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A Lyon, vigoureux mouvement de la jeunesse, et féroce répresion policière

Partisan N°244 - Janvier 2011

Cet article est un supplément web à Partisan n°244 de janvier 2010.

Du 14 au 21 octobre, avant la grève à la raffinerie de Feyzin et alors que dans l’ensemble leurs professeurs se contentent de participer aux journées nationales syndicales, les lycéens de presque tous les lycées de la région entament un mouvement dur de blocus des lycées. A la pointe de ce mouvement largement spontané, les élèves des principaux lycées de banlieue (Décines, Vénissieux, Bron) et des lycées de Lyon largement fréquentés par des enfants de prolétaires.

Chaque jour, des cortèges de jeunes descendent de leurs lycées, pour investir le centre ville, se regrouper et manifester à partir de la place Bellecour. Ils manifestent un ras l’bol général et politique contre la société injuste et l’avenir de précarité qu’elle leur réserve. Dès le début, ces cortèges sont harcelés par des policiers qui les suivent partout. Mais dès le début aussi, certains de ces jeunes montrent qu’ils n’ont pas peur d’affronter la police (jets de pierre, poubelles puis quelques voitures brûlées ou retournées). Ce sont des formes de protestation de la jeunesse des quartiers populaires qu’on ne voit pas d’habitude à l’œuvre en centre-ville. Les médias montent au créneau contre « les casseurs », surtout après la journée du 19 octobre où des commerces du centre-ville (jeux vidéo…) sont pris pour cible par quelques groupes qui ont autant envie de se servir que de s’amuser (« 9 commerces pillés, 8 dégradés » de source officielle). La masse des lycéens hésite entre désaveu et solidarité, mais la solidarité l’emporte d’autant plus facilement que la répression prend des proportions inédites : hélico pendant 4 jours au-dessus du centre-ville, renfort du GIGN, camions anti-émeutes, 286 interpellations à Lyon pour 2 554 dans le pays du 12 au 25 octobre.

André Gérin, ex-maire PC de Vénissieux, se déchaîne comme à son habitude, mais ses propos n’ont pas grand écho : « Des individus sans foi ni loi, qui pourrissent quotidiennement la vie de la cité, ont mobilisé et organisé la violence, le pillage et la casse. Il s’agit de trafiquants de drogue, de mafias et d’intégristes ». La question de la violence des manifestants est à l’ordre du jour, mais les juges notent qu’ils n’ont pas affaire à des casseurs professionnels mais bel et bien à des manifestants de tout âge et d’horizons différents ; l’un d’eux parlera de « délinquance d’aubaine ».

Le sécuritaire toujours plus à l’ordre du jour !

Le 20 octobre, Hortefeux est à Lyon. Dès le 20 au soir, des manifestants sont bloqués sur un pont et ne peuvent en sortir qu’après contrôle d’identité. Le jeudi 21, plusieurs centaines de jeunes sont encerclés sur la place Bellecour, pris dans la nasse policière durant 6 heures, subissant invectives, tirs de grenades lacrymogènes, de flash-ball, jets d’eau froide. Sauf exceptions, pour quelques blancs de peau, ils ne sortiront de la nasse que le soir, un par un, après s’être soumis à contrôles de papiers, et prises de photos.
Bavure que cet après-midi de répression ? Les associations de défense des droits de l’homme, regroupées dans un Collectif 21 octobre, voudraient le faire reconnaître comme tel, demandant une enquête et des poursuites au procureur. Sauf que c’est ce même procureur qui a donné son autorisation pour que l’opération ait lieu en vertu d’un texte très légal déjà souvent appliqué pour traquer les sans-papiers. Des magistrats l’ont eux-mêmes fait remarquer lors du meeting de protestation très réussi du Collectif 21 octobre : l’Etat policier qui a sévi ce 21 octobre contre une manifestation de jeunes en plein centre-ville a déjà pris l’habitude de ces actions de bouclage au détriment des populations les plus stigmatisées : sans-papiers et jeunesse des cités.

A Lyon, mais pas seulement !

Le mouvement de la jeunesse a touché toutes les villes de France, y compris de très petites, et majoritairement sous cette forme dure d’action que constitue le blocus. Quant à la violence policière, les lycéens de Montreuil, les grévistes de Gandrange, et bien d’autres, en ont aussi fait les frais. Dans la nuit du 29 au 30 novembre, Mahamadou Marega, un sans-papiers malien, est mort après avoir reçu 2 décharges de taser dans une cage d’escalier.
Parallèlement, le gouvernement peaufine ses lois de répression : LOPPSI 2, loi Besson. L’Etat policier s’organise pour prévenir et contrer les révoltes populaires qui se produiront inévitablement au fur et à mesure de l’approfondissement de la crise capitaliste.

Et nous ? Il nous faut être à la hauteur de la situation. Nous avons besoin de forces dans le mouvement ouvrier, mais sans ignorer les mouvements de la jeunesse que nous devons orienter vers la liaison avec les forces vives du mouvement ouvrier. N’ignorons pas non plus les mouvements démocratiques contre la répression ! La situation nous est très favorable pour faire prendre conscience de la cohésion de l’appareil d’Etat au service des intérêts capitalistes (le gouvernement, les lois, la police, la justice) et pour contrer les illusions réformistes sur la possibilité d’un Etat capitaliste plus juste et humain. Face à la violence organisée de la bourgeoisie pour empêcher tout changement de société, affirmer la légitimité de la violence révolutionnaire organisée et ciblée, c’est aussi développer parmi et autour de nous le débat sur les formes de violence contestatrices déjà à l’œuvre, ainsi que sur le pacifisme prôné ailleurs, et l’étape actuelle de la révolution en France.

VP Lyon

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