Editorial : C’est l’époque de notre "démocratie" !

2022, invasion de l’Ukraine par l’armée russe. 2023, nouvelle Nakba en Palestine. 2025, réélection de Trump aux USA. Guerre en Europe, génocide sous nos yeux, et fascisme à la tête du pays qui est à la tête du capitalisme mondial ! Mais dans quelle époque entrons-nous ?

Pour comprendre cette époque, il est utile de connaître Marx et Lénine. Si on se reporte un siècle en arrière, le constat de L’impérialisme stade suprême était le suivant : le partage de la planète est terminé et un repartage entre impérialistes ne peut se faire que par la guerre. Il est vrai que le partage d’alors était territorial, celui de monopoles coloniaux. Aujourd’hui les limites sont écologiques et économiques, ce sont celles de la mondialisation et du taux de profit. C’est le cœur du capitalisme qui est malade. Il était plus facile, depuis 1945, de se concurrencer à l’amiable, arbitrés par l’ONU, par l’OMC, tant que le gâteau grossissait. Mais quand la croissance se grippe, les instances de la « communauté internationale » sont foulées au pied par les Poutine, Trump, Netanyahou et autres. C’est le retour de la loi du plus fort, du vol et de la violence ; du fascisme.

Que faire dans cette nouvelle conjoncture ? C’est là qu’il faut se souvenir de Marx, et revisiter les années 1930. Il ne faut pas oublier le rôle pionnier du PCF (à côté d’autres comme le PCI en Italie ou le PCP au Portugal). Après une mise en avant de la classe ouvrière d’une manière un peu sectaire, « classe contre classe », c’est, à la suite du VIIe congrès de l’Internationale, et face au danger fasciste, l’alliance avec les socialistes, l’abandon du programme ouvrier et communiste pour celui de la petite-bourgeoisie, la démocratie. La démocratie, c’est bien l’acquis menacé, apparemment.

Sauf que « un se divise en deux », toujours. Il y a deux démocraties, comme il y a deux résistances. La gaulliste et la communiste. Regardez ceux qui sont en première ligne. Les Ukrainiens doivent-ils résister pour sauver leurs oligarques nationaux, c’est-à-dire leurs capitalistes ; pour s’intégrer à l’OTAN et à l’Europe, aux USA et au capitalisme ? Ce n’est pas le point de vue des syndicats et du Sozialnyi Rukh, le Mouvement Social ou des camarades communistes du KSRD. Les Palestiniens de Gaza ont manifesté contre le Hamas, et parlaient du Front Populaire. Ils ont raison, la seule perspective n’est pas l’intégrisme islamique, le racisme anti-juif et une dictature sexiste. Aux USA, les travailleurs, les jeunes, les militants ne peuvent pas se contenter de défendre une perspective démocrate, les Joe Biden et Kamala Harris. Voter Chirac ou Macron pour défendre la démocratie, ça suffit ! Alors, que faire ?

Chargés de rédiger le programme du parti communiste en 1847, Marx et Engels commencent par ces mots : « L’histoire de toute société jusqu’à nos jours est l’histoire de luttes de classes… une guerre ininterrompue, tantôt ouverte, tantôt dissimulée... ». La démocratie, c’est la guerre de classe dissimulée.
Vous voulez rester dans la dissimulation ? La démocratie, c’est la richesse des pays impérialistes comme la France basée sur les salaires de misère et les dictatures des pays dominés. C’est, en France même, en 2022, 565 000 accidents du travail déclarés dans l’année, dont 789 décès (site du Ministère du Travail) – les maladies professionnelles sont largement sous-déclarées. C’est, prévus en juin 2025, 100 000 emplois de moins qu’un an plus tôt (Le Monde, 15 avril), les licenciements à Arcelor ou à Owens Illinois. Et on sait que les suppressions d’emplois, ce sont aussi des suicides, des dépressions, des morts et des blessés. La démocratie, c’est aussi les féminicides et les violences familiales, dont on parle beaucoup comme des faits divers isolés, et qui continuent, comme le reste. Et en France, on tue aussi les bébés : la mortalité infantile périnatale a recommencé à augmenter depuis 2021, pour atteindre 4,1 pour 1000 naissances. En 2024, 2700 enfants sont morts avant un an. C’est une réalité dissimulée, le résultat d’une bonne gestion financière et des mesures d’austérité à l’hôpital, avec en prime la fermeture des maternités. C’est cette démocratie que vous voulez préserver ?

Nous vivons dans une époque de plus en plus raciste, fasciste, guerrière, viriliste, homophobe, pilleuse de la Nature, anti-sociale, dirigée par et au service des plus gros capitalistes. Ce que vous voulez, vous, c’est une démocratie qui soit réellement un pouvoir du peuple par le peuple et pour le peuple, un pouvoir ouvrier. Une « démocratie populaire ». Alors, dites-le !
Dites que c’est la seule démocratie possible, la seule manière d’aller de l’avant, de « s’en sortir ». Que peut-on opposer au capitalisme agonisant, sinon un communisme naissant ?

Alors, à quelle époque vivons-nous ? A l’époque où le capitalisme est clairement au bout du rouleau, menacé de mort et menaçant de nous entraîner dans la barbarie avec lui. Nous vivons une époque où il faut, à un système mortifère, opposer un autre système. Et ce pouvoir ouvrier pour le communisme, il se prépare et se construit dès maintenant.

Ce numéro de Partisan est tout entier marqué par ces questions. Ce sont des questions ouvertes. La situation est complexe, les réponses ne sont pas simples, même si nous avons une orientation ferme et résolue. Vous partagez ces débats autour de vous, partagez-les aussi avec le comité de rédaction de Partisan. C’est la période qui nous oblige !