ci n’est pas forcément antagonique. Elle peut porter sur les grandes questions tactiques ou organisationnelles, comme par exemple l’importance respective à donner au travail théorique et au travail politique. Mais elle peut aussi prendre un tour stratégique, sur des enjeux essentiels, comme la lutte armée ou le choix d’une démarche de type "alternatif". Dans tous les cas, l’organisation doit assumer cette lutte de lignes avec le souci de porter l’unité politique et idéologique à un niveau supérieur.

La règle de la majorité, mais aussi celle des droits de la minorité, s’appliquent également dans le cas de la lutte de lignes, même si les conséquences en sont plus difficiles à assumer pour la minorité. En tous cas, le critère principal pour savoir si l’unité de l’organisation sera maintenue, c’est la mise en oeuvre de la ligne majoritaire. Si cela n’est pas possible, la seule issue est le départ ou l’exclusion de la minorité.

Il y a donc différents niveaux de contradictions, qu’il faut traiter de manière

spécifique. Au niveau des idées, en fonction de l’histoire, de l’expérience, de la formation, de l’origine sociale des uns et des autres. Au niveau du point de vue sur des choix tactiques, sans que cela empêche de faire une expérience dans l’unité. Ou encore, au niveau d’une opposition ayant un caractère systématique et général, entre deux lignes politiques. Dans tous les cas, on doit chercher à retrouver l’unité, au sens d’un dialogue réel, constructif, d’une confrontation des arguments. Mais l’unité n’est pas un but en soi, qu’on vise à tout prix. C’est parfois la scission qui permet de faire un pas en avant.

727 - Quels dirigeants ?

Les inégalités qui résultent de la division du travail dans la société ont leur reflet dans l’organisation. Tout en sachant que l’abolition des inégalités dans la société est impossible dès la prise du pouvoir, nous luttons d’emblée pour leur réduction. Un parti ne peut fonctionner sans dirigeants. Mais nous devons combattre l’inégalité dirigeants-dirigés.

Le courant anarchiste et libertaire refuse le principe même des dirigeants, considérés par définition comme des bureaucrates. Un tel refus aboutit en réalité à l’existence de dirigeants de fait, non élus, dont le contrôle est bien plus difficile.

A l’opposé, certains courants issus du marxisme-léninisme font du dirigeant le symbole de la ligne et de l’orientation ; cela pouvant aller jusqu’au culte de la personnalité. Une telle attitude aboutit à dépolitiser les militants, à empêcher les contradictions de s’exprimer. Elle renforce les rapports d’inégalité au sein du parti.

Les dirigeants sont indispensables, dans les tâches d’organisation, comme dans l’élaboration de la ligne. Mais ils doivent être contrôlés par les militants, et ne jouir d’aucun privilège politique, ni matériel bien sûr. Encore plus que les autres membres de l’organisation, ils doivent se soumettre à la critique et à l’autocritique. Les dirigeants, aussi prestigieux soient-ils, ne sont pas nommés à vie. Ils doivent être révocables. Il est même souhaitable que le maximum de camarades possible assument tour à tour des fonctions dirigeantes.

Les dirigeants ne doivent pas se borner à lancer des directives. Ils doivent enquêter sur le bien-fondé de celles-ci, sur la façon dont elles sont reçues, et suivre leur mise

en oeuvre. Ainsi, ils continuent d’apprendre, ils mesurent les difficultés, ils sont mieux aptes à promouvoir bilans et rectifications. Le caractère collectif et solidaire de l’organisation se renforce.

728 - La place de chaque militant.

Le premier des objectifs de l’organisation est de former des militants responsables, capables de s’orienter par eux-mêmes dans la lutte des classes, et de contribuer à l’enrichissement de la ligne. La formation est un objectif permanent. Il ne suffit pas d’affirmer que les militants doivent contrôler les dirigeants ; encore faut-il qu’ils en soient vraiment capables. L’organisation doit, dans son fonctionnement, donner les moyens à chacun, et en particulier aux militants ouvriers, d’être réellement partie prenante de la ligne de l’organisation ; et cela par les plans de travail, par le rythme d’activité, la préparation et le déroulement des débats. En ce sens, le militant n’a pas seulement le droit à la critique et à l’auto-critique ; il en a le devoir !

Le rôle et la place tenus par chacun sont essentiels dans l’organisation. Aucun militant ne doit être un rouage anonyme, un individu noyé dans le collectif. Il n’est pas seulement celui qui porte l’orientation dans les masses, mais aussi celui qui l’élabore.

