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Islam et christianisme

Partisan N°162 - Décembre 2001

On entend trop souvent : « L’Islam est plus barbare que le Christianisme ». Et même lorsque ce n’est pas exprimé aussi ouvertement, c’est l’impression générale qui ressort de bien des points de vue. Un peu comme quand on entend « je ne suis pas raciste, mais… ». Pourtant, bien des atrocités ont été commises au nom de l’une ou l’autre de ces religions. Bombarder des civils en disant « God bless America » (« que Dieu bénisse l’Amérique ») ou commettre des attentats aveugles au nom d’Allah, faut-il choisir le moins pire ?

Les Bibles utilisées par les trois religions occidentales sont des documents historiques très riches pour comprendre les époques à laquelle elles ont été écrites. Les textes les plus anciens nous évoquent des sociétés nomades qui se sédentarisent progressivement, des sociétés où l’esclavage est omniprésent, ainsi que la polygamie, une justice de type « œil pour œil, dent pour dent », avec mutilations physiques, etc. Tout cela est « barbare » au sens où cela ne correspond plus ni à notre société, ni à notre idée de la Liberté, de la Justice, etc.

Comment ces textes peuvent-ils alors encore aujourd’hui être des références ? Tout est question d’interprétation. Les croyants d’aujourd’hui estiment que ces textes sont des « paraboles », c’est-à-dire qu’il ne faut pas les prendre à la lettre, mais y voir des images, des métaphores, qui guident les bonnes actions. Les textes ajoutés au texte d’origine de la Bible sont remplis de ces interprétations nouvelles, et sont les marqueurs de sociétés très différentes (féodales) des sociétés nomades de la Genèse. La façon d’appliquer la religion aujourd’hui dans les églises, les mosquées ou les synagogues sont aussi extrêmement liées à la situation sociale dans laquelle nous vivons : la société capitaliste.

Bref, aucune de ces religions n’est, à la base, moins « barbare » qu’une autre, vu l’importance de leurs bases communes. Par contre, ce sont les sociétés avec toutes les inégalités (de pouvoir, de richesse) qu’elles entretenaient qui est à l’origine des actes inadmissibles commis au nom des religions. Et c’est encore vrai aujourd’hui dans la société capitaliste.

Religions des pays impérialistes, des pays dominés

La plupart des pays impérialistes (USA et Europe, écartons le cas particulier de l’Asie) ont pour religion dominante la religion chrétienne. Israël est un cas à part, étant un pays impérialiste récent et secondaire (la religion juive était dominée avant 1948) L’Islam est quant à lui une religion des pays dominés. Cela a bien sûr une énorme influence sur la façon dont sont utilisées ces religions, et sur la façon dont elles sont perçues.

Il n’est donc pas étonnant que beaucoup, dans les pays impérialistes, anciens pays colonisateurs, qualifient l’Islam de « barbare », tout comme ils méprisent les peuple dominés (racisme, mépris de leur culture, etc.). Inversement, dans les pays dominés, l’Islam est perçu comme outil de résistance à la culture occidentale, qui veut s’imposer partout. Il y a souvent identification entre agression des pays dominés et agression de l’Islam.

D’un côté comme de l’autre, beaucoup de personnes tombent dans le piège du prétendu « conflit de civilisation », alors que le véritable conflit est impérialiste. Cela conduit à des barbaries ignobles au nom de l’une ou l’autre des religions. Les classes dominantes de chaque pays (ou certaines de leurs fractions) y trouvent leur intérêt, de Bush qui bombarde au nom de « God bless America » aux intégristes musulmans qui massacrent en Algérie ou ailleurs, en passant par les dirigeants israéliens qui mitraillent les Palestiniens.

Il faut donc casser les préjugés sur l’Islam, tout comme sur les autres religions. De nombreux croyants musulmans, chrétiens ou juifs sont des personnes sincères : voulant le bien autour d’eux, très respectueuses de la vie d’autrui. Certains deviennent même révolutionnaires, malgré le fossé qu’il y a entre l’athéisme communiste et leur conceptions religieuses. Mais beaucoup d’autres, même parmi les athées, se laisser entraîner dans un sentiment de supériorité concernant leur culture et soutiennent les actes même les plus ignobles (bombardements, ou attentats aveugles et réactionnaires). Nous devons combattre sans relâche ces idées fausses. Ce n’est qu’ainsi qu’il sera possible de s’attaquer à la vraie source du malheur : les inégalités sociales du capitalisme au stade impérialiste