L’appartenance à l’organisation peut entraîner une contradiction entre les désirs personnels et les tâches exigées par elle. L’organisation doit tenir compte des contraintes personnelles de chaque militant, comme les charges familiales par exemple. Mais elle ne peut accepter que les conséquences de choix faits individuellement s’imposent aux autres camarades de l’organisation. Les choix personnels impliquant des conséquences sur l’activité collective : choix de travail, de logement, etc... doivent être discutés au cas par cas, en regard des objectifs de l’organisation ; et entre autres de sa prolétarisation.

Le militant individuel n’est pas broyé par la centralisation. Il se soumet à des choix collectifs, auxquels il participe, en sachant que ses difficultés ou ses problèmes ne seront pas escamotés.

730 - Où en sommes-nous aujourd’hui ?

731 - Contre la logique des combats partiels.

A l’heure actuelle, nombre de militants qui se réclament, en général, du communisme, en restent à l’intervention dans les combats partiels. Plus même : ils considèrent que la construction du parti n’est pas d’actualité, dans la mesure où la période ne s’y prête pas. Ils proposent de s’en tenir à accumuler des forces dans les luttes immédiates, dans l’espoir de pouvoir un jour constituer une force politique.

Gros consommateurs par ailleurs du travail théorique et politique des organisations, ils jugent inutile de s’y investir, en argumentant sur la faible influence de celles-ci dans les masses.

C’est une position individualiste. C’est mettre au premier plan la lutte, et non le communisme. C’est ne voir que l’immédiat, et non l’avenir. C’est laisser le champ libre au rouleau compresseur idéologique de la bourgeoisie.

732 - Attendre la perfection ?

D’autres camarades se réclament de la construction du Parti, mais considèrent que ce n’est pas d’actualité, dans la mesure où les bases théoriques et politiques pour le constituer sont insuffisantes.

Ces insuffisances sont bien réelles. Certaines, par exemple, sont relevées dans cette plate-forme. Et, de ce point de vue, nous n’en sommes effectivement pas encore à la constitution du Parti.

Mais la question est de savoir comment nous allons les combler, pour avancer vers cette construction. En petits cercles théoriques coupés de la réalité ? C’est la porte ouverte à tous les dérapages. En repartant de zéro ? Sur quelles bases, avec quelle unité de départ ? C’est la porte ouverte à l’impuissance, dès qu’apparaîtront les premières contradictions.

La seule manière, c’est de construire une organisation qui assume précisément la tâche de combler ces insuffisances, qui se fixe des plans de travail, qui élabore peu à peu. Attendre, c’est se couper les bras. Plus le temps passe, plus l’offensive idéologique de la bourgeoisie se fait insistante. Plus les points de repères historiques s’évanouissent. Seul le cadre collectif, organisé, centralisé, permet de maintenir les acquis et de les enrichir.

733 - S’unir à partir de cette plate-forme.

Le travail de construction du parti ne peut se satisfaire d’une conception artisanale et partielle. Même à une toute petite échelle, c’est l’ensemble des tâches de construction qu’il faut prendre en mains. C’est leur articulation et leur équilibre, difficiles à maintenir et toujours remis en cause, qui donnent la cohérence à ce projet. Des plans de travail à long terme sont indispensables pour dépasser l’empirisme et unifier l’organisation.

La construction d’une organisation ne s’improvise pas. Elle ne tombera pas toute cuite. Il faut s’y mettre sérieusement. Voie Prolétarienne existe depuis quinze ans. Nous avons décidé, il y a trois ans, de rédiger cette plate-forme. Et cela pour deux raisons :

D’une part, parce que la précédente plate-forme datait de 1977, et qu’elle était largement dépassée. Depuis, tous les éléments d’élaboration étaient éparpillés au fil de nombreux documents. Une centralisation était nécessaire pour savoir où nous en étions, pour affirmer nos ambitions. Cette plate-forme est un pas en avant. Elle montre non seulement que nous avons survécu, alors que le mouvement marxiste-léniniste s’effondrait, mais qu’en plus nous avons été capables d’enrichir le programme de la révolution.

D’autre part, parce que c’est l’occasion de confronter nos positions avec tous les camarades sincèrement attachés au projet communiste et à la reconstruction du Parti de la Classe Ouvrière. Nous allons de l’avant. Nous faisons des propositions dans ce sens. A chacun de décider comment il y répond.

Soutenir par un